Note for our readers : for the ENGLISH LANGUAGE VERSION of the interview, CLICK HERE.
Alors que son premier album, « Spying », vient de sortir, l’artiste canadienne Jennie Vee a accepté de répondre aux questions qui nous brûlaient les lèvres, tant cette musicienne aux multiples talents ne cesse de nous faire découvrir des facettes toujours plus inédites de sa personnalité créatrice au fur et à mesure de ses compositions. Elle nous révèle ses inspirations et nous parle de ses collaborations ; mais, surtout, elle se livre sans fard et avec toute la gentillesse et le talent qui fait d’elle une musicienne à part.
- Comment te sens-tu, maintenant que l’album est sorti ?
Je suis plus qu’excitée à l’idée de partager cette collection de chansons avec tout le monde. Le soutien que j’ai reçu quand « Die Alone » est sorti l’année dernière a été vraiment chaleureux, et cela m’a motivée à continuer d’écrire et de préparer un véritable album. Les chansons qui figurent sur celui-ci sont comme mes enfants, et ça me donne l’impression de leur avoir donné naissance (émotionnellement, pas physiquement (rires)) !
- Peux-tu nous parler de ta manière de composer ? Comment crées-tu tes chansons ? Quelle place donnes-tu à la production ?
J’écris la plupart du temps dans mon studio, dans le Lower East Side à Manhattan. Je suis très influencée par la ville de New York, et vivre en plein cœur de celle-ci suscite en moi une grande source inspiration. En ce qui concerne la production, je m’imprègne d’autres chansons/groupes/albums pour mieux mettre tout cela au service de ma propre manière d’écrire. Il peut simplement s’agir d’analyser une prestation vocale, ou alors d’engendrer le même genre d’émotions que celles contenues dans une autre chanson. Une idée créative peut rapidement arriver à maturité, mais je travaille dur pour la peaufiner. La mélodie, la dynamique et la structure restent toujours ma priorité quand je compose de nouveaux titres.
- Quelle est la signification du titre de l’album, « Spying » ?
C’est, concrètement, la juxtaposition du fait d’espionner quelqu’un que tu connais tout en étant toi-même sous la surveillance de quelqu’un d’autre. Ce « quelqu’un d’autre » peut être un amant ou une personne qui t’est proche, mais les paroles suggèrent également que ça peut être une entité qui a plus de pouvoir ; comme le gouvernement, ou un organisme des autorités. La chanson-titre parle aussi de la complaisance de l’individu moyen face à une telle situation. La majorité des gens semblent ne pas accorder d’importance au fait qu’il y ait des caméras de surveillance partout, et sont prêtes à révéler des informations personnelles sans remettre en question l’éthique ou les dangers que cela représente. C’est un aspect que je trouve extrêmement troublant. Cette idée qui ressort du fait de vivre dans l’ère moderne des smartphones, des réseaux sociaux… d’être littéralement capable de surveiller les mouvements d’un individu, d’un ami ou d’un membre de sa propre famille. Je suppose que c’est un hommage inconscient à Orwell.
- Tes clips et ta musique démontrent ta capacité à suivre une ligne créatrice, faites de moments aériens et chargés d’énergie, en mélangeant le tout pour créer tes propres sons et images. Est-ce quelque chose que tu gardes à l’esprit quand tu composes et interprète ton art ?
Le fait de réaliser des vidéos et de jouer en live est toujours un challenge pour moi, qui ne suis pas une « performeuse » innée. Néanmoins, je sais qu’il est important d’unir les visuels à la musique, et je trouve que travailler avec ma meilleure amie, la photographe Katrin Albert, est une merveilleuse collaboration, étant donné que nous partageons la même perspective pour trouver de la beauté dans des endroits inhabituels. Tous mes héros ont des looks et une esthétique très forts, que ce soit le cuir noir et les pantalons serrés qu’on associe à The Jesus and Mary chain, ou le rouge à lèvres étalé et les cheveux en bataille qu’on a immédiatement à l’esprit quand on écoute The Cure.
- Sur la pochette de ton nouvel album, tu apparais comme une femme futuriste et surprise, quelqu’un qui semble s’interroger sur tout et venir d’ailleurs. Est-ce le cas ? Ou cherchais-tu à exprimer autre chose ?
C’est une excellente observation ! Dans une de mes anciennes chansons, je dis « cela me fait tout remettre en question », et je me comporte de cette manière depuis mon enfance. J’ai été élevée dans un milieu catholique très strict, et je me suis rebellée en lisant des ouvrages de philosophie existentialiste dès l’âge de dix ans ! J’avais de longues conversations avec mon père à propos du fait que je ne voulais pas aller à l’église, pourquoi j’aimais porter du noir… J’ai dû me justifier et défendre mon propre système de pensée, le choix de mon mode de vie, depuis mon plus jeune âge, et j’ai donc appris à TOUT remettre en question. Je suis également fascinée par l’espace et la nature infinie de l’univers, donc Katrin et moi avons décidé de jouer avec ces aspects métalliques et un espace atmosphérique pour la séance de shooting de la pochette. J’étais très émue ce jour-là. Souvent, lors de telles sessions, je me tiens de manière plus droite, plus stoïque ; mais, pour celle de la photo du disque, j’ai exploré toute une palette d’émotions, et je ne pensais absolument pas à avoir l’air « belle ». J’avais plutôt envie de transmettre des sentiments particuliers, et je suis heureuse d’avoir trouvé cette légère ambiguïté, parce que je désire avant tout que l’auditeur et le spectateur puissent interpréter ce cliché à leur manière.
- Tu tournes de plus en plus, aussi bien en solo qu’avec d’autres artistes. Peux-tu nous en parler ?
En fait, il y a trois phases dans mon processus créatif. La première consiste à accumuler autant d’expériences que possible et, habituellement, de passer par quelque chose de traumatisant, qui modifie le cours de ma vie et me stimule ; et, en général, c’est un réel bouleversement pour moi, en tant que personne et écrivaine. De plus, j’ai tendance à ressortir de cet état avec un grand choc créatif, ce qui amène à la seconde phase : le processus d’écriture, qui est la conclusion de tout cet ensemble de choses. C’est à ce moment-là que je m’isole, crée, enregistre et compose. J’ai la chance d’avoir un home studio, je n’ai donc aucune limite d’espace et de temps. La troisième phase est celle que j’appelle la phase de « partage ». Elle implique la sortie officielle du travail accompli et les tournées. Pendant l’année qui vient de s’écouler, j’ai passé beaucoup de temps sur la route avec mon amie Courtney Love, et ça a été formidable de tourner avec elle. Je l’aime et je la respecte, et je suis fan de sa musique depuis longtemps, j’ai donc eu une grande chance et un bonheur immense de pouvoir jouer ses chansons. Nous avons fait des concerts sur des scènes magiques, comme le Hollywood Bowl et l’amphithéâtre de Red Rocks, lors de notre tournée avec Lana Del Rey. Mais je me sens autant à l’aise sur une scène plus petite, dans un club. Entre le moment où j’ai tourné avec Courtney et avec Tamaryn, j’ai terminé mon album et je suis parti faire quelques sets au Royaume-Uni, puis d’autres aux USA avec Manic Street Preachers. Je suis impatiente de reprendre la route et de partager le disque avec le public, partout dans le monde.
- Que recherches-tu quand tu es sur scène ? Est-ce quelque chose de vital pour toi ?
Comme je l’ai dit auparavant, il y a trois phases dans mon processus créatif, et elles sont toutes les trois vitales dans mon expérience en tant que compositeur. Jouer en live, c’est une espèce d’échange d’énergie. J’ai ma propre expérience et je ressens des émotions à un niveau intérieur, qui me font vivre à nouveau une souffrance et des désirs personnels quand je chante certaines des paroles ou que je joue des mélodies. C’est à ce moment-là que je me connecte à mon groupe et, bien sûr, au public.
- Au début de ta chanson « Rock N Roll », tu dis : « C’est juste du rock’n’roll, alors oublie ton ego et perds le contrôle ». Est-ce ce que le rock représente pour toi ? De quel ego s’agit-il ?
Pour moi, le « rock’n’roll » – au sens le plus connu du terme – est un mode de vie. Soit tu ressens un besoin inéluctable de suivre cette voie, soit tu ne le ressens pas. C’est aussi simple que ça. Cet extrait fait partie de mes paroles les plus littérales. Je joue de la musique de manière professionnelle depuis plus de dix ans, et j’ai rencontré tout un tas de gens étranges et intéressants ; et beaucoup d’entre eux étaient très talentueux et réussissaient dans la voie qu’ils avaient choisie. De plus, le style de vie rock’n’roll exige que la vitesse moyenne d’une existence banale accélère d’un seul coup ; et, de ce fait, c’est très facile pour n’importe qui de devenir esclave de ses propres désirs égoïstes, dans ce genre de démarche. « Oublie ton ego et perds le contrôle », c’est en fait un conseil que je donne. En d’autres termes : ne deviens pas arrogant !
- Quels sont tes futurs projets de tournée ? Tu m’as dit que tu aimerais venir en France ; devons-nous nous attendre à te voir très bientôt ?
J’espère venir en France avec mon groupe dès l’année prochaine ! Nous allons tourner au Royaume-Uni en mars prochain, en première partie de Marion, et faire quelques concerts de notre côté. Nous espérons passer par la France, l’Espagne, le Portugal et l’Italie. Donc, attendez-vous à me voir au printemps 2016.
- Tu souhaites ajouter quelque chose ?
Vous pouvez retrouver ma musique sur jennievee.bandcamp.com, où vous trouverez également des éditions limitées et signées des digipacks, ainsi que des téléchargements digitaux et des t-shirts. Je suis aussi sur iTunes et Amazon.
Retrouvez Jennie Vee sur :
Facebook – Bandcamp
ENGLISH
As Canadian artist Jennie Vee’s first album « Spying » is now out, she accepted to answer a few questions we desperatly wanted to ask to such a talented and creative musician and composer. She talked to us about her inspiration and collaborations with others ; but, above all, she unveiled her amazing and precious kindness. Thus, she definitely is an open-minded songwriter coming from another time and space.
- How do you feel about your new album coming out ?
I’m beyond excited to share this collection of songs with everyone. The support I received after ‘Die Alone’ came out last year was overwhelming and really motivated me to keep writing and put together a full length album. The songs on this album are like my children and I feel like I’ve just given birth (emotionally, not physically, haha)!
- Can you tell us about the composing process ? How are you creating your songs ? What part do you give to production ?
I do the majority of my writing in my studio apartment on the Lower East Side of Manhattan. I’m highly influenced by the City of New York and living in its heart serves as great inspiration. In regards to the production; I’m constantly referencing other songs/bands/albums to better serve my own songwriting. This could be something as simple as analyzing a vocal delivery to attempting to evoke the same kind of emotive qualities of another track. A full song idea can come to fruition very quickly but I always toil away at gradually refining it. Melody, dynamics, and structure always top my list of songwriting priorities.
- What is the meaning of the album title, ‘Spying’ ?
That song is a juxtaposition of (very literally) spying on someone you know whilst being under someone else’s surveillance at the same time. That ‘someone else’ could be a lover or someone you actually know, but the lyrics also suggest that it could be someone more powerful; like a government/authoritative entity. The song also discusses the complacency of the average person in regards to all of this. Most people truly don’t seem to care that there are CCTVs everywhere and are quick to turn over personal information without questioning the ethics or dangers behind it all. It’s something I find highly troubling. The idea originated out of living in the modern age of smartphones, social media, etc… being able to quite literally track a person/friend/family member’s every move. I guess it’s a subconscious tribute to Orwell.
- All your videos and music prove that you are following a creative line, made of aerial and energetic moments, both mixed together to give birth to your own sounds and visuals. Is it something you have in mind when you perform your art ?
Video making and performing live are always somewhat challenging for me as I am not a natural born « performer ». However, I do know how important marrying visuals to the music is and I found that working with my best friend and photographer Katrin Albert to be a wonderful pairing as we both share the same perspective of finding beauty in non traditional places. All of my heroes have strong looks and aesthetics, from the black leather and stove pipe trousers we associate with The Jesus and Mary Chain to the smeared lipstick and matted hair with automatically see in our mind when we hear The Cure.
- On your new album cover, you appear like a futuristic and amazed woman, someone who seems to be questioning everything and comes from outer space. Is this the case ? Or did you need to express something else ?
That’s a very good observation ! A line from one of my older songs is « it makes me question everything » and I’ve always done that since I was as child. I was raised in a somewhat strict Catholic household and rebelled by reading existentialist philosophy from the age of 10! I would have long drawn out conversations with my father about why I did not want to go to church, why I liked wearing black, I had to justify and defend my personal belief system and « lifestyle » choices from a very young age and I really did learn to question EVERYTHING. I do also have a fascination with outer space and the infinite nature of the universe so Katrin and I decided to play with metallics and a space like vibe for the album cover shoot. I was very emotive that day, often in shoots I will stand in a more stoic posture, but at this shoot, on this day for my album cover I explored a lot of emotions and was not concerned at all about looking « pretty ». It was about conveying an emotion and I’m glad it comes across as slightly ambiguous, because I would like the listener and viewer to interpret it in their own way.
- You are touring more and more, as a solo artist and with others. Tell us about it.
There are usually three phases to my creative process. The first is accumulating experiences and usually going through something traumatic, life changing, challenging and this generally can stunt me as a person and writer. However, I tend to come out of it with a jolt of creative energy that starts the second phase, the writing process and ends the « block ». This is where I hermit away and create and record and write. I’m so fortunate because I have a home studio and there are no limitations with time or space. The third phase is what I call the « sharing » phase. It involves releasing the work and touring. This past year I have spent some time on the road with my friend Courtney Love and I had an absolutely amazing time playing with her. I love and respect her and have been a fan of her music for a long time, so I received so much joy from playing her songs. We played some magical stages like the Hollywood Bowl and Red Rocks Amphitheater touring with Lana Del Rey. I do feel just as comfortable on a smaller stage and in a club setting. In between touring with Courtney and also Tamaryn, I finished up my album and have done one trip over to the UK and some select shows with Manic Street Preachers here in the US. I can’t wait to get on the road and share it with people all over the world.
- What do you need while you are playing live ? Is it something vital to you ?
As I mentioned, there are 3 phases to my creative process and they are all a vital part of my experience as a songwriter. Playing live in a form or an energy exchange. I have my own personal experience and go through emotions on a very introspective level reliving a lot of pain and wonder singing certain lyrics and playing certain melodies. Then I connect to my band mates and of course to the audience.
- At the beginning of ‘Rock N Roll’, the lyrics say : « It’s just rock’n’roll, so lose your ego or lose control ». Is that what rock music means to you ? What kind of ‘ego’ ?
To me ‘rock n roll’ – the cliché term – is a lifestyle. You either have an inescapable passion to pursue it or you don’t. It’s that simple. That line is another one of my fairly literal lyrics. I’ve been playing music professionally for over a decade and have encountered all sorts of strange and interesting humans; many of them talented and successful in their own right. However, the rock n roll lifestyle causes the average speed of life to be thrown into overdrive and as a result, it’s quite easy for one to become a slave to their own egotistical desires. ‘Lose your ego or lose control’ is basically me giving some advice. In other words, don’t get cocky !
- What are your future touring plans ? You told me that you would come to France ; shall we expect you soon ?
I hope to come to France with my band in the new year! We will be over in the UK in March supporting Marion and also playing some of our own shows. We hope to cover France, Spain, Portugal and Italy as well. Look for me to be over in Spring 2016.
- Anything else you want to tell us ?
You can find my music at jennievee.bandcamp.com where a few limited edition, autographed, gatefold CDs remain as well as digital downloads and t-shirts. I’m also on iTunes and Amazon.