[Live] Beauregard 2022

Jour 1 : jeudi 7 juillet

Avec un accès gymkhana au festival, dû en grande partie à de nombreux ponts en travaux ou fermés entre les deux rives du canal de l’Orne, c’est avec regret que nous manquons de peu le début des festivités. OWN résonne et raisonne sur la scène « Beauregard » à 17h40 pile sous un soleil écrasant et aveuglant. Livrant un son pop et mélodique, qui n’est pas sans rappeler celui des Belges Balthazar, le groupe mené par son leader Antoine Lacroix, ex d’Aix et désormais normand, plante le décor d’une édition qui se révèle placée sous les meilleurs auspices. Loin des yeux, mais près du cœur, notre énervement à arriver en retard est vite dissipé par un set convaincu et enchanteur écouté en cheminant à pied jusqu’au festival. L’indie pop d’OWN enveloppe le public déjà nombreux massé devant la scène de titres matures et éprouvés. Celui qui a remporté la John’s Session 2022 remporte une nouvelle manche dans le Calvados. Nous le retrouverons dans une interview à suivre sur indiemusic pour évoquer cette montée en puissance jubilatoire.

Après cette première claque, l’autre joue est tendue à 18h30 à Turnstile sur la scène « John », à l’opposé du domaine. Et que l’on découvrira sans opposition. L’énervement doit être contagieux, car le quintet déboule sur scène empreint d’une énergie redoutable qui contamine la foule avide de se rincer le gosier et les oreilles au son de ce quintette hardcore venu pas forcément tout droit de Baltimore. « More [and] more ! », demande-t-on après chaque morceau ! Le groupe n’est pas économe et enchaîne les titres peu familiers aux festivaliers qui sauront leur donner toutes leurs lettres de noblesse. Turnstile joue avec style et soulève la poussière avec rage contre la machine. Ces cinq pyromanes auront évité de peu l’incendie.

Izïa est un phénomène à la fois cinématographique et en-chantant. Touchante notamment dans « La Belle Saison » (avec Cécile de France) et « Samba » (avec Charlotte Gainsbourg, Omar Sy et Tahar Rahim) diffusés cet été sur nos petits écrans, elle est une figure charismatique, proche de son art, proche des fans. Déboulant en trombe sur la scène « Beauregard » à 19h30, Izïa montre de quel feu de bois du Domaine elle chauffe, enchaînant en short des chansons qui en disent long. Fille peut être cachée de Tina Turner et de James Brown, ses pas de danse mettent en transe une foule déjà conquise par la fille de. L’Higelingénue sonique montrera qui est la patronne.

Peu impressionnés, ni par le vocoding de Laylow, ni par la pop entendue et suracclamée de Clara Luciani (qu’on préférera œuvrant dans La Femme), l’excitation personnelle devient folle avec la perspective de retrouver Madness sur la scène « Beauregard » à 21h4, bien des années après Rock en Seine où le groupe avait relevé au pied levé les frangins Gallagher (tiens, tiens…).
Le ska est indémodable, Madness est indémodable, le juke-box n’a pas pris un seul grain de poussière. La magie des années 80 opère sans faille, y compris pour les plus jeunes, heureux de s’éclater en famille avec leurs parents quinquas. La quintessence musicale des Londoniens est l’essence même de cette quinte flush musicale qui depuis plus de quarante ans fait l’as de pitre en se déhanchant dans des costumes seventies à carreaux aux plis parfaitement repassés. Et justement, ils repassent tous ses souvenirs joyeux, de « One Step Beyond » à « Night Boat to Cairo », convaincus que leur « Our House » restera aussi pour toujours la nôtre. Celle où l’on s’y sent tous tellement bien.

À 23h50, le serpent se faufile sur scène sur la scène « Beauregard ». Maintenant phénomène de stade attendus par tous les teufeurs, le show de DJ Snake remplit tout feu tout flamme le boulot (en épargnant les bouleaux). Show qui donne chaud, le sieur en sueur Grigahcine (qui rime parfois avec Thylacine) mixe et remixe sans retenues et sans timidité aucune. Il est partout sur scène et déchaîne les festivaliers, même d’âge reptilien. Les rythmes de William ne rasent jamais et maintiennent le poêle tout au long du set. Les yeux en prennent plein les oreilles et inversement. On ne pourra pas lui reprocher d’avoir la peau froide, DJ Snake est définitivement un phénomène mondial qui sait mettre le feu aux planches des dancefloor avec un florilège de beats enchainés. Un vrai serpent musical qui n’est pas à sornettes !

Quand y’en a plus, y’en a encore ! À peine remis de cette immersion dans la fosse au serpent, les Dirtyphonics enchaînent sans opposition sur la scène opposée à 1h05. Les teufeurs en redemandent, dans un autre style qui va les surprendre, les cueillir, les pénétrer au plus profond de leur squelette. Le duo français installé désormais aux US conjugue pour ainsi dire électro et heavy metal. Avec de la bass music qui vole très haut. Sur fond de scéno hypnotique, le groupe déroulant ses morceaux devant des clips 3D à faire pâlir n’importe quel gamer enfermé dans un métavers. À eux deux, les Dirty produisent un son des plus propres, puissant, entêtant. Le headbanging revient en force, les premiers rangs revisitent les postures des biens connus Beavis et Butt-Head. Charly et Pitchin (à retrouver en interview sur indiemusic) tiennent le pitch durant une heure infernale totalement hypnotisante. Le sommeil sera ensuite dur à simuler après autant de stimulations !

Photo of author

Nicolas Nithart

grand voyageur au cœur de la musique depuis plus de 20 ans