[LP] Mac DeMarco – Salad Days

Avec « Salad Days », le Montréalais Mac DeMarco refait parler de la blue wave, sa conception d’une pop sous tranquillisants. Après le très bon « 2 », son second LP sorti en 2012, notre Canadien bien aimé, aux dents du bonheur, célèbre sa pop tannique et apaisante encouragée par une atmosphère toujours plus peinarde. On avait d’abord cru à une blague, l’album sortait un premier avril, mais finalement confirmé chez Captured Tracks, maison mère des très bons Thee Oh Sees et autres Beach Fossils, le doute n’était plus permis.

Mac DeMarco - Salad Days

À l’écoute de Mac DeMarco, on rêve avec ce poète des nuages qui nous transporte loin après les dures journées de travail. « Salad Days », c’est comme la bande-son d’une vie sereine, celle du héros des temps modernes, celui qui vit simplement et sans s’interroger perpétuellement sur ce qu’il est et devrait être. On plane à mille lieues de toute perturbation, au calme, loin de tout ce qui pourrait nuire à notre voyage onirique.

Nous voici lancé avec « Blue Boy » qui nous accueille sur sa guitare à la fois agréable et bordélique, comme si nous la voyions floue. Mac ne chante pas, il accoste le blue boy pour le ramener à une existence simple à base de régimes de bananes, de bonne ale tiède et de musique musiquante.

Sur « Brother », on est conforté dans la coolitude même du type. Il doit être tellement bien, dans son canap, à caler ses petites suites d’accords, à les enregistrer puis à superposer un petit arpège tranquillement là-dessus, comme si de rien n’était. Derrière son apparente simplicité mélodique, on en revient à penser que les bons albums sont ceux qui se suffisent à eux-mêmes, quand les morceaux s’enchaînent pour créer un univers à part entière. Quand on ne retient pas une chanson, mais l’album comme un tout. Parenthèse : vous pourrez reconnaître ici le mashup d’ « If I Ruled The World » de Nas produit par The Hood Internet.

Avec « Let Her Go », c’est du naïf comme j’aime. J’ai envie de marcher dans la rue, le sourire aux lèvres et ivre de la vie. Avec ce titre dans les oreilles, je suis invincible.

S’en suit l’hallucination sur « Goodbye Weekend », où la guitare donnerait l’impression d’un perpétuel va-et-vient entre gros zoom et plan d’ensemble.

Avec ses petites percussions affables et sa guitare simplette, « Let My Baby Stay » nous fait croire que le chanteur est dans la même pièce que nous, dans ce bar vieillot et chaleureux. C’est la chanson d’amour d’un Gandhi de la pop actuelle, avec un sacré paquet de drogues dans le cornet en prime. Laissez-vous bercer, fermez les yeux et profitez de ce vent doux qui s’immisce dans vos doigts de pied, inopiné et bienvenu.

Sur « Passing Out Pieces », on revient alors aux années d’or des Beatles et consorts quand ils se mettaient au psychédélisme. Doux et accueillant, le moment est hors du temps, hors du monde et de ses activités. Un vrai moment d’introspection où la méditation passe par la musique. Vous ouvrez les yeux au rythme du fade out, le monde a changé pendant ces quelques minutes.

« Treat Her Better » nous ramène au pacifisme de l’homme. Cet album n’est-il pas un manifeste pour l’amour ? Dessus, son chant se meut en voix intérieure, ange gardien venu nous initier aux choses de la vie alors que suit toujours ce simili solo qui varie au rythme de nos sourires béats. Ne nous voilons plus la face : nous sommes sous le charme.

Armé d’un combo batterie lourde et un synthé vieillot, sur le très calme « Chamber Of Reflection » nous nous retrouvons « alone again ». La voix du Mac nous ferait alors penser à un Kevin Parker chantant au ralenti – oui, c’est possible – alors que le synthé a une sorte d’obsession punk dont personne n’a jamais saisi le sens. Entraînante sans le vouloir et terriblement indolente, elle se fourvoie dans nos plus petits recoins, lancinante comme personne, puis vient le moment où nous sombrons. Le refrain reprend et c’est tout simplement émouvant, transportant, très métaphorique. On imagine le froid polaire, une histoire d’amour dans la neige, le soleil froid. Majestueux.

Mac DeMarco

« Go Easy » entame dès lors la rupture de contrat, et pour cause l’album se finit prochainement, très prochainement. On se remémore les après-midis entre amis sur la route. Oui, la campagne normande est belle et profiter du soleil sur les nationales est un plaisir trop peu souvent égalé. C’est la lamentation amoureuse sur une route qui mène on ne sait où, mais dont le décor séduit sans rien dire.

Sur « Johnny’s Odyssey », on en revient aux origines, au monde marin de ce cher Homère, avec des sons profonds et des synthés bien rétros. Le délire est total et on a bien envie d’y replonger !

« Salad Days » décrit tout simplement un Mac DeMarco au top de sa forme. Et si vous n’avez encore rien prévu pour votre début de soirée, passez le devant le documentaire déjanté de votre trublion montréalais préféré, ce même qui nous aura déjà bien amusé, titillé et calmé pour un bon moment.

« Salad Days » de Mac DeMarco est disponible depuis le 1er avril 2014 chez Captured Tracks.


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Nils Savoye

Mais de quelle situation cette musique pourrait-elle bien être la bande-son ? Réponse d'un étudiant en histoire.