Breton partage le Chabada

Ils n’avaient pas de chapeaux ronds nos Breton du soir, ils portaient plutôt la capuche et sévèrement. Détail d’une prestation agaçante entre amateurisme scénique et musique bien sentie.

Nous sommes le vendredi 19 octobre au Chabada d’Angers, on vient d’essuyer une semaine de fortes pluies et ce n’est pas terminé. Un climat idéal pour accueillir la musique sombre, mais dansante des anglais Breton. Fort d’un album sorti il y a 7 mois, Breton nous proposait de savants arrangements qui empruntaient à la fois au hip-hop dans le traitement du son et du sample, au mathpop pour enfants propres à la Foals de par la voix et la lecture rythmique (bon, n’est pas Papaye ou Color qui veut hein) et à l’electronica qui n’est pas pour déplaire au label Warp nouvelle génération (génération bidon).

Les quatre musiciens se font attendre sur scène une bonne demi-heure sur un fond de The Raconteurs, nous rappelant que ce groupe formé entre autres par Jack White était sacrément fort que cela soit au niveau des mélodies sincères mais rock n roll que de la déstructuration au service du groove.
Ce n’est qu’aux alentours de 21h20 que les Anglais daignent monter sur scène dans le plus simple appareil de popeux un brin hipster, c’est-à-dire jean slim gris bien collant, pour Roman Rappak, le chanteur t-shirt I Cœur SG (Serge Gainsbourg il faut comprendre) et capuche encerclant le crâne. Certes, c’est peut-être un peu chipoter que de critiquer un look vestimentaire que même The Killers et The Script sauraient fièrement arborer.

Place à la musique où Breton nous livre un set formé autour de leur unique et excellent album à ce jour « Other People’s Problems » qui retranscrit relativement fidèlement la tension urbaine que livrent leurs textures sonores et mélodies nuageuses et rageuses.

Cependant, le charme n’opère pas une seconde durant le live.
Et pourtant, on ne peut pas dire que cela soit mal exécuté ! En effet, les gars sont bien là pour assurer leurs instruments (qui techniquement parlant se relèvent au final très pauvres et surestimés) et essaient de donner leur maximum à un public novice.

C’est clair, le quatuor est à fond, le problème est qu’ils sont chacun de leur côté, comme si chaque membre offrait sa propre vision du concert. On a le droit au machiniste frustré de ne pas avoir obtenu le statut de leader que confère le micro et la guitare ; vous savez, le genre de mec qui beugle aux chœurs histoire de se faire entendre et qui n’adresse pas un regard à ses acolytes. Chose franchement désagréable et agaçante au regard du public.

On a également le droit au bassiste pas à l’aise lorsqu’il s’agit de se déhancher au gré d’un rythme un brin dansant (avant bien entendu de retomber à plat vu que la séquence mélodique ne mène nulle part) et qui a l’air bien plus préoccupé par le fait de réorienter sa mèche plutôt que de composer des lignes de basses dignes de ce nom.

Seul le batteur s’en sort bien en proposant des compositions rythmiques plutôt élaborées en comparaison de ses compatriotes malgré un jeu de scène assez marrant. Mais bon, les batteurs sont là pour ça, non ?
Franchement, que font ces quatre types ensemble ? Les mecs ne se jettent aucun regard! Il n’y a aucune complicité, aucune symbiose et cohésion de groupe. Est-ce la trahison de l’amateurisme d’un groupe trop tôt lancé sur un paquet de scène ou simplement un groupe épuisé de tout un tas de concert ?

Pourtant Roman Rappak nous assure être heureux de jouer devant une salle relativement pleine. On veut bien le croire car il a l’air sincère, mais à quoi bon ?
En toute honnêteté, vous ne pouvez imaginer ma déception suite à ce concert. Leur album m’avait mis une belle claque (sauf au chant) à sa sortie et apportait une fraicheur basée sur des ingrédients pourtant bien connus. Ce n’est pourtant que sur disque que le mélange marche à fond.

Sur scène, le groupe ne nous joue que ses morceaux un peu dansants (il faut entendre par là avec la charley à contretemps) et fait l’impasse sur tous les morceaux qui faisaient que l’album avait une force et une profondeur, des morceaux livrant une émotion plus doucereuse, plus mélomane et au final, à mes yeux, sincère.
Comment peut-on se passer des morceaux Oxides, Ghost Note et The Commission qui sont pour moi de vrais petits manifestes musicaux d’une jeunesse déprimée et imbibée. En clair, le groupe est arrivé à côté de là où il devait se trouver.
De plus, que dire d’un public totalement hétérogène qui d’un côté est conquis d’avance et fait plaisir à voir, et qui d’un autre côté éructe bien fort son envie de renvoyer le groupe là d’où il vient. Pitoyable.

En définitive, je ne dirais pas que le groupe n’est pas à voir sur scène, car il faut aller aux concerts et se faire sa propre idée en fonction de son regard et son affectif.
Ce n’est peut-être même au final qu’un mauvais concert parmi une flopée d’excellentes prestations scéniques.
Cela dit, Breton devra me convaincre une prochaine fois, lorsque ceux-ci auront abandonné l’idée d’un dispositif vidéo pour faire oublier un groupe totalement explosé et auront compris quels sont leurs morceaux de valeur. Une belle déception.

bretonlabs.com

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Maxime Dobosz

chroniqueur attaché aux expériences sensorielles inédites procurées par la musique