Dix ans ont passé depuis la sortie de « Sometimes », premier album essentiel de City and Colour, side-project solo de Dallas Green, extirpé de son rôle de chanteur et guitariste au sein de la formation post-hardcore canadienne Alexisonfire, dans un registre emo-folk.
Il y a deux ans, son quatrième album, « The Hurry and the Harm », ouvrait le folk du musicien ontarien à des arrangements pop chaleureux dopés par une orchestration toute en émotions, toujours bien servie par son chant de grand sensible.
« If I Should Go Before You » marque une étape importante dans la progression musicale du projet. Avec sa coloration blues, le Canadien nous séduit à travers des titres somptueux gagnant en profondeur et en tempérament sur la longueur.
« Woman », du long de ses neuf minutes en guise d’ouverture, marque cette progression dans la vision d’un single qui préfère faire monter la pression sans précipiter ni fausser l’émotion intrinsèquement recherchée, plutôt que de faire dans l’expéditif et le (bien souvent) trop vite oublié. On apprécie d’autant plus la tension qui s’installe, le chant semblant piégé et dominant à la fois, emporté dans un tourment rock fait de riffs chevauchés au pedal steel et à la guitare, d’une ligne de basse qui guette et d’une batterie qui appuie et intensifie l’effort. On savoure alors l’explosion finale, dernière virée passionnée au cœur d’un rock à l’âme si sublimement troublée et tourmentée.
Et que dire alors de son enchaînement avec le magistral « Northern Blues », porté par la voix aiguë et troublante de Dallas, suivi du langoureux « Mizzy C », blues animé de passion et d’intention ?
Les références à la soul et au blues reviennent souvent sur « If I Should Go Before You », jusque dans son titre éponyme, ballade blues nappée de mélancolie ; ou sur l’excellent « Wasted Love », blues-rock sublimé par un juste équilibre entre les parties chantées et une instrumentation brillante.
Pourtant, comme sur le précédent album, City and Colour n’évite pas l’écueil americana, voire country, qu’on pourra parfois juger un peu mielleux (Runaway, Lover Come Back), même s’il fera le bonheur des plus romantiques (et des meilleurs) d’entre nous et qu’il saura nous réserver de bien belles surprises (l’apaisant et réconfortant « Friends » et le rock western de « Map Of The World »).
En guise de fin, le pas du tout sanglant « Blood » nous offrira un instant folk plus confidentiel, emmené par le chant suave et caressant de Dallas accompagné de sa guitare, dont on confondrait les cordes caressées avec celles d’une harpe.
Sans faire figure de virage majeur dans le parcours discographique de City and Colour, « If I Should Go Before You » se veut un disque plus intense que son prédécesseur, gagnant en puissance dès ses premiers titres pour nous offrir alors les passages les plus essentiels et réussis de ce cinquième opus.
« If I Should Go Before You » de City and Colour, sortie le 9 octobre 2015 chez Dine Alone Records.
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