[Live] Hellfest 2016, jour 3

Dernière ligne droite pour le Hellfest édition 2016 en ce dimanche 19 juin. Journée la plus riche en grosses têtes d’affiche sur les Mainstages, retours flamboyants de groupes sur les scènes annexes, en particulier dans la Valley, le troisième et dernier jour du festival est l’occasion d’ouvrir un peu plus nos horizons musicaux, de profiter du site et du soleil et de réviser ses classiques.

Hellfest 2016 © Hugues-Alban Bermond
crédit : Hugues-Alban Bermond

Article écrit par Olivier Roussel et Maxime Antoine – photographies par Hugues-Alban Bermond

StoneBirds, RavenEye, Lecherous Gaze, Municipal Waste & Orphaned Land

C’est désormais habituel, la journée commence (après une douche chaude, ô miracle !) dans la Valley sur les coups de 10h30. Au programme ce matin, un groupe local puisque les Bretons de StoneBirds se présentent devant nous avec un excellent set de stoner doom un brin psychédélique et traversé par des plages de violence lorsque le bassiste Antoine prend le relai pour le chant pour pousser quelques cris gutturaux de bon aloi. Le trio joue quatre ou cinq longs morceaux, dont un dernier particulièrement excellent et leur musique nous donne un aperçu de ce à quoi nous étions en droit d’attendre la veille pour Hangman’s Chair. Planant, pesant et efficace, avec un joli jeu technique sur la basse à six cordes.

Un petit tour par la Mainstage pour profiter du soleil triomphal nous donne un aperçu des plutôt très bon RavenEye, qui n’ont qu’un seul EP à leur actif. Dans le registre hard rock avec un soupçon de stoner, les Anglais menés par le guitariste-chanteur Oli Brown font dans le très direct, à défaut d’être follement originaux. Cela reste donc basique, mais nous passons un bon moment et nous les aurions bien vus dans l’écrin plus modeste, mais adapté de la Valley, dans laquelle nous retournons d’ailleurs pour voir l’intégralité du concert complètement zinzin de Lecherous Gaze. De tout le festival, c’est peut-être le groupe le plus difficile à faire entrer dans une case. Décrit sur papier comme un mélange de punk, de psyché et de stoner, nous retrouvons en effet ces éléments-là dans l’étrange spectacle qui se déroule sous nos yeux. Maniant le bizarre et une esthétique de cartoon morbide et complètement destroy, le groupe aux nombreux musiciens balance des morceaux fous, souvent très rythmés et entraînants à l’énergie presque ska, mais le tout est dominé par la personnalité affolante du chanteur qui débarque sur scène affublé de bandages, d’une fausse bosse qui lui déforme le dos et l’épaule, et d’une paire de lunettes de soleil. Son visage est dissimulé, et il passera le concert à habiter cet étrange personnage de fou furieux, croisement improbable entre Alice Cooper et la créature de Frankenstein. Il fallait le voir s’enrubanner frénétiquement de chatterton noir en chantant, se baver dessus ou pousser quelques « glouyouyou » inarticulés à l’adresse du public pour avoir la moindre idée de l’étrangeté furibarde de ce concert déglingué, mais de haut vol.

On gardait un excellent souvenir de la prestation de Iron Reagan au Hellfest en 2015. De bonne heure le dimanche, de nombreux headbangers s’étaient réunis malgré la fatigue pour pratiquer dans la joie une alternative au jogging dominical à base de circle pits et de mosh pits. Il faut que croire que ça avait aussi plu au groupe dont la moitié officie dans Municipal Waste, qui se retrouvait sur le même créneau et la même scène un an après. Peu de changement dans le décor, le backdrop sur lequel apparaissait Ronald Reagan sur fond de crânes l’an passé figurait cette fois Donald Trump se tirant une balle dans la tête, hémoglobine et morceaux de cervelle inclus. Dans un registre toujours efficace de thrash old-school et décomplexé, Municipal Waste s’avère aussi explicite : « I Want To Kill Donald Trump » appuiera avec force quoique très brièvement le propos ! Rarement un groupe aura été autant en phase avec l’actualité : la veille au soir, lors d’un meeting du candidat républicain, un Britannique de 19 ans avait exprimé très exactement la même chose après avoir été alpagué sans avoir pu commettre son geste. La setlist composée de titres courts laisse peu de répit aux excités du dimanche matin et ce sont 18 titres qui sont balancés en une demi-heure. La discographie du groupe est balayée à toute blinde et le rare « Substitute Creature » est dédié à Brandon Ferrell, batteur originel décédé deux semaines plus tôt. Au grand dam du public chauffé à blanc, la cavalcade prendra brutalement fin avec l’interruption nette de « Born To Party », le groupe ayant débordé de son créneau. Nous nous mettons maintenant à espérer la présence en 2017 de Cannabis Corpse, autre projet enfumé et génial de ce crew de thrashers venant de Virginie, USA.

Une fois le créneau libéré, le public de la deuxième Mainstage qui commençait à s’impatienter en regardant des Blanche-Neige courir dans la fosse photo après un crowsurfing déjanté peut enfin entendre les Israéliens de Orphaned Land délivrer leur message de paix et de tolérance à travers leur metal hybride, digérant éléments folkloriques et traditionnels, death metal et rock progressif. Évacuons d’emblée le principal bémol de ce concert, le groupe est en effectif réduit, sans chanteuse et sans instruments traditionnels, ce sont donc des bandes enregistrées qui se chargent des passages instrumentaux folk, bien vite remplacés par les grosses guitares au son divinement orientalisant. L’ambiance côté public est merveilleuse, entre pancartes et drapeaux redoublant d’inventivité pour célébrer le message du groupe, symbolisé par la pochette de leur dernier album « All is One » qui sera le plus joué avec le classique « The Neverending Way of ORwarriOR ». Kobi Farhi, le chanteur, nous exhorte à manifester notre joie et notre appréciation de leur musique par tous les moyens. Danses, chants, circle pit, crowdsurfing, tout y passe. La fin du concert est grandiose, avec un chant qui se teinte de plus en plus de colorations locales et que tout le monde reprend en chœur pendant que les musiciens envoient une irrésistible sauce heavy et mélodique derrière pour enrober le tout.

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Maxime Antoine

cinéphile lyonnais passionné de musique