Isbells – Stoalin’

Sur les traces d’un Justin Vernon encore aspirant, les Belges d’Isbells renouent avec « Stoalin’ » excellence et simplicité.

Isbells - Stoalin

Il y a des sentiments contre lesquels on ne peut rien. L’envie de les exprimer est bien présente, mais le « cul-de-sac » arrive sans crier gare. Une expression refoulée, bâclée. Après tant de supplices, certains abandonnent sans grande ambition, tandis que d’autres marginaux s’exécutent à la néologie, phénomène de création de nouveaux mots, résultant de l’incapacité à exprimer une idée ou un sentiment voulu.

À moins qu’un inéluctable génie parvienne à traduire « Stoalin’ », Isbells prouve que la texture phonétique est plus forte que le sens des mots, comme l’ont déjà fait les pionniers de Sigur Rós avec leur inventive langue « vonlenska ». Au long de dix colères refoulées, ces dandins belges, originaires de Leuven, sont les penseurs d’une folk introspective, quelque peu organique et non sans rappeler le premier éclatement acoustique « Another Year » de leurs compatriotes K’s Choice.

À la première écoute, on est de suite frappé par la guitare – presque flamenco – sur la chanson-titre, peut-être est-ce dû à l’errance inspirée de Gaetan Vandewoude et compagnie dans une petite maison sur une colline d’Espagne. Puis on reste frissonnant au son de la chorale d’enfants dans « Elation » et abasourdis par l’étrange, mais merveilleux orchestre coda de « Erase and Detach », apothéose en puissance. Plus divergent que leur premier opus, ces pistes colorées se tempèrent entre les légères touches d’harmonica, de banjo, trompettes et autres percussions. À trop flirter avec Bon Iver, l’esthétique du « less is more » devient légitime et confère sans équivoque au déchirement renommé et troublant de « For Emma, Forever Ago ».

crédit : Koen Bauters
crédit : Koen Bauters

Dans un sentiment d’authenticité, les Belges d’Isbells évoluent vers une musicalité proche du sublime et innovent dans l’orchestration de leur début. Certes, ils s’engagent sur des pistes sures et concrètes pour éviter le « casse-gueule », mais pourrait-on les blâmer ? Car à trop vouloir expérimenter, on risquerait de perdre l’un des objectifs premiers de la musique : donner.

« Stoalin’ » D’Isbells, disponible depuis le 22 mars 2012 chez Zealrecords.

isbells.be
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Julien Catala

chroniqueur mélomane, amoureux des échanges créés autour de la musique indépendante