[Interview] Jérôme Sevrette pour son ouvrage Terres Neuves [Re]Visions

À l’occasion de la sortie en septembre prochain de son livre-objet « Terres Neuves [Re]Visions » regroupant des photographies Polaroïd, des écrits d’auteurs et des collaborations avec pas moins de trente groupes et artistes, le photographe rennais Jérôme Sevrette nous raconte son parcours et son quotidien d’être créatif inlassablement passionné. Photographe émérite et amoureux fidèle des musiques actuelles, c’est en véritable intermédiaire entre le monde de la musique et celui de l’image qu’il revient pour indiemusic sur ses plus belles collaborations et amitiés et ses plus forts souvenirs de concerts. Une interview hors format d’un artiste au parcours aussi atypique qu’attachant.

crédit : Fabienne Cresens
crédit : Fabienne Cresens
  • Bonjour Jérôme ! Depuis quand exerces-tu la profession de photographe et peux-tu me faire un rapide historique de ton activité à travers tes rencontres les plus marquantes, tes moments-clés ?

Je me suis intéressé à la photographie vers la fin des années 80. Au milieu des années 90 et jusqu’au début des années 2000, j’ai un peu mis en stand-by ce qui n’était à cette époque qu’une passion, pour la musique. Je me suis mis à la batterie et j’ai joué dans quelques groupes sur Le Mans et Rennes ; point culminant de cette période, un concert aux Vieilles Charrues en 2002 avec mon dernier groupe Keep Punching Joe, un beau souvenir. Mais en fait, cette même année, j’avais déjà dans l’idée de relancer mon activité photographique et la suite logique a été la mise en ligne de mon site photographique.fr qui est toujours actif à ce jour même s’il a bien changé en 14 années d’existence. En 2004, je décide d’arrêter définitivement la musique pour me consacrer uniquement à la photographie et faire vivre mon site. Nous sommes alors en pleine époque « MySpace » et je me crée un compte pour pouvoir présenter mon travail sur ce premier « réseau social ». C’est sur cette plateforme que je ferai des rencontres qui s’avéreront être déterminantes dans la suite de mon parcours photographique. J’y rencontre tout d’abord Frédéric Truong, puis Manuel Ferrer du groupe A Singer Must Die, et puis, en 2006, je reçois un message sur MySpace d’un certain Simon Huw Jones du groupe And Also the Trees pour me demander plusieurs photos pour l’artwork de leur album « The Rag And Bone Man », qui paraîtra l’année suivante. C’est à ce moment que je me suis dit que ça devenait vraiment sérieux même si je soupçonnais mon ami Frédéric Truong, qui connaissait bien Simon, d’avoir joué les entremetteurs. Dans tous les cas, les frères Jones avaient flashé sur une de mes séries et voulaient absolument ces photos pour leur artwork. J’ai bien entendu accepté leur demande et cet album a été ma première vraie collaboration avec un groupe pour une pochette de disque.
Par la suite j’ai réalisé d’autres pochettes pour Frédéric Truong pour deux magnifiques albums (en 2008 et 2011) et pas mal de singles, et puis, en 2009, je reçois une commande pour réaliser l’univers visuel du premier album solo de Xavier Plumas du groupe Tue-Loup. Cette commande sera ma vraie première commande de portraits et un beau projet auquel j’adhère tout de suite. J’ai pour mission de faire les portraits de Xavier avec un cahier des charges bien précis. Il faut de la couleur bleue, on doit y voir de l’eau et Xavier n’est pas spécialement partant pour avoir sa tête sur la cover. Au final, après deux sessions photo où nous nous sommes perdus en forêt et des ampoules aux pieds, je rends une série de photos en noir et blanc, sans couleur bleue, sans eau et avec Xavier sur pratiquement toutes les photos… La production adore la série et « La Gueule du cougouar » sort l’année suivante chez [PIAS] avec un beau succès dans les bacs. L’année 2010 marque aussi la fin des années MySpace puisque tout le monde à cette époque migre vers… Facebook et le début d’un projet qui prendra une part importante dans mon travail et dans ma vie, je veux bien entendu parler de « Terres Neuves ». Et c’est justement ce projet qui me donne envie de reprendre contact avec Manuel Ferrer pour lui demander s’il accepterait de participer à ce projet. Étrangement Manuel de son côté était sur le point de me contacter pour me demander si j’accepterais de réaliser les photos du prochain album de A Singer Must Die. On appelle ça « les grands esprits qui se rencontrent », je crois ?
Et de ce moment naîtra une succession de collaborations et de créations pour A Singer Must Die qui est à ce jour le groupe pour lequel j’aurais produit le plus de photos.

A Singer Must Die © Jérôme Sevrette
A Singer Must Die © Jérôme Sevrette

C’est également par l’intermédiaire de Manuel que je reçois un jour de 2010 un mail d’un mystérieux chanteur américain. Il s’appelle Kramies et serait intéressé par une participation à « Terres Neuves ». Je ne le connais pas. Il indique un lien pour écouter sa musique. J’y vais en ne m’attendant à rien de spécial, mais dès que j’entends sa voix, les mélodies, l’atmosphère de sa musique… je me dis que ce type est un songwriter de génie, et je lui réponds fissa pour lui dire que oui, bien sûr, il peut participer ! La suite, nous la connaissons : une série de disques plus beaux les uns que les autres, une très belle collaboration avec Jason Lytle, et un début de reconnaissance de la part de la presse musicale française, dont indiemusic y est pour beaucoup aussi, je crois !
Les années suivantes, je réalise de nombreux visuels pour ses disques et des portraits à l’occasion de son passage à Angers, en 2015. Un très beau souvenir que cette session sur les rives de la Maine à Angers et au Grand Théâtre !
D’autres belles rencontres se feront au début de ces années Facebook. Je pense à Cyril Laurent de Lambwool, qui utilisera mes photos sur trois albums avec toujours un belle mise en avant des artworks (digipacks et pochettes CD au format 45t) ; à Franck Vigroux pour des pochettes de 33 tours et des portraits ; à Amaury Cambuzat d’Ulan Bator pour illustrer le single « Soleils » en 2009.
Et puis, en 2014, je fais la connaissance de Filip Chrétien, dont je viens de découvrir l’album « Día a Día ». Nous nous sommes tout de suite bien entendus et s’en est suivie une série de collaborations pour des portraits, des photos live et la réalisation des visuels de son dernier album, « Les traces ».
Filip me propose ensuite de réaliser les images pour la vidéo du titre « Mes sentiments », ma première captation vidéo pour un clip.

Filip Chrétien © Jérôme Sevrette
Filip Chrétien © Jérôme Sevrette

Voilà un peu les grandes lignes de mes rencontres et moments importants de mon activité photographique jusqu’à ce jour ; et, bien entendu entre tous ces moments et ces étroites collaborations avec ces artistes, je me suis attaché à parfaire ma technique et ma vision du portrait par le biais de rencontres plus brèves avec d’autres artistes, à l’occasion de concerts et de festivals… En photographie, on ne s’arrête jamais vraiment ; même quand je ne photographie pas, j’y pense.

  • C’est le sujet central de notre conversation : en septembre 2016 sortira ton livre-objet « Terres Neuves [Re]Visions », qui est la suite de « Terres Neuves », publié en 2013. Peux-tu me présenter ce projet et sa singularité ?

« Terres Neuves » est né de l’idée que j’avais de concevoir un livre photo différent de ce qui se fait habituellement dans le milieu de l’édition et, surtout, d’y proposer de la musique. Je me lasse vite de ce qui est déjà existant, et je pense que tout vient de cette lassitude de voir passer 10 000 fois le même genre de livre. Mais, comme beaucoup le savent, tout n’a pas été simple, et à plusieurs reprises, ce projet a bien failli ne jamais voir le jour faute de budget ; car oui, ce type d’ouvrage, et surtout sa fabrication, a un coût assez élevé, car il y a une partie façonnage de l’étui au format 33t, l’impression des planches photos et du texte et la réalisation des deux CDs. Mais ça a été très clair pour tout le monde, dès le départ, pour moi comme pour l’éditeur ou les participants : on ne gagnera pas d’argent sur ce type de projet et il n’aura, de toute façon, pas été conçu pour ça. Ce livre est une zone d’échange et de création entre artistes, et c’est en cela qu’il est enrichissant et hors du commun ; et ça, ça vaut bien plus que quelques billets.

Terres Neuves [Re]Visions

  • Si je comprends bien : ce livre-objet part de la photographie polaroïd couleur. Tu as confié à des écrivains et des musiciens le soin de te livrer, dans cet ouvrage, leur regard sur ton travail photographique. Finalement, c’est un ouvrage d’inspirations multiples, dans le sens où tes images donnent vie à d’autres créations ?

Oui, c’était vraiment ça l’idée : passer le relais de mes visions à d’autres sensibilités, en l’occurrence musicales et littéraires. De ce point de vue, ça a parfaitement fonctionné, et tous les participants se sont vraiment investis dans cette relecture de mes images.

  • Peux-tu d’ailleurs me parler des écrivains qui ont collaboré à ce projet ?

Je vais déjà rappeler brièvement les noms des auteurs invités sur le premier volume : Danielle Robert-Guédon, écrivain et amie de longue date, Amine Boucekkine, poète et performer organisateur des célèbres soirées parisiennes « Le Langage des Viscères », Xavier Plumas du groupe Tue Loup et Marie Möör, personnage insaisissable et sauvage plus connu pour ses textes pour des artistes comme Jean-Louis Murat, Bertrand Burgalat ou Christophe…

Xavier Plumas © Jérôme Sevrette
Xavier Plumas © Jérôme Sevrette

Pour le second volume, j’ai convié Arnaud Le Gouefflec, musicien, écrivain et scénariste de BD qui est une figure emblématique de la scène culturelle Brestoise. Il y aura d’ailleurs beaucoup d’artistes brestois sur ce deuxième volume de « Terres Neuves ». Un autre auteur que j’avais à cœur d’inviter sur ce second opus, c’est Dave le Monocle. J’avais été très impressionné par sa lecture lors de la soirée au Grand Théâtre d’Angers, en compagnie du groupe A Singer Must Die et de Kramies : le choix des mots, le ton et le temps du récit… Il sera présent à la fois dans la partie texte, mais aussi dans la partie musicale du livre, avec la lecture de son texte accompagnée à la guitare par Olivier Mellano et, de manière indirecte, sur le titre de Filip Chrétien dont il a écrit les paroles. Pour finir, le livret texte accueillera l’auteur franco-nord-américain Eric Scatton-Tessier et ses visions urbaines. Eric avait eu entre les mains le premier volume de Terres Neuves ; l’idée l’avait vraiment enthousiasmé et il avait fait rapidement savoir qu’il serait partant pour participer à ce deuxième volume.

  • De même, qui sont les musiciens qui ont répondu à ton invitation ?

Il y aura 30 titres originaux et inédits sur ce second volume.
Je commencerai par citer les artistes et groupes les plus connus ; à savoir The Apartments, Franck Alba et Ricky Maymi (respectivement membres des groupes Piano Magic et The Brian Jonestown Massacre), Brisa Roché, Blood On The Snare (avec Jérôme Tcherneyan, également membre de Piano Magic), Richard Pinhas avec une pièce musicale de huit minutes incluant un enregistrement personnel de Philip K. Dick (pour rassurer les fan de Richard Pinhas, le morceau d’origine durait vingt minutes), Renaud Gabriel Pion avec Jennifer Charles d’Elysian Fields… Et puis, je ne vais pas faire le détail de tout le monde, mais vous retrouverez aussi Bruno Green, Lou, Filip Chrétien, A Singer Must Die, Jacob & Olivier Mellano, Ulan Bator, Kramies, Frantic & Robert Palmer, This Grey City, Jean-Louis Bergère, Jéhan & Isa Valenti, Republik & Nolwenn Korbell, Dale Cooper Quartet & The Dictaphones, 19 New Project, Dead, Praeda, M.Nomized, Arkane, Band of Ghosts, Kim Die Laughing, Lambwool, Colin Chloé et Tue Loup.

Tue Loup © Jérôme Sevrette
Tue Loup © Jérôme Sevrette

Certains artistes étaient déjà présents sur le premier volume. Pour d’autres, c’est une première et une dernière, car je peux déjà le dire : il n’y aura pas de Terres Neuves 3.

Et sans vouloir me jeter des fleurs, ce que je peux également dire, c’est qu’avoir rassemblé autant d’artistes de cette trempe sur un seul et même projet est un petit exploit, et je tiens vraiment à remercier les artistes pour leur investissement ; les fleurs, c’est à eux qu’il faut les jeter. Les titres que j’ai reçus sont tous sans exception de petits chefs-d’œuvre musicaux… À découvrir exclusivement sur les compilations »Terres Neuves » !

  • Ce qui est singulier dans ton travail présenté dans « Terres Neuves », c’est le rapprochement étroit entre l’image et la musique. Ton travail en images a-t-il toujours été en lien avec l’univers de la musique ?

J’ai pour habitude de dire que je suis photographe parce que je suis un piètre musicien.
Je pense que, pour moi, la musique prendra toujours le dessus sur la photo ; même si je ne suis plus musicien, c’est dans mes gènes et je retranscris ce besoin de création musicale par l’image, je construis mes séries un peu comme des albums de musique. Il y a les photos assez marquantes, fortes, de mes séries que je mets en avant, un peu comme des singles ; et puis les autres photos, moins marquantes, mais qui fonctionnent dans la lecture complète de l’album.
Une autre évidence est que je fréquente de manière régulière les festivals de rock et les salles de concerts, et beaucoup moins les festivals de photos et les salles d’expositions. Je lis la presse musicale, mais pas celle consacrée à la photographie ; donc, le choix est vite fait.

  • À côté de ces deux ouvrages, tu exposes également dans des galeries ou à l’occasion d’événements. Comment t’y prends-tu pour sélectionner les clichés à présenter au public ? Qu’est-ce qui est déterminant dans tes choix ?

Eh oui, même si je suis peu assidu dans mes visites d’expositions, cela ne m’empêche pas d’exposer et d’être acheté par des centres d’art, des galeries, des municipalités ou des artothèques.
Mes photos sont présentes dans les collections de la Ville de Rennes, du Mans, de l’artothèque de Vitré, de la galerie du Carré d’Art à Chartres de Bretagne et de la galerie de l’Imagerie à Lannion.
Pour le choix des photos que je présente, tout dépend du lieu et du contexte de l’exposition.
Le choix est aussi souvent fait par le lieu lui-même pour correspondre à une thématique.
Ce qui détermine la sélection des photos pour une exposition reste la cohérence des images entre elles.

Exposition de la série "Terres Neuves" à Vitré
Exposition de la série « Terres Neuves » à Vitré
  • À l’inverse d’autres confrères, tu ne travailles pas la mise en scène en studio : tu joues beaucoup avec l’atmosphère de l’environnement présent et les lumières naturelles. Comment ces éléments influencent-ils ta manière de créer ?

Je n’ai jamais voulu m’embarrasser avec trop de matériel ; j’aime voyager et travailler léger pour rester réactif et ne pas être ralenti tout le temps pour installer ou contrôler un truc.
Et, de toute façon, j’aime les lumières et les traitements naturels. La contrefaçon studio à grands renforts de maquillage et d’effet lumineux, ce n’est clairement pas ma came. Je pense que le travail en extérieur, dans un environnement naturel, me rend plus créatif : le lieu devient une source d’inspiration, tout comme la lumière en devient une autre… Peu importe le lieu et la lumière, on n’est jamais à court d’inspiration en extérieur ; il faut juste savoir apprécier le lieu et avoir déjà en tête la photo finale pour ensuite utiliser l’ambiance environnante à bon escient.

  • Tu photographies également les artistes dans leur milieu naturel : la scène ! Y’a-t-il des artistes que tu aimes particulièrement photographier, voire que tu as eu la chance (ou l’invitation) de suivre sur plusieurs dates ?

J’ai toujours plaisir à faire et à refaire des photos avec mes amis Xavier Plumas, Manuel Ferrer ou Filip Chrétien, que ce soit pour des portraits ou des photos de concert. Ensuite, je ne suis pas (encore) associé de manière officielle à un artiste ou un autre, mais je suis ouvert à toute proposition !

  • Y’a-t-il des concerts qui t’ont marqué plus que d’autres ? Des festivals ou des lieux (salles de concerts) que tu aimes particulièrement ?

Il y a en a pas mal : chaque concert de The Apartments ou de And Also The Trees restent de purs moments de plaisir. Je ne sais plus combien de fois j’ai vu ces deux groupes sur scène, mais je ne m’en lasserai jamais. Mais sinon, j’ai vraiment bien accroché aux concerts de Mansfield. TYA ou Peter Kernel aux Rockomotives de Vendôme. Le live de A Place To Bury Strangers à la Carène à Brest, en mars dernier, était aussi une belle expérience ; je les avais déjà vus à la Route du Rock quelques années auparavant, mais dans une salle, c’est tout autre chose. Mais faire un classement de tous les groupes que j’ai vus en concert me semble difficile.

A Place To Bury Strangers © Jérôme Sevrette
A Place To Bury Strangers © Jérôme Sevrette

Pour ce qui est des salles de concerts ou des festivals, je reste très attaché aux Rockomotives de Vendôme, un festival à taille humaine avec une programmation toujours très pointue et un cadre magnifique pour les photos… Et tu ne perds pas vingt minutes à essayer d’aller aux toilettes ou commander une bière. Ensuite, je dirais la Carène à Brest. J’ai beau habiter sur Rennes, je fais finalement peu de photos dans les salles rennaises, et de plus en plus à Brest, je ne sais pas pourquoi… Enfin, si : j’aime l’ambiance de cette ville et la salle de la Carène est vraiment idéale pour réaliser de bonnes photos live.

Jeanne Added © Jérôme Sevrette
Jeanne Added © Jérôme Sevrette
  • Revenons un peu sur ces rencontres : on devine des histoires d’amitiés nées grâce à ces médiums formidables que sont la musique et la photographie. Peux-tu m’en parler un peu ? Je pense particulièrement au groupe pop symphonique angevin A Singer Must Die et à l’Américain Kramies que j’ai, comme toi, eu la chance de côtoyer.

Oui, il est évident que sans la rencontre de ses deux univers, je n’aurais jamais fait la connaissance de toutes les personnes citées précédemment : Manuel Ferrer bien sûr, mais aussi Xavier Plumas, Filip Chrétien, Jean-Louis Bergère, Jéhan, Colin Chloé… et Kramies évidemment, même si on ne se voit pas très souvent, mais avec qui je communique régulièrement par mail ou via Facebook.

Kramies © Jérôme Sevrette
Kramies © Jérôme Sevrette
  • Tu pratiques à la fois la photographie numérique via ton boîtier Canon et la photographie argentique grâce à des Polaroïds. Qu’aimes-tu dans ces deux pratiques de la photographie ? Vois-tu une complémentarité entre ces deux manières d’immortaliser l’instant et de créer une histoire ?

En fait, j’aime tous les types de photos ; le numérique au boîtier comme le smartphone. J’adore faire des photos au smartphone pour le côté très spontané de la prise de vue, très simple, directe.
Le polaroïd aussi, ; même si, pour mes nouvelles créations avec cette technique, je préfère dire « films instantanés », car la marque Polaroïd ayant arrêté la production de film en 2009, j’utilise les films de la marque Impossible, donc ce n’est plus du polaroïd, mais du film instantané.
Mais toute la série Terres Neuves à, quant à elle, bel et bien été réalisée en film Polaroïd !
Pour moi, toutes ces pratiques sont bien entendu complémentaires. C’est le sujet qui décide du type de procédé que je vais utiliser : pour du portrait, mon Canon avec mon 85 mm, et pour quelque chose de plus poétique, je vais passer au film instantané. Et si je vois qu’il y a matière à réaliser une mini-série, je sors le smartphone.

  • Ton style est particulièrement reconnaissable. Notamment tes portraits, principalement en noir et blanc, qui sont caractérisés par des noirs un peu délavés et des images très contrastées. Ce rendu singulier est-il obtenu dès le cliché initial, ou travaillé nécessairement en post-production ? Pour le dire autrement, parviens-tu, dès le déclenchement et donc avant tout développement, à avoir un rendu fidèle du résultat final ?

Il m’arrive d’obtenir dès la prise de vue un rendu assez satisfaisant qui ne me demandera pas un gros travail de post-traitement ; mais comme je suis très exigeant, toutes mes photos passent forcément par cette étape. Mais le rendu fidèle n’est pas forcément ce que je recherche, donc je sais que je ne pourrais pas obtenir la photo que j’ai en tête dès la prise de vue ; mais ce n’est en aucun cas un problème en ce qui me concerne.

Thurston Moore © Jérôme Sevrette
Thurston Moore © Jérôme Sevrette
  • L’importance du regard du photographe est aussi primordiale que les modèles eux-mêmes. De ce fait, comment saisis-tu ces instants ? Est-ce spontané, ou y’a-t-il au contraire toute une mise en scène que tu souhaites respecter pour ton travail ?

C’est toujours plus ou moins spontané ; cela dépend des personnes que je photographie. Même si les musiciens ont bien souvent l’habitude d’être photographiés, avec certains, c’est parfois moins évident. Mais la mise en scène, non pas vraiment, je peux décider du placement des personnes dans mon cadre ou le décor, il peut y avoir une « action » dans l’image, mais ça ne va souvent pas plus loin. Je ne demande rien de particulier aux artistes que je photographie, je ne leur demande pas de tous sauter en l’air en même temps ou ce genre de truc. Pour moi, ça doit rester simple et sobre.

  • Revenons à ton livre « Terres Neuves [Re]visions », à paraître en septembre 2016 aux Éditions de Juillet, en coédition avec Str8line Records. Combien d’exemplaires sont à paraître et comment et où se le procurer ? J’ai vu qu’il y avait un système de souscription en cours ; le but, c’est de permettre à ceux qui aiment ton travail de le soutenir en précommandant le livre, c’est bien ça ?

Oui, tout à fait ! Comme pour le premier volume, la souscription en cours servira à financer la fabrication du livre (700 exemplaires), car je ne vais rien apprendre à personne, mais le coût de production de ce genre d’objet est assez élevé, donc c’est pour cette raison que la souscription est nécessaire en ce moment, même si le livre ne sortira qu’en septembre 2016.
Mais pour les 100 premiers souscripteurs, une très belle affiche 40×60 cm hors commerce et en édition limitée sera offerte : un super collector, donc ! À noter aussi que vingt tirages de tête sont également disponibles avec un tirage original de l’image de couverture en digigraphie sur papier baryté format 20 x 20 cm, signé et numéroté.

Pour bénéficier de ces offres, c’est jusqu’au 15 août 2016 et c’est à cette adresse :
http://www.editionsdejuillet.com/products/terres-neuves-revisions

Et dernier point non négligeable : le fait de passer par le site des Éditions de Juillet et non pas par un site de crowdfunding pour les souscriptions permet un règlement direct auprès de l’éditeur, ainsi que la possibilité de pouvoir payer en ligne ou par chèque et pour les dédicaces. L’éditeur me les fait suivre, donc ça me permet de rester proche des souscripteurs.

  • Merci pour ta disponibilité et bonne chance pour la sortie de ton prochain livre-album !


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Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques