[Interview] Bear’s Den

Note for our readers: for the ENGLISH LANGUAGE VERSION of the interview, CLICK HERE.

Adaptation française de Raphaël Duprez.
Photos de Katie M. Simmons et Jessica Westbrook


« …il navigua nuit et jour,
il navigua pendant des semaines,
il navigua plus d’un an,
pour arriver au pays des Maximonstres. »

Max et les Maximonstres par Maurice Sendak

Max et les Maximonstres, Maurice Sendak


Le trio anglais Bear’s Den doit son nom à un lieu qui pourrait exister, situé sur l’île apparaissant dans le conte intemporel de Maurice Sendak, « Max et les Maximonstres ». Il semblait alors opportun de mettre les voiles pour un périple vers l’inconnu, dans une approche imaginative et ludique, afin d’interviewer Andrew « Davie » Davie (chant, guitare), Kevin « Kev » Jones (chant, batterie, basse), et Joey Haynes (chant, banjo, guitare). Le 8 novembre 2014, au Bootleg de Los Angeles, les gentlemen de Bear’s Den ont accepté de s’asseoir avec indiemusic.fr et de jouer à un petit jeu sympathique de cartes thématiques, inspiré de leur récent album, « Islands ». Le nom du jeu ? La dizaine pour Bear’s Den.

Bear's Den par Katie M. Simmons

Notre rencontre a débuté avec la présentation du jeu de cartes. Celles-ci sont ornées d’une empreinte faite avec un tampon taillé dans une pomme de terre crue, en hommage à la pochette faite maison de leur EP, « Agape », sur laquelle figurait une empreinte conçue de la même manière.

« Oh, wow! », s’exclame Joey.

« Impressionnant », acquiesce Kev.

« On est gâtés ! », confirme Davie.

À ce moment précis, nous avons tous compris que nous allions vraiment nous amuser, même si nous n’avions aucune idée de la suite des événements. Davie commence par lire les règles à voix haute, comme indiqué ci-dessous :


La dizaine pour Bear’s Den :

3 joueurs : Davie, Kev & Joey

Matériel : un jeu de 20 cartes avec une empreinte de patte dessinée sur le dos de chacune.

Comment jouer : étaler toutes les cartes côté empreinte. Chacun son tour, un joueur tire une carte et la retourne pour découvrir le mot qui y est inscrit. Le ou les joueur(s) explique(nt) ce que ce terme signifie pour eux. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse.

Règles : pas vraiment. Le jeu se termine quand 10 des 20 cartes ont été piochées.


Kev : Si je comprends bien, on discute à propos de chacun des mots qu’on tire ? C’est amusant !

Davie : C’est génial !

I – POMPEII

Davie : Le mot est Pompeii. Donc, on en parle ensemble, ou tu nous poses des questions?

Julie: Ce qui vous vient à l’esprit.

Davie : Qu’est-ce qui nous vient à l’esprit quand on pense à Pompeii, les gars ?

Joey : Bastille.

Davie : (rires) Excellent ! C’est une magnifique chanson …

Kev nous décrit un documentaire qu’il a vu sur Pompéi et l’explication scientifique qui était donnée, selon laquelle certains corps étaient si bien conservés au lieu d’être réduits en cendres.

Davie : C’est vraiment intéressant.

Julie : Soit. Parlons de votre chanson.

Davie : (rires) Eh bien, je l’ai écrite lorsque nous faisions nos premiers pas en tant que groupe, et elle parle d’un séjour que j’ai fait à Pompéi avec mon père. Il est professeur de Lettres Classiques et tout ça l’obsède. Si tu vas avec lui à Pompéi, autant dire que tu n’auras pas besoin d’ouvrir la bouche… Il va raconter tout ce qui s’y est passé. C’était juste un voyage avec lui et c’était vraiment intéressant, pour de nombreuses raisons. Mais je ne veux pas influencer l’interprétation que chacun peut avoir concernant le sujet ou non de cette chanson. Je me souviens m’être vraiment senti… je ne trouve pas le mot. C’est réellement incroyable de visiter Pompéi ou Herculanum. Vous y êtes déjà allés, les gars ?

Kev : Je serais ravi d’y aller. Oui, j’adorerais, absolument.

Davie : C’est carrément impressionnant de voir ces villes qui étaient ensevelies et ont été exhumées. Les corps momifiés, ce genre de choses, c’est insensé et, vraiment intéressant. Lorsque vous faites des trucs comme ça – je me souviens avoir été à Berlin et visité le Mémorial du mur de Berlin – tout d’un coup, je ne sais pas (il claque des doigts)… Le poids de la vie vous frappe quand vous vous trouvez dans des endroits comme ceux-là, d’une manière assez étrange. C’est une chanson que nous jouons depuis très longtemps.

Julie : Elle est très saisissante et viscérale. Est-ce qu’en la jouant, vous saviez qu’elle aurait cet effet-là ?

Davie : Par chance, on était en tournée à l’arrière d’un bus et Marcus Haney réalisait un documentaire qui s’appelait « D’Austin à Boston ». Il dormait dans un lit superposé au-dessus de Joey et moi. On a commencé à jouer pendant environ une minute, sans but précis. Je n’avais pas de paroles, juste une idée. Dès qu’il a réalisé ce qui se passait, il a pris sa caméra et a commencé à nous filmer dans le bus, puis il a dit, « Mec ! Bon sang, c’est quoi, cette chanson ? C’est la plus cool de la tournée. Qu’est-ce que vous foutez ? Vous devez la jouer en concert ! » Il nous a donné la confiance nécessaire pour ensuite aller la jouer à Kev, et Kev a fait « Oui, c’est une bonne chanson. » La première fois que nous l’avons jouée, c’était au Mercury Lounge à New York. Nous l’avons interprétée et je pense que la réaction du public à ce moment-là était environ dix fois meilleure que lors de tous nos précédents shows. Et nous savions qu’il y avait quelque chose avec ce titre… Je pense que c’est probablement l’une de ces chansons dans lesquelles la musique et les paroles fonctionnent bien ensemble. Je suppose que c’est ce que nous nous efforçons toujours d’accomplir : faire en sorte que tout se complète. Je crois que c’est effectivement un morceau où nous faisons cela de manière plutôt efficace, peut-être. Je ne sais pas. Il est difficile de comprendre pourquoi certaines choses ont un tel effet.

Julie : Carte suivante…


II – LOSS (la perte)

Joey : Eh bien, Liverpool a perdu contre Chelsea aujourd’hui (rires). C’était un peu traumatisant pour moi, personnellement, pas pour tout le groupe.

Davie : C’est un grand supporter de Liverpool.

Joey : Désolé, c’était assez impertinent comme réponse.

Davie : Il n’y a pas très longtemps, on a fait une interview, ou plutôt un chat radio, et Steve Lamacq (BBC6) a dit que, quand on écoute l’album (Islands), ça parle de gens qui sont sur le point de tout perdre ou au contraire de tout regagner, quelque chose comme ça. Je pense que, depuis toujours, les histoires que l’on entend deviennent pour nous une inspiration. Ce qui est génial quand on écrit des chansons et que l’on compose la musique, c’est d’apprendre que le fait de poser une idée sur le papier, ou que trois types s’asseyent dans un studio, réfléchissent à la musique et à la manière dont ils veulent l’exprimer au public, c’est vraiment un signe d’espoir et c’est assez étonnant. C’est tellement cool qu’il y ait des groupes et des écrivains qui fassent ça, même les écrivains les plus opprimés ; le fait qu’ils écrivent quoi que ce soit est fantastique et témoigne de l’espoir que quelqu’un va lire le résultat et s’y identifier. Je pense donc que la perte est omniprésente tout au long de l’album et de nos EPs, mais je crois que cela vient d’un lieu d’espoir dans lequel tout ce que l’on perd ne nous dépasse pas. Même si la vie est difficile, ce genre de choses…

Kev : Mais aussi, pour perdre quelque chose dans le vrai sens du terme, il faut l’avoir aimé. Ainsi, même si l’idée de la perte est évidemment très triste, on sait qu’il demeure quand même un élément de douceur. Vous devez avoir vraiment aimé quelque chose pour en subir la perte, afin de regarder tout ça d’une manière différente.

Des fans écoutent attentivement le concert de Bear’s Den
Des fans écoutent attentivement le concert de Bear’s Den

III- FOLK

Joey : « Different strokes for different folks » ? (Dicton anglais signifiant à peu près « Il faut de tout pour faire un monde. »)

Julie : Plutôt en tant qu’étiquette musicale ? Précise ? Ennuyeuse ?

Davie : Les deux ! (rires)

Joey : Précisément ennuyeuse.

Kev : Il faudrait définir le terme.

Julie : Quelle définition du mot « folk » vous convient le mieux ?

Davie : La musique folk, je suppose, à un niveau basique, c’est-à-dire essentiellement écrire des histoires sur les gens et les chanter. On suppose que ce qu’on appelle les « instruments folk », ce sont des instruments acoustiques. Je ne trouve pas vraiment que chaque étiquette à laquelle nous avons été attachés nous dérange, pas du tout même. Par contre, ce que je n’apprécie pas, c’est quand les gens disent des choses comme : « Je n’aime pas la musique country. Je n’aime pas le hip-hop. Je n’aime pas la techno. Je n’aime pas le folk. » Parce que ça démontre une certaine ignorance et je ne pense pas que ce soit sain en termes de goûts musicaux, que quelqu’un puisse affirmer ça. Je ne passe pas tout mon temps à écouter seulement du folk ou du hip-hop. Et cela permet d’avoir une expérience musicale plus riche ; ça vaut pour tout le monde, non ? Prenons Joey, par exemple : c’est difficile de trouver un moment où Joey n’écoute pas R. Kelly, mais c’est son choix, tu vois, et nous l’aimons malgré ça.

Joey : C’est là que je vais chercher mon inspiration (rires).

Davie : Donc, en termes d’étiquette, je ne crois pas que ce soit un problème et de nombreux groupes labellisés « folk » ont eu une grande influence pour nous.

Julie : Très bien. Carte suivante.

Davie : Je sens que je parle trop.

Kev : Ce que tu dis est intéressant, Davie.

Joey : C’est du Davie tout craché.

Joey Haynes - banjo par Katie M Simmons


IV – ?

Davie : Ah ah ! La carte mystère !

Julie : Vous pouvez parler de ce que vous voulez.

Davie : N’importe quel mot alors. On peut parler de ping-pong et du fait que l’on devrait y jouer ?

Kev : Plus souvent.

Julie : Il y a quelque chose que je veux vous demander. Vous avez récemment joué à Seattle et vous avez dit plus tôt, avant l’interview, que les étudiants qui apparaissent dans la vidéo du titre « Elysium » sont venus à votre concert là-bas. Comment était-ce de jouer pour eux ?

[Note au lecteur : la vidéo d’ « Elysium », réalisée par James Marcus Haney, montre le frère cadet du directeur et un groupe d’amis qui fréquentent l’Université Seattle Pacific. Le directeur a estimé que ce serait une excellente façon de représenter le passage à l’âge adulte, à travers ce titre. Le premier jour de tournage, une fusillade a eu lieu sur le campus, entraînant la mort d’un étudiant qui était aussi un ami du petit groupe mis en vedette dans la vidéo. Malgré ces circonstances tragiques, il a été décidé de terminer le clip en mémoire de Paul Lee, le jeune homme qui a été abattu. Un lien vers la vidéo se trouve ci-dessous.]

Davie : (il hésite) Pour ce qui est de jouer, la chanson a été beaucoup plus difficile à interpréter sur scène et nous avons soudainement pris conscience de sa place pendant le set… oui, beaucoup plus. Je pense que nous avons tous eu une histoire avec ce titre-là. Nous n’avons pas vécu ce que les gens qui sont dans la vidéo ont eux-mêmes traversé. Lorsque nous les avons rencontrés, nous avions l’impression de déjà tous les connaître, et c’était donc facile de discuter avec eux. Tu vois ce que je veux dire ? C’était comme si nous avions fait un bout de chemin ensemble. Il y avait une réelle proximité entre chacun de nous.

Kev : Ouais. C’était vraiment émouvant.

Davie : En fait, la jouer en connaissant la relation dramatique que ces personnes avaient avec cette chanson…

Joey : Qui ont vécu ce qu’on voit à l’écran, pas simplement regardé.

Davie : Oui, exactement, c’est très pertinent. C’était le plus dur, je crois que ça doit probablement être l’un des moments les plus émouvants que nous ayons vécus en tant que groupe, de jouer cette chanson. Elle avait déjà un sens pour nous avant tout ça. En ce qui me concerne, je l’avais écrite bien avant qu’elle soit enregistrée et choisie pour apparaître sur l’album, et elle ne m’ennuie pas ou ne me perturbe pas ; ceci dit, sur l’album, c’est l’un des morceaux qui me plaisait le moins. Sur un plan personnel, je ne ressentais pas ce besoin d’immédiateté avec elle, cette évidence. Tout ce qui est arrivé autour du clip l’a complètement remodelée et lui a donné une nouvelle raison d’être. Il ne s’agissait plus seulement de mettre une simple chanson sur le disque. C’était quelque chose de plus important. Il se passait quelque chose de plus intense. Ainsi, ça a vraiment été une expérience émouvante et assez incroyable.

Julie : Carte suivante…

Davie : Au fait, elle est vraiment géniale, ton idée.


V – ELYSIUM

Kev : Il faudrait peut-être que j’en tire une autre. C’est marqué « Elysium ».

Julie : Tu peux nous en dire un peu plus si tu veux. Peut-être sur la manière dont la vidéo a donné une existence propre à la chanson elle-même.

Davie : C’est une situation vraiment bizarre. Pour les paroles, elle se base un peu sur les conversations que j’avais avec mon beau-frère, sur le fait de grandir, et aussi sur celles que j’avais avec d’autres amis qui ont chacun des croyances différentes. Il y a une chanson de Bonnie Prince Billy intitulée « I See a Darkness » ; c’est un classique, un magnifique titre que Johnny Cash a d’ailleurs repris. Essentiellement, on croirait que ça parle d’un gars qui est dans un pub avec un de ses amis et qui parle de ce qu’il pense de la vie, c’est vraiment captivant. Elle dure à peu près quatre minutes trente et on est juste totalement absorbé par l’histoire. Quand je l’écrivais (Elysium), je voulais une chanson qui soit un peu comme celle-là. A propos de deux types qui discutent en toute honnêteté de leurs conceptions respectives de l’existence. Lorsque Marcus Haney nous a envoyé son idée de scénario : Je veux vraiment filmer mon jeune frère à l’université de la même manière, d’une façon aussi pure, et comme nous connaissions Marcus, nous avons tous immédiatement adhéré à son idée, non seulement parce que nous savons qu’il est très talentueux, mais aussi parce qu’il partait d’un angle vraiment poétique afin de saisir le passage de l’innocence de l’enfance à l’âge adulte.

Joey : La perte de l’innocence.

Davie : Il est aussi doué que capable. Je ne pense pas qu’aucun de nous ait jamais rencontré quelqu’un d’aussi talentueux que Marcus Haney dans son domaine.

Julie : C’est un incroyable moment filmique. C’est comme résumer le film « Boyhood » (de Richard Linklater) en quatre minutes.

Davie : Oui, exactement. Il est réellement doué, mais la connexion, le niveau d’exigence qu’il a apporté, dès que c’est apparu… Je pense que c’est le rêve de tout groupe, que quelqu’un devine non seulement le potentiel d’une vidéo grâce à votre propre chanson, mais également cette capacité à refléter, au fur et à mesure du film, l’image de son propre frère ; ça signifiait beaucoup, en fait.

Joey : Tout à fait. Alors évidemment, le résultat final était assez différent de ce que Marcus et nous-mêmes avions imaginé, parce que nous ne savions pas tout ce qui se passerait par la suite.

Julie : Suivante…

Davie : C’est vraiment un jeu de cartes très intense.


VI – EROS

Davie : Eros. Ouah ! Oh mon Dieu, Joey. Eros.

Joey : Eros – le dieu de l’amour sexuel.

Davie : La convoitise.

Joey : Ouuuuuuh! (il grogne)

Davie : (rires) Je ne sais pas comment cela va pouvoir être retranscrit dans une interview écrite.

Joey : Ouuuuuh!

Julie : Il n’y en a pas beaucoup sur l’album.

Davie : Dans certaines des chansons. « When You Break ».

Joey : Oui, dans « When You Break ». Il y en a un peu.

Kev : Ouais.

Julie : Quand il y en a, c’est…

Davie : …c’est déjà beaucoup trop. (rires) C’est ce que toutes les femmes me disent. (rires) Je suis perpétuellement coincé. Nous avons récemment joué une reprise d’un titre de Bruce Springsteen pendant l’un de nos concerts, « Dancing in the Dark », et je pense que cette chanson capte de manière vraiment magnifique et très poétique la relation de chacun de nous avec ce genre de choses ; pas littéralement Eros, mais la convoitise, tu vois, comme être dans un bar et vouloir qu’il se passe quelque chose. Et en toute honnêteté, je crois que je sais juste qu’il y a des choses que je peux faire et d’autres que je ne peux pas faire quand je compose. Musicalement, pour moi, c’est juste un voyage que nous faisons tous ensemble et que j’essaie de comprendre, mais à travers des paroles. C’est assez difficile d’en parler. En réalité, plus dans les nouvelles chansons que j’écris en ce moment, je suis en train, en m’inspirant de la manière dont Bruce Springsteen s’y prend, de mieux faire ça. Parce que je pense qu’une grande partie de la vie est difficile à expliquer, non ?

Kev : « I’m on Fire » en est un autre exemple…

Joey : (l’interrompant) C’est exactement ce que j’allais dire…

Davie : (l’interrompant): « I’m on Fire », je crois que c’est…

Kev : Comment tu fais pour écrire des choses comme ça ?

Davie : Je veux dire, comment tu fais pour écrire une telle chanson ?

Joey : Et aussi, R. Kelly, « Bump N’ Grind » !

(Deux personnes entrent en coulisses)

Un fan masculin non-identifié : Désolé de vous déranger, les gars, mais euh, vous êtes Bear’s Den ! Ouah ! On est des grands fans ! On était assis juste là-bas et on se disait “Oh merde ! C’est eux, juste là.” On voulait simplement se présenter.

Davie, Kev & Joey les saluent, se présentent et serrent la main du fan et de sa petite amie.

Davie : Merci beaucoup d’être venus nous dire bonjour, les gars.

Le fan : Nous sommes impatients de vous voir sur scène.

Davie : Eh bien, on est aussi impatients de jouer, mon pote.

Le fan : J’adore votre musique. Le banjo, surtout. Je trouve que ça rend votre son unique.

Joey : C’est exactement ce que je me tue à leur dire…

Davie & Kev : (l’interrompant) Ne lui dites pas ce genre de choses ! Ne lui dites pas ce genre de choses ! On ne pourra plus le faire taire après !

Joey : C’est ce que je passe mon temps à leur répéter. « Écoutez mon banjo ! » Et tout ce qu’ils trouvent à dire, c’est « Ouais ouais… ».

Davie : Banjo schmanjo ! Merci beaucoup, les gars.

Le fan : Ce serait trop vous demander de faire une photo avec vous les gars ?

Davie : Non, je suis certain que ça doit pouvoir se faire.

(Une conversation s’ensuit à propos du nouvel album, tandis que le manager du groupe prend des photos…)

Davie : Merci beaucoup d’être venus.

Le fan : De rien, mec. C’est tellement bon que vous soyez ici, aux États-Unis. Hé, les gars, vous êtes plus grands que vous en avez l’air sur YouTube ! Merci ! Je me réjouis déjà du concert. À plus tard…

Tous : Désolé pour ça…

Julie : (rires) Pas de problème ! J’aime bien le lien que vous entretenez avec vos fans. Ne changez rien. Prochaine carte !

Davie (à Joey) : Tu veux tirer la suivante ?

Joey : Je viens juste de prendre Eros !

Davie : D’accord. Catharsis.

Bears Den banjo par Katie M Simmons


VII – CATHARSIS

Davie : Intéressant. (il marque une pause) En ce qui concerne notre album, je pense que c’est un processus totalement cathartique de pouvoir enfin le jouer en public ; je veux dire, tout le disque, tu vois ? « Magdalene », et toutes ces idées. Deux-trois mois après l’avoir terminé, nous ne pouvions pas laisser quiconque l’écouter ; bon, nos amis et la famille avaient le droit bien sûr, mais il n’était pas encore sorti. Nous avions fini l’enregistrement et il fallait encore patienter deux mois. Ça a été une période assez difficile je trouve parce qu’on était, genre, assis là à attendre quelque chose d’un truc dont on avait été esclaves pendant une très longue période. Je pense que notre musique prend vie sur scène et devient alors cathartique, parce que, dans un sens, elle est très triste, très dure ; mais la composer, l’enregistrer et la partager avec le public qu’on voit ensuite réagir, ça modifie beaucoup ce qu’elle est, non ?

Kev : Absolument.

Davie : Alors peut-être qu’il y a un phénomène de catharsis là-dedans.

Julie : Plus spécifiquement, la chanson « Bad Blood » vient immédiatement à l’esprit.

Davie : Ouais. C’est sans doute la plus cathartique, littéralement parlant, à mon avis. Être en mesure de l’interpréter au milieu de la foule, aller vers le public, se tenir là et la chanter… C’est une autre des premières chansons auxquelles on s’est vraiment sentis connectés, non ?

Joey & Kev : Ouais.

Davie : Je pense que ma partie préférée de banjo sur tout l’album figure dans cette chanson. Entre la guitare acoustique de Kev, les mouvements de batterie ; même quand nous l’avons enregistrée de notre côté, il nous a fallu environ six heures pour obtenir un son aussi bon qu’une autre pour laquelle, par contre, il nous fallait beaucoup plus de temps. Parfois, quand une chanson est immédiate comme celle-ci, même quand vous l’enregistrez, c’est peut-être le signe qu’elle est vraiment bonne. Je dirais que ça, c’est très cathartique.

Bear's Den joue dans la foule © Katie M. Simmons


VIII – AGAPE

Kev : Agape.

Davie : Nous l’avons appelé Agape parce que c’était un moyen de ne pas utiliser son titre original, qui était “I Got Paid” (Je suis payé ; jeu de mots difficile à traduire en français) (rires). Nous avons estimé que cela aurait une résonance moins émotionnelle avec les gens. Agape est une autre de nos premières chansons, une de celles qu’on voulait aussi réenregistrer. A l’origine, on entendait Joey chanter dans un banjo, et c’est également ce qui figure sur l’album. Joey chante dans un banjo en passant par un effet de reverb, une delay RFX, et ça sonne vraiment bizarre.

Joey : La magie du studio !

Davie : Ça ressemble à une baleine…

Joey : C’était fait pour…

Davie : …qui chante tout au long du morceau. Nous l’avons d’abord enregistrée avec ce producteur étonnant, Christopher Harris, qui est super talentueux et joue dans un groupe appelé Story Books, qui est impressionnant. On l’a rencontré et on avait l’impression que c’était la première fois que nous faisions connaissance avec un gars de notre âge grâce à la musique, quelqu’un qui écoutait les mêmes choses que nous et avait beaucoup de points communs avec nous. Nous avons fait sa connaissance grâce à The Smoke Fairies. On venait de faire un EP et on voulait monter d’un cran pour le prochain, et il était vraiment enthousiaste et encourageant. Il nous a présenté des gens comme Kurt Vile, des personnes qui nous ont amenés à écouter The War on Drugs, des groupes de ce genre. Je pense qu’il a été l’une des pièces maîtresses du puzzle qu’est notre carrière. Il est arrivé à un moment très intéressant et nous a vraiment aidés à tirer le meilleur de tout ça. Alors cet EP, « Agape », c’est tout-à-fait lui. On reçoit beaucoup de commentaires sur la façon dont il a été enregistré et comment il sonne. Même lorsqu’on a sorti l’album, les gens en étaient toujours amoureux. Tout ça, c’est grâce à lui.

Julie : J’ai lu beaucoup de commentaires sur la façon dont certains titres ont changé et évolué, ce qui n’a pas plu à tout le monde.

Davie : Ouais. Et ils te le diront ! (rires) Ils te diront toujours quand ça ne leur plaît pas.

Julie : Très bien. Carte suivante.

Davie : Joey ! Joey ! Joey !

Joey : Encore moi ? Forgiveness.

Kev © Katie M. Simmons


IX – FORGIVENESS (le pardon)

Davie : Je pardonne Liverpool d’avoir battu QPR ; quoique…

Joey : Je pense que vous devriez vous pardonner vous-mêmes parce que vous avez marqué beaucoup plus de buts…

Davie : Et on a aussi marqué deux des vôtres ! (rires)

Joey : On en a marqué un. C’était quoi le score final, 3-2 ?

Davie : Quoi qu’il en soit…

Julie : Il y a quelques références au pardon.

Davie : Oui. Alors, dans quelle chanson ? « Bad Blood »…

Joey : Pardonne-moi de ne pas être moi-même.

Davie : Dans « When You Break »…

Joey : Tu n’arrêtes pas de demander pardon.

Kev : Ces paroles de « When You Break » résonnent énormément en moi.

Davie : Demander pardon…

Kev : …tout en ne sachant pas pourquoi. Je me suis souvent retrouvé dans ce genre de situation où quelqu’un se comporte comme ça, avec tout ce que ça implique : le manque de reconnaissance, de compréhension, de conscience de soi.

Julie : C’est un « Je suis désolé », mais pas comme si on demandait pardon.

Kev : Tout à fait, mais sans savoir pourquoi ou ce que vous avez fait. C’est assez étonnant.

Davie : C’est exactement comme toutes ces conversations que tu as quand tu es dans une relation avec les gens et que chacun dit un truc du genre, « Tu sais pourquoi je suis en colère contre toi ? », et que tu réponds, « Parce que j’ai fait ceci ou cela. » Et ça n’a en fait rien à voir avec ceci ou cela, mais c’est à cause de tout cet océan de choses que tu ne peux même pas voir. Il y a une compréhension de ce phénomène seulement quand on se retrouve du côté des perdants, quand on est à bout et que n’importe quelle conversation nous énerve. On a alors une vision d’ensemble de ce que la personne a fait alors que lui/elle ne voit que ce qui est juste devant son nez. Mais quand on est dans cette position, on voit la gamme complète. Je pense que cette chanson, comme de nombreux titres de l’album, sont dirigés vers les autres, mais reflètent plus souvent la manière dont je me sens, l’impression que j’ai de qui je suis. Une grande partie du temps, je dis, « Je suis désolé. Oh, je suis désolé. » Je m’excuse toujours pour tout ce que je fais. Mais je pense qu’être juste désolé pour quelque chose ne suffit pas. Tu dois comprendre pourquoi afin d’en endosser la responsabilité, je crois.

Julie : Dernière carte. Ça fait dix.

Davie: Encore à mon tour ? Celle-là est cachée sous les autres. Hope.

crédit : Jessica Westbrook
© Jessica Westbrook

X – HOPE (l’espoir)

Joey : Ça, tu n’en veux pas !

Davie : Non, ça ne m’intéresse pas ! (rires) Tu sais, Steve Lamacq (BBC6) – quelle légende, ce mec – ce qu’il a dit dans l’interview qu’on vient de faire avec lui, c’est que l’album, bien que difficile à aborder, fait qu’au final tu ne peux pas te sentir autrement que réellement vivant. On a tous été stupéfaits, ça nous a laissés bouche bée, d’entendre cette légende de la radio dire quelque chose comme ça sur notre musique ; j’espère qu’il n’a pas interprété notre silence comme un manque de politesse. Mais je pense que c’est à peu près notre seul but avec cet album : faire quelque chose qui était vraiment honnête et ne pas nous soustraire à des sujets difficiles. Avoir foi en nos chansons. Nous assurer que tout est vrai, que c’est à peu près à ce que nous étions capables de faire ou de ce à quoi nous voulions tendre pour nous en sentir encore plus capables. Et en même temps, en essayant de ne pas rendre l’ensemble trop lourd, trop dur à digérer. Alors, venant de lui (Lamacq), se retourner et dire qu’il estimait qu’il y avait de l’espoir dans tout ça est un témoignage fort, non seulement pour nous mais aussi pour Ian Grimble, qui a travaillé si dur sur la production du disque, sur ce qu’il est au final… Il y a de l’espoir dans toutes les chansons. Même les plus tristes portent plus d’espoir en elles.

Julie : Celle qui se démarque vraiment est Elysium. « Protégez votre espoir jusqu’à la mort. » Voilà une déclaration militante pour l’espoir.

Davie : Totalement. Ouais. C’est important. C’est difficile. Tout est vraiment difficile. Chacun reste concentré sur sa propre odyssée dans la vie. Tout le monde rencontre des obstacles massifs et des choses pénibles à traverser, et on ne peut savoir ce par quoi les gens passent ; la seule chose qu’il reste à faire, c’est aider les uns et les autres à le connaître (l’espoir) parce que quand on le perd, c’est vraiment dur. Tu vois, je pense qu’il est très important que cet album ne transmette pas des choses du genre : « La vie est terrible ! Tout est vraiment triste. Vous allez réellement en baver. » Il faut garder espoir, car c’est vraiment important.

Julie : Qu’espérez-vous que les auditeurs y trouvent et en gardent ?

Kev : Certainement tout ce qui peut les satisfaire.

Davie : Oui, exactement. Espérons qu’ils le puissent… Je ne sais pas. C’est une question très difficile, en fait. De s’y raccrocher. Sur un plan très égoïste, il suffit de penser que c’est un bon album et ne pas le détester. (rires). Je crois que c’est le plus important pour exprimer ce que les auditeurs y trouvent …

Joey : Qu’il les aide en quelque sorte à éprouver des émotions, à vivre des expériences ou qu’il ait une sorte d’effet sur eux qui aille au-delà du fait d’entendre tout plein de belles chansons, peut-être ; bien que ce soit assez cool, aussi.

Davie : C’est génial, en effet. Je trouve que c’est très bien dit.

Kev : Il y a un conte de fées écrit par Terry Jones, des Monty Pythons, qui s’appelle « Le placard de verre ». Il n’y a rien dedans, mais tu peux y prendre tout ce que tu désires. Certaines personnes prennent des choses qui les aident.

Davie : C’est une métaphore incroyable.

Julie : Il y a autre chose, à propos des paroles. A la surface, les chansons apparaissent comme un récit très précis, mais quand on les écoute et ré-écoute, on peut y découvrir tout ce que l’on veut en elles. C’est très ouvert. Il y a beaucoup de place pour l’interprétation.

Davie : Ouais. Je pense que c’est un mélange de tout ça. Il faut que ce soit quelque chose qui est compréhensible, donc assez spécifique, mais pas au point de te priver d’une interprétation. « Famous Blue Raincoat » de Leonard Cohen est une de mes chansons préférées de tous les temps. Tout le monde n’a pas un ami ou une petite amie avec un célèbre imperméable bleu. Le fait qu’il puisse inclure cette information est très important ; c’est trivial, mais ça rend le personnage plus réel.

Le manager du groupe : Désolé de vous interrompre, si vous pouviez conclure…

Julie : Oui, bien sûr. (Tout le monde se remercie).

Et ainsi se termine le « jeu » avec les membres de Bear’s Den, exprimant leur désir d’être de vrais conteurs, réels, pertinents, et pleins d’espoir. Il ne pouvait pas y avoir de conclusion plus appropriée car c’est précisément ce à quoi ils sont parvenus grâce à leur premier album, « Islands ».

Bear's Den © Katie M. Simmons

« Islands » de Bear’s Den est disponible depuis le 20 octobre 2014 chez Caroline / Universal Records.

Bear’s Den est en concert à Paris le 20 février 2015 au Point Éphémère.

Retrouvez Bear’s Den sur :
Site officielFacebookTwitterSoundcloud


ENGLISH – 10 for Bear’s Den – A Playful Interview

Interview by Julie Blore-Bizot
French adaptation by Raphaël Duprez
Photos by Katie M. Simmons and Jessica Westbrook


“…and he sailed off through night and day
and in and out of weeks
and almost over a year
to where the wild things are.”

Max et les Maximonstres par Maurice Sendak

Where the Wild Things Are, Maurice Sendak


The English trio Bear’s Den derives its moniker from a place that might exist on the island destination in Maurice Sendak’s timeless tale Where the Wild Things Are. It therefore seemed fitting to set sail on an unchartered course with an imaginative and playful approach to interviewing Andrew “Davie” Davie (lead vocals, guitar), Kevin “Kev” Jones (vocals, drums, bass), and Joey Haynes (vocals, banjo, guitar). On November 8, 2014 at The Bootleg in Los Angeles, the gentlemen of Bear’s Den agreed to sit down with Indiemusic.fr and play a friendly little game of cards themed to their recent LP release Islands. The name of the game? 10 for Bear’s Den.

The encounter began with the unveiling of a box of cards. These were adorned with a paw print made using a stamp carved from a raw potato in homage to the band’s homemade CD sleeves bearing a potato paw print design.

“Oh, wow!” exclaimed Joey.

“I am impressed.” nodded Kev.

“We are overwhelmed!” affirmed Davie.

And we all knew then and there that this was going to be fun, even though we had no idea what was going to happen next.

Davie began by reading the rules aloud as shown below:


10 for Bear’s Den

For 3 players: Davie, Kev & Joey

You will need: 20 cards with potato print bear paws

How to play: Arrange cards with bear paw facing up. Taking turns, each player chooses a card and turns it over to discover the word on the card. Player or players talk about the word. There are no right or wrong answers.

Rules: Not really. The game is finished when 10 of the 20 cards have been picked.


Kev: So we talk about each word that we turn up? That’s fun!

Davie: That’s awesome!

I – POMPEII

Davie: The word is Pompeii. So we just talk about the word amongst ourselves or do you ask questions?

Julie: Whatever comes to mind.

Davie: What comes to mind when we think of Pompeii, guys?

Joey: Bastille

Davie: (laughs) That’s brilliant! Wonderful song…

Kev: (Describes a documentary about Pompeii and the scientific explanation behind why bodies were so well preserved instead of being burnt to a heap of ashes).

Davie: That’s really interesting.

Julie: Bringing it closer to home – let’s talk about your song.

Davie: (laughs) Well the song is a song that I wrote at the very early stages of us being a band and kind of talks about a time I went to Pompeii with my dad. My dad’s a classics teacher so he’s obsessed. Going to Pompeii with my dad, you’re not going to get to talk much. He’s going to talk about whatever is going on. It was just a trip with him, really interesting in a lot of ways. But I don’t want to mess with anyone’s interpretation of what the song’s about or anything. I just remember being really… I don’t know what the word is. It is really incredible if you ever go to Pompeii or Herculaneum. Have you guys ever gone there?

Kev: I’d love to go. I would absolutely love to go.

Davie: It is really interesting just seeing these towns that are totally underground that have been resurrected. The mummified bodies and things like that, they’re insane and are really, really interesting. When you do those things–like I remember being in Berlin and going to a Berlin wall memorial museum–just suddenly, I don’t know (snaps fingers) the weight of life just hits you really hard when you’re in those places, in a weird way. It’s just a song we’ve been playing for a really long time.

Julie: It’s very clutching and visceral. Did you have to perform it to figure out it was going to have that effect?

Davie: Luckily we were on a tour in the back of a bus and Marcus Haney was filming the tour we were on for a documentary called Austin to Boston. He was asleep in his bunk bed above me and Joey. We started playing it for about a minute, like figuring it out. I didn’t have all the words, just an idea. Then as soon as he sort of realized what was happening, he got his camera out and started filming us in the bus doing it and went, “Dude! What that hell is that song? That’s the coolest song on the tour. What’s going on? You need to play that live!” He gave us the confidence to then go play it to Kev, and Kev’s like, “That’s a good song.” The first time we played it was at the Mercury Lounge in New York. We played it and I think the audience reaction at the show was about ten times better than the audience reaction had been for every show before. And we kind of knew that something in that song… I think it’s probably one of the songs where the music and the lyrics just match up really well. I guess that’s just what we always strive to do: make sure that everything is complementing everything else. I think that’s a song where we do that effectively, maybe? I don’t know. It’s hard to know why stuff has that effect.

Julie: Next card…


II – LOSS

Joey: Well, Liverpool lost to Chelsea today. (laughs) That was kind of traumatic, for me personally, not the band as a whole.

Davie: He’s a massive Liverpool fan.

Joey: Sorry, that was a bit flippant.

Davie: We did an interview, actually a radio chat, not too long ago and Steve Lamacq (BBC6) said that in the album (Islands) it feels like people are on the cusp of losing everything or on the cusp of getting it all back, or something like that. I think coming of age storytelling really appeals to us as an idea. I think what’s great about writing songs and writing music together is that you learn that just the very act of writing an idea down, just the very act that three guys sit in a studio and think about music and think about doing something that they want to perform to people is a really hopeful kind of amazing thing. And it’s so cool that bands exist and so cool that writers exist and do that, even the most oppressed writers, the fact that they write anything down is fantastic and shows hope that someone will read it and connect with it. So I think loss is littered throughout the album and throughout the EPs as well, but I think it always comes from a place of hoping that your losses don’t overcome you. Life’s tricky and all that.

Kev: But also to lose something in the sense of the word loss, you have to have loved it. So whilst the idea of loss is obviously very sad, you know there’s a sweet element too. You have to have really loved something to experience loss so you can look at it a different way.


III – FOLK

Joey: Different strokes for different folks?

Julie: As a label? Accurate? Annoying?

Davie: Both! (laughter)

Joey: Accurately annoying.

Kev: Well, you have to define it.

Julie: What definition of folk are you comfortable embracing?

Davie: Folk music, I suppose, on a fundamental level is essentially just writing stories about people and singing them. We assume that that’s with folk instruments, what we call “folk instruments” because they’re just actually acoustic instruments. I don’t really find that any of the labels we’ve ever had attached to us annoy me, actually at all. What I don’t like is when people say things like, “I don’t like country music. I don’t like hip-hop. I don’t like techno. I don’t like folk.” because that’s just coming at life from such a place of ignorance and I just don’t think it’s healthy for your music taste if you’re like that. I don’t just sit around listening to folk music all the time. And I don’t just sit around listening to hip-hop all the time. It leads to a more enriched musical experience; I mean that goes for all of us, doesn’t it? I mean Joey, it’s hard to find a time when Joey’s not listening to R. Kelly and that’s his decision, you know, and we love him.

Joey: That’s where I draw most of my inspiration from. (laughs)

Davie: So in terms of a label I don’t think it’s that annoying and a lot of bands described as folk have been inspiring to us as well.

Julie: Great. Next.

Davie: I feel like I’m doing too much talking.

Kev: You’re just saying good things, Davie.

Joey: Classic Davie.


IV – ?

Davie: Uh-oh! Mystery card!

Julie: You get to talk about whatever you want.

Davie: Any word. Can we talk about table tennis and how we should play table tennis?

Kev: More often.

Julie: I have something I want to ask. You recently played in Seattle and you were mentioning earlier, before the interview, that the university students who are in the Elysium video came to your Seattle show. What was it like playing for them?

[Note to the reader: the Elysium video directed by James Marcus Haney features the director’s younger brother and a group of friends attending Seattle Pacific University. The director felt this setting would be a good portrayal of the coming of age theme in this track. On the first day of camera work, a campus shooting occurred resulting in the death of a student who was also a friend of the group featured in the video. Despite these tragic circumstances, it was decided to finish the music video in memoriam of Paul Lee, the young man who was shot and killed. A link to the video can be found below.]

Davie: (hesitates) In terms of just playing, the song was a lot harder to play live and we suddenly became really aware of it as a song in the set… a lot more. I think we’ve all been on a bit of a journey with it. We haven’t been through anything like what anyone in the video went through. When we met everyone we felt like we’d known them and the conversation was so easy. You know what I mean? It felt like we’d all been on this little journey together. There was a real closeness to everything.

Kev: Yeah. It was really moving.

Davie: Then performing knowing that those people who had a dramatic relationship with that song…

Joey: That lived the video, not just watched it.

Davie: Yeah, exactly, that’s totally accurate. It was definitely the heaviest, I think probably one of the most moving moments for us as a band yet just to have to perform that song. It had a meaning already for us before all that. In my eyes I had written that song personally quite a long time before we had recorded it for the album, and I wasn’t bored of it or annoyed by it, but on the album it was one of the songs I was the least excited about. On a personal level I just didn’t feel that immediacy to it. Everything that happened with that music video totally reshaped that and it had this new purpose. It wasn’t just for us to put a song on an album. It was a bigger story. It was a bigger journey going on there. So it was really a moving and pretty incredible experience.

Julie: Next…

Davie: This is awesome, by the way.


V – ELYSIUM

Kev: I might need to pick another card. It says “Elysium.”

Julie: We can talk a bit more about that. Maybe how the video made that song take on a life of its own.

Davie: It’s a really funny situation to be in. On a lyrical level, it was based a little bit on conversations I had with my stepbrother growing up and a little bit on conversations I’d had with other friends who just had different beliefs. There’s a song called “I See a Darkness” by Bonnie Prince Billy which is like this classic, great song that Johnny Cash covered. Essentially it’s just a guy and it sounds like he’s just in a pub with a mate talking to him about what he thinks life is and it’s really captivating. It’s like four and a half minutes long and you’re just totally engrossed by the story. When I was writing it (Elysium), I wanted the song to feel a bit like that. That it was two guys just being honest with each other about what they thought of life. When Marcus Haney sent through his treatment: I really want to film my younger brother at university in such a sort of pure way, knowing Marcus, we all immediately connected with the idea because not only did we know how talented he is, but he came at it from a really poetic angle of wanting to capture the transition of the innocence of being a kid to being an adult.

Joey: The loss of innocence.

Davie: He’s so gifted that he’s able. I don’t think any of us have ever met anyone who’s gifted in that sort of way that Marcus Haney is.

Julie: It’s an extraordinary piece of filmmaking. It’s like Boyhood in four minutes.

Davie: Yeah, exactly. He is just incredibly gifted but his connection to it on that level for us, just as soon as it came through… I think it’s every band’s dream that someone not only sees potential in making a video for your song, but actually sees themselves to the extent of filming their own brother in a music video meant a lot, in a way.

Joey: Absolutely. Then obviously the end result was just so different from what both Marcus and we had imagined because we didn’t know all that would happen.

Julie: Next…

Davie: This is a very deep card game.


VI – EROS

Davie: Eros. Oh wow. Joey, oh gosh. Eros.

Joey: Eros: the god of sexual love.

Davie: Lust.

Joey: Huuuuh! (grunts)

Davie: (laughs) I don’t know how that comes across in a written interview.

Joey: Huuuuuh!

Julie: There’s not a lot of it on the album.

Davie: There’s some of it. When You Break.

Joey: When You Break. A little bit.

Kev: Yeah.

Julie: When there is it’s…

Davie:…it’s too much. (laughs) That’s what the ladies tell me. (laughs) I’m just perpetually stuck. We’ve been covering a Bruce Springsteen song recently during our set, Dancing in the Dark, and I think he captures really beautifully and in a really poetic way your relationship with that stuff, not literally eros, but the lust, you know, like being in a bar and wanting something to happen. And in all honesty, I think it’s just I know I find there are things I can do and I find there are things I can’t do when I’m writing music. Musically, I think that’s just a journey we all go on together and just try to figure out, but on a lyrical level, I find it quite hard to talk about that stuff. But actually, more in the newer songs I’m writing, I’m trying, inspired by the way Bruce Springsteen does it, I’m trying to be better at that stuff. Because I think there’s a huge part of life that’s difficult to talk about, isn’t it?

Kev: I’m on Fire is like another really…

Joey: (interrupting) I was just going to say…

Davie: (interrupting) I’m on Fire, I mean that is just like…

Kev: How do you write that shit?

Davie: I mean how do you write that song?

Joey: And also, R. Kelly, Bump N’ Grind!

(Two strangers enter backstage area)

Unidentified male fan: Sorry to bother you guys but, uh, Bear’s Den! Yeah! We’re both big fans of you guys! We were sitting back here and we’re like “Oh shit! They’re right there.” We just wanted to introduce ourselves.

Davie, Kev & Joey say hello, introduce themselves, and shake hands with the fan and his girlfriend.

Davie: Thanks so much for saying hi, guys.

Fan: We’re looking forward to the show.

Davie: Well we can’t wait to play, man.

Fan: Love the music. Love the banjo more than anything. I think that like pulls your guys’ whole sound together.

Joey: That’s what I’ve been trying to tell these guys…

Davie & Kev: (interrupting) Don’t tell him this stuff! Don’t tell him this stuff! He already won’t shut up!

Joey: That’s what I tell these guys. I say “Listen to my banjo!” and they’re like “Uh-huh.”

Davie: Banjo schmanjo! Thanks so much, guys.

Fan: Would it be too much to ask for a picture with you guys?

Davie: No we can do that, I’m sure.

(Additional conversation about new album, while pictures are taken by band manager…)

Davie: Thanks so much for coming out.

Fan: Yeah, man. So glad you guys are in the States. Hey, you guys are taller than you look on YouTube! Thank you! I look forward to the show. See you later…

All: Sorry about that.

Julie: (laughs) It’s OK! I like your connection with the fans. Go for it- next one!

Davie to Joey: Do you want to do the next one?

Joey: I just pulled out Eros!

Davie: All right. Catharsis.


VII – CATHARSIS

Davie: Interesting. (pause) With regards to our album, I think it’s quite a cathartic process for us to be able to perform it finally, like all of it, do you know what I mean? Magdalene and all these ideas. For two to three months after we finished it, we couldn’t let anyone hear it, well, our friends and family obviously could, but it wasn’t released yet. We finished recording it and there was like a two-month wait. It was quite a tricky time I think because we were all just sort of sitting there with this thing we had slaved over for a really long time. I think the performance of our music is where it comes alive and it becomes cathartic, because I think on its own it’s very sad, and quite tough; but performing it and sharing it with an audience and seeing them react to it changes its whole vibe quite a lot, doesn’t it?

Kev: Absolutely.

Davie: So maybe there’s catharsis there at play.

Julie: Specifically, the song “Bad Blood” comes to mind.

Davie: Yeah. That one is probably the most cathartic, literally, in its meaning. To be able to perform that in the crowd, to go out into audiences and stand there and sing that… It’s another one of the first songs that we really connected over, isn’t it?

Joey & Kev: Yeah.

Davie: I think my favorite banjo part on the entire album is on that song. Kev’s acoustic guitar playing, drum parts, even when we recorded that ourselves it took about six hours to get that to sound about as good as everything else that took a really long time to get to sound like that. Sometimes when a song’s just immediate like that, even when you’re tracking it, maybe that’s a sign that it’s an all right one. I’d say that’s very cathartic.


VIII – AGAPE

Kev: Agape.

Davie: We called it Agape as a way around it’s original title which was just “I Got Paid” (laughter). We felt that that would have less emotional resonance with people. Agape’s another early song for us, one that we wanted to re-record as well. It featured, originally, Joey singing into a banjo, and actually on the album as well. Joey sings into a banjo going through a reverb effect, delay RFX unit system thing going on, it sounds really mental.

Joey: Studio magic!

Davie: It sounds like a whale…

Joey: That’s what I go for…

Davie: …howling through the track. We recorded it first with this amazing producer called Christopher Harris who is super talented and is in a band called Story Books, who are awesome. We met him and it felt like it was the first time we’d met a guy our age through music who would listen to the same music as us and was so in the same place as we were. We met him through The Smoke Fairies. We had just done an EP ourselves and wanted to go up a notch to do the next one a bit better, and he was really keen and just really supportive. He introduced us to people like Kurt Vile which led to us listening to War on Drugs and bands like that. I think he’s been a really big piece of our jigsaw puzzle of our careers. He came at a really interesting time and just really helped us get the most out of this. So that Agape EP, it’s all him really. We get a lot of comments about the way that was recorded and how that sounded. Even when we put out with the album, people still fell in love with that. A lot of that’s down to him.

Julie: I’ve seen a lot of comments out there about how some tracks have changed and evolved, not pleasing everyone.

Davie: Yeah. And they’ll tell ya! (laughter) They will tell you about it when they’re not happy.

Julie: Great. Next one.

Davie: Joey! Joey! Joey!

Joey: Me again? Forgiveness.


IX – FORGIVENESS

Davie: I forgive Liverpool for beating QPR even though…

Joey: I think you should forgive yourself because you scored a lot more goals…

Davie: We scored both of your goals! (laughter)

Joey: We scored one. Was it 3-2?

Davie: Anyway…

Julie: There are a couple references to forgiveness

Davie: Yes. So where is that? Bad Blood….

Joey: Forgive me for I am not acting myself.

Davie: When You Break…

Joey: You keep begging for forgiveness.

Kev: That lyric in When You Break resonates massively with me.

Davie: Begging for forgiveness…

Kev: …but not knowing what for. I’ve been in a couple of notable situations where somebody’s been doing that, then the implication of lack of recognition, lack of understanding, lack of self-awareness.

Julie: It’s a sorry, not sorry kind of begging for forgiveness.

Kev: Exactly, but not knowing why or what you’ve done. It’s quite amazing.

Davie: It’s quite like this kind of conversation that you have a lot when you’re in a relationship with people and both sides going like, “Do you even know why I’m upset with you?” And you go, “Because I did this.” And it has nothing to do with the fact that you did that, but because of all of this ocean of stuff that you can’t even see. There’s a perspective to that which you only have when you’re on the losing end, when you’re on the end that’s pissed off in any kind of conversation. You have a perspective of the whole arc of what that person’s done and he just sees what’s right in front of him or she just sees what’s right in front of her. But when you’re in that position, you see the full spectrum. I think that song, like a lot of the songs on the album, they’re directed at you but often are more reflective more of how I feel that I am. A lot of the time I’m going, “I’m sorry. Oh I’m so sorry.” I’m always really apologetic about stuff whenever I do anything. But I feel that just being sorry about something isn’t enough. You kind of need to know why to take ownership of that, I suppose.

Julie: Last one. We’re at 10.

Davie: Is it me again? This one looks hidden. Hope.

crédit : Jessica Westbrook
© Jessica Westbrook

X – HOPE

Joey: You don’t want any of that!

Davie: Not interested! (laughs) Steve Lamacq (BBC6)—what a legend—you know, what he said in that interview we just did with him is that the album, despite being difficult, at the end of it you can’t help but feel that you’re really alive. We were all stunned into silence, hearing this radio legend say something like that about our music, and I hope we didn’t come across as rude, but I think that’s pretty much our sole aim with this album, to make something that was really honest and didn’t shirk away from difficult subject matters. Be true to the songs. Make sure they were true, roughly to what we were able to do or to what we could grow into being able to do. And then on the other level, trying not to be too heavy, too difficult to digest. Then for him (Lamacq) to turn around and say that he felt there was hope within it all is a testimony not just to us but to Ian Grimble who worked so hard producing it, and unlocking… there is hope in all the songs. Even the saddest songs have the most hope in them.

Julie: The one that really stands out is Elysium. “Guard your hope with your life.” That’s a militantly hopeful statement.

Davie: Totally. Yeah. It’s so important. It’s difficult. Everything’s really difficult. Everyone’s on their own odyssey through life. Everyone’s got these massive hurdles and difficult things they go through, and you can only know so much about someone else and what they’re going through, and all you’ve really got to know is to help each other have it (hope) because when you lose it, it’s really rough. See, I think it matters a lot that this album isn’t just like, “Life is terrible! Everything’s really sad. You’re going to have a really rough time.” There needed to be hope because it’s so important.

Julie: What do you hope listeners take away from it?

Kev: Surely it’s whatever they want to find in it.

Davie: Yeah, exactly. Hopefully they can… I dunno. It’s a really tough question, actually. Relate to it. On a very selfish level, just think it’s okay and not hate it. (laughs). I think the main thing in terms of what listeners take away…

Joey: That it helps them in some way to process emotions or experiences or it has some sort of effect on them beyond just lots of nice songs, maybe, although that’s pretty cool, too.

Davie: That’s pretty great, yeah. I thought that was bang on.

Kev: There’s a fairy story by Terry Jones from Monty Python and it’s called “The Glass Cupboard.” There’s nothing in it, but you can take out whatever you want from it. Some people take out things that help them.

Davie: That’s an amazing metaphor.

Julie: There’s something about the songwriting. The songs on the surface level come across as a very precise narrative, but then upon listening and re-listening you can pretty much find what you want in them. It’s very open-ended. There’s a lot of room for interpretation.

Davie: Yeah. I think it’s like having a mixture of it. It’s got to be something that is relatable enough, so specific enough, but not so specific that it robs you of an interpretation. “Famous Blue Raincoat” by Leonard Cohen is one of my favorite songs of all time. Not everyone has a friend or a girlfriend with a famous blue raincoat. The fact that he includes that is really important information; it’s also really trivial information, but it makes that character more real.

Band manager: Sorry to interrupt, if you could wrap up…

Julie: Yes, of course.

(Thank yous all around).

And thus ended the “game,” with the men of Bear’s Den expressing a desire to be truthful, real, relevant, and hopeful storytellers. There could not be a more fitting conclusion, because that is precisely what the songs of their debut LP Islands achieve.

Islands LP released Oct 20, 2014 and is available on Communion Music.

See Bear’s Den in concert at Le Point Éphémère on February 20, 2015.


Connect with Bear’s Den :
Official websiteFacebookTwitterSoundcloud

Photo of author

Julie Blore-Bizot

Américaine francophone, biculturelle et mélomane en quête de sensations sur scène au cœur de Los Angeles. Twitter : @juliequips