[Live] Les Nuits Secrètes 2019

L’Eden, la scène où tout est permis

L’an dernier, on écrivait « c’est sans doute la scène de l’Eden qui nous aura fourni le plus d’émotions inattendues ». Plus que jamais cette année, l’Eden aura été le lieu où les Nuits Secrètes osent, avec une programmation à la fois pointue et extrêmement variée. Que dire par exemple du fait que cette scène ce soir refermée sur la performance de Kompromat, projet commun de Vitalic (déjà présent sur cette même scène la veille avec son projet Dima) et Rebeka Warrior (vue en 2016 sur l’ancienne scène du Jardin avec son projet Mansfield.TYA). C’était électro, c’était dark, c’était punk, c’était un peu pop parfois. Ou comment finir en apothéose !

L’Eden, c’est aussi la scène où l’on vient voir tous ces groupes qu’on a vu et surtout qu’on verra dans les mois qui suivent dans les salles de concert du nord de la France. On a ainsi pris notre pied à enfin retrouver sur scène Blood Red Shoes, même s’il faut avouer paradoxalement que les titres les plus efficaces et convaincants étaient ceux du dernier album, joués à quatre musiciens (le duo étant accompagné d’un clavier et d’une basse pour l’occasion).

On a vécu une vraie expérience avec Sleaford Mods et leur concept d’électro punk improbable où Andrew Fearn ne sert à rien, sinon à boire des bières en gardant un œil sur le Mac Book pour s’assurer qu’il ne se mette pas en veille, tandis que Jason Williamson enchaîne les déhanchements freestyle (on est persuadés de l’avoir vu faire de la air contrebasse pizzicato sur son manche de micro, rien que ça) tout en passant le plus clair du temps à regarder ses pieds comme un grand timide. Sur le papier, ça ne peut pas fonctionner et passionner les foules. Et pourtant ça marche ! À tel point qu’on en redemandera en septembre à l’Aéronef.

La plus grosse claque à l’Eden aura sans doute été le concert de The Psychotic Monks. Déjà auteurs d’un des meilleurs concerts, sinon du meilleur, lors des derniers Paradis Artificiels en mars à Tourcoing, le groupe a manifestement grandi au fil des mois. Un peu timides au printemps (leur musique se chargeant de parler pour eux), ces quatre-là s’emparent désormais de la scène et ont une présence de dingue. Jouant tantôt dans la quasi obscurité, tantôt dans une lumière blanche crue et aveuglante, et entre deux dans les stroboscopes, leur son est une déflagration haletante et suffocante. Il vous attire comme un trou noir et ne vous libère plus jamais.

Outre ces temps forts, on se sera réconcilié avec Fat White Family, dont le passage chaotique au Grand Mix il y a quelques années, pour un set de 15 minutes montre en main, bordélique et aussi chargé que son chanteur, restait pour nous un traumatisme. Assagis mais pas moins punk et toujours un peu psychés, on aura ici eu le temps de prendre la mesure de leur talent. On aura réalisé à quel point Flavien Berger est devenu en quelques années une figure incontournable de la chanson française, et « Maddy La Nuit » est désormais officiellement notre tube de l’été 2019 ! Et l’énergie insufflée par Thylacine à son nouveau set centré sur son album « Roads » se sera révélée plus que communicative. Dans une moindre mesure, on saluera l’ambiance mises par des groupes comme L’Entourloop ou Salut C’est Cool ; malheureusement l’auteur de ces lignes se sera révélé totalement hermétique à leurs univers.

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David Tabary

photographe de concert basé à Lille, rédacteur et blogueur à mes heures