[Sorties] 5 soirées et festivals immanquables en février 2022

Après un mois de janvier tristement, mais aussi durement marqué par le durcissement des protocoles sanitaires dans les lieux accueillant la culture, on respire un peu mieux en février sous nos masques. Retour à des jauges pleines dans les salles et fin annoncée de l’obligation des concerts assis, qui avaient tous deux mis un coup de frein très sec à l’activité de nombreuses manifestations dès la fin décembre. C’est donc à la fois en soutien à toutes les salles, mais également à tous les artistes et acteurs du monde de la culture que nous consacrons ce premier rendez-vous décalé des sorties de 2022. Allez, on y croit et on se retrouve surtout vite au premier rang des concerts pour soutenir nos groupes favoris tout au long de l’année !

Festival Hibernarock

Du samedi 5 février au vendredi 11 mars 2022 dans le Cantal

Comme beaucoup de festivals de musique, le festival cantalien Hibernarock a lui aussi été percuté par les effets de la pandémie depuis maintenant près de deux ans. Mais il en fallait plus que ça pour que ce festival nomade, décidément pas comme les autres, qui ose la découverte et l’émergence au cœur de l’Auvergne rurale ne soit pas au rendez-vous en 2022. Il répond ainsi de la plus belle des manières, à travers une programmation exigeante et recherchée (comme à son habitude, d’ailleurs), qui n’a vraiment pas à rougir des comparaisons plus urbaines. Au menu de cette édition résiliente et cosmopolite, à la belle tonalité féminine jugez plutôt :  Morgane Imbeaud, La Chica, Ottis Cœur, Clara Ysé, November Ultra, Laura Cahen…  Mais aussi des têtes d’affiche comme Jean-Louis MuratRover  ainsi que des artistes étonnants comme  Brama, Tankus The Henge, Biga*Ranx et Bonbon Vodou… Une date retient particulièrement notre attention, une affiche de rêve pour les lecteurs et lectrices d’indiemusic qui réunira à Mauriac dans une soirée événement le cultissime Peter Walsh de The Apartments au cœur de sa tournée en solitaire avec tout simplement, la révélation de ce début d’année, la musicienne Lonny, auréolée de son splendide nouvel album « Ex-Voto ». En parallèle des concerts, une multitude d’événements nourriront la proposition musicale et culturelle du festival. Plus d’infos sur le site Hibernarock.


Sweet Gum Tree et Geoffrey Le Goaziou

Jeudi 10 février à La Boule Noire (Paris)

Deux générations partageront avec bonheur la scène de la Boule Noire, le 10 février prochain, et exalteront chacune à leurs manières, les émotions vibrantes de leurs inspirations pop et folk classieuses et sensibles. La première sera celle de l’expérience, de la maturité artistique, de  la constance, de la musicalité de l’esthète Arno Sojo, capitaine de bord du navire Sweet Gum Tree.  Fier d’un nouvel album « Silvatica », sorti en novembre dernier, long format à l’élégance rare et au sens de la composition divin, le musicien et chanteur angevin est allé chercher loin au fond de lui, mais aussi auprès de musiciens aguerris, ce profond sens de l’équilibre et cette justesse décisive. Autant de vertus qui sont les marques des plus grandes et grands mélodistes de la pop anglo-saxonne, à l’image bien sûr de Paul McCartney, mais aussi de David Sylvian, PJ Harvey, Tori Amos, Elliott Smith, Mark Hollis ou encore Ben Gibbard de Death Cab for Cutie ; ce qui fait d’ailleurs d’Arno Sojo, l’une des fines fleurs du genre dans l’Hexagone, et soyons honnête encore beaucoup trop confidentielle au regard de son talent. De l’autre côté, se présentera la jeunesse, l’insouciance, mais aussi toute la puissance émotionnelle du très lumineux Geoffrey Le Goaziou, activiste do it yourself de l’émulation folk nantais au sein du collectif Folk Forty Four et dans le groupe Ämelast, et désormais aussi en solitaire sous son propre nom. À l’aube de la sortie de son premier album sur le label Daydream Music, il affole déjà les radars avec la vérité désarmante d’un premier single « Bili », à travers lequel on le compare déjà et non sans raison à des électrons libres comme Devendra Banhart et Liz Green. À suivre de près, de très près.


La Colonie de Vacances

Mercredi 16 février à Paloma (Nîmes)

D’une certaine manière, le collectif La Colonie de Vacances a bouleversé les codes habituels du concert rock live depuis quelques années, en proposant une expérience immersive saisissante, pourtant basée sur une idée d’une simplicité déconcertante mais proposant un chemin musical innovant aussi bien esthétiquement que culturellement. Comme de nombreux artistes des arts de rue par rapport à la forme classique du théâtre, La Colonie de Vacances a décloisonné la notion de 4e mur et le face à face courant entre public et musiciens dans l’expérience rock. Ce qui d’ailleurs était auparavant avant tout basé sur une revisite des compositions de chacun des groupes du collectif ; à savoir Pneu, Papier Tigre, Electric Electric et Marvin, se transforme aujourd’hui, avec la sortie d’un premier album (très attendu) en un acte de création à part entière, où ces musiciens n’ont absolument pas cédé à la facilité de se reposer derrière le côté surprenant de leur dispositif. « Echt » est ainsi un album exigeant, sinueux et radical nourri de noise, de musique industrielle, de math rock, d’ambient et de musiques électroniques… qui souligne à la perfection la résistance esthétique des membres de La Colonie de Vacances, face à la standardisation galopante de la création musicale actuelle. Non sans hasard, la formation XXL se présentera dans l’emblématique SMAC de Nîmes, Paloma en ce jour symbolique du 16 février 2022. Cette soirée s’ouvrira d’ailleurs avec une conférence de la marin-sauveteuse Claire Faggianelli sur la situation humanitaire dramatique qui frappe des enfants, des femmes et des hommes en mer méditerranée. Cette soirée sera aussi l’occasion de découvrir la sensibilité expérimentale et libre de l’artiste Julia Hanadi aLabed qui façonne des paysages sonores étranges et déroutants. Comme quoi, loin du simple divertissement, cette soirée démontrera, par la puissance du geste artistique et la richesse de la proposition, que les salles de musiques actuelles sont des lieux de culture au sens noble du terme, au cœur du vivre-ensemble, de la découverte et des grands sujets de société.

Loin d’être une date isolée, La Colonie de Vacances avec Claire Faggianelli et Julia Hanadi aLabed parcourront les grands axes routiers jusqu’à la fin février : le 6MIC d’Aix le 17, l’Antipode de Rennes le 19 (déjà complet), l’Épicerie Moderne de Lyon le 23, L’Élysée Montmartre à Paris le 24, l’Aéronef de Lille le 25, Le Confort Moderne le 26. Avant des dates plus isolées : le festival Chorus le 9 avril, Stereolux à Nantes le 10 juin, le Rocher de Palmer à Bordeaux le 14, suivi du Bikini de Toulouse le 15 et du Château de Plessis de Tours le 16. Vous savez ce qu’il vous reste à faire !


Hey Ho! Let’s Go! avec Johnnie Carwash, Unschooling et les Nuits de l’Alligator

Mercredi 16 et jeudi 17 février 2022 à la Coopérative de Mai (Clermont-Ferrand)

Voilà une bien belle initiative à saluer du côté de La Coopérative de Mai ! Afin de fêter le retour des beaux jours – comprendre celui des concerts debout -, la SMAC clermontoise passe en gratuit les deux soirées « très rock » du mercredi 16 et jeudi 17 février. Et elle ne manque pas d’arguments à commencer par la réunion le mercredi de deux têtes de proue de la nouvelle scène rock indé français (accessoirement tous deux signés chez Howlin’ Banana) : d’un côté, le power trio lyonnais Johnnie Carwash qui viendra y présenter son rafraîchissant premier album « Teenage Ends », aux hymnes garage pop supersoniques et immédiats ; de l’autre, le quatuor rouennais Unschooling développant sur ses premiers actes hostiles et bruitistes un post punk au jeu affuté et passionnément dangereux. Les amateurs des mélanges sucrés-salés-pimentés en auront pour leur compte.

Le lendemain, l’indispensable Nuit de l’Alligator revisite l’histoire de ce redoutable blues des bayous, né sur les bras du Mississippi, entre les marécages, les plantations et les bêtes sauvages qui s’y tapissent. En tête d’affiche de cette soirée, le duo heavy blues indianien Left Lane Cruiser, héritier furieux et incandescent du grand R. L. Burnside. Mais aussi Jerron « Blind Boy » Paxton, chanteur et multiinstrumentiste de Los Angeles, revisitant l’héritage du blues originel des années 20 avec une authenticité et une intention prodigieuse ; sans oublier le Lyonnais Théo Charaf, sosie underground de François Civil et dernière grande révélation française du blues dont le premier album éponyme est chargé d’histoires sombres, conviant le diable, les bandits et les vampires à la table des règlements de compte. En bref, l’occasion parfaite pour réviser les nouvelles gammes du blues actuel à un prix défiant toute concurrence.

Un même line-up à retrouver d’ailleurs également le 16 février à l’Hydrophone de Lorient, ainsi que le 18 à la Vapeur de Dijon, le 19 à l’Autre Canal de Nancy ainsi que le 20 à la Maroquinerie (Paris) dans le cadre de la tournée hexagonale des Nuits de l’Alligator.


Goldencut

Vendredi 18 février au Grillen (Colmar)

Si un trio en France symbolise en ce moment aux côtés de As New Revolt et d’Ausgang, la détermination et l’engagement de l’esprit conscient du rap, du punk et du rock alternatif, c’est bien Goldencut. Revendiquant l’influence décisive de Public Enemy, en particulier le MC américain Eli Finberg, le groupe trouve dans une expression à la fois rageuse et frontale, mais aussi sensible et très nuancée, la voie d’un salut artistique et citoyen face à la déraison des sociétés occidentales de plus en plus malades, sombrant chaque jour toujours un peu plus dans le déni et les dérives réactionnaires et conservatrices. Fiers d’un premier EP, qui pourrait ravir les fans de Saul Williams, de Run The Jewels et de Kendrick Lamar, les trois complices auront à cœur de faire vibrer les élans fédérateurs hip-hop, electro et rock de leur musique pour transmettre leur message humaniste et progressiste, au Grillen à Colmar, première date d’une série qui nous l’espérons passera un peu partout en France, comme le 12 mars prochain pour leur release party dans le cadre du festival Ind’Hip’Hop aux Ateliers Éclairés de Strasbourg.

Laurent Thore

Laurent Thore

La musique comme le moteur de son imaginaire, qu'elle soit maladroite ou parfaite mais surtout libre et indépendante.