[EP] Yellow – Ma petite vie

À l’écoute du nouvel EP de Yellow, la première pensée qui vient à l’esprit est celle d’être face à un compositeur humble, prêt à livrer les expériences à la fois intérieures et revendicatives de ce qui lui permet de mener, chaque jour, son existence avec toute l’énergie possible et imaginable. Ainsi, « Ma petite vie », sobre et modeste, ressemble à la nôtre, quitte à s’y méprendre ; encore aurait-il fallu auparavant trouver un parolier aussi talentueux pour exposer les ressentis, émotions et divergences d’un point de vue aussi sincère que celui de cet incroyable artiste.

Prenez la pochette de « Ma petite vie » de Yellow : des objets rangés autour de l’artiste, en ordre, chacun à sa place. N’essayez surtout pas d’en enlever ne serait-ce qu’un seul ; par ce geste insignifiant, la résonance de l’opus qui nous est ici offert serait à jamais modifiée, bousculée, et perdrait toutes ses plus profondes significations. Présenté comme le kit parfait pour se construit un petit Yellow chez soi, la figurine et ses accessoires se métamorphosent, lorsque les mélodies surgissent, en confidents prenant vie sous nos yeux, nous parlant, nous interpellant. Existentiel et sensoriel, le disque nous libère, nous convie à une bouffée d’oxygène inattendue et bienveillante. On imagine sans aucun doute possible tout le travail que le musicien a dû abattre pour créer ces ramifications, ces harmonies tendues ou sensuelles ; mais le résultat n’en est que plus émouvant et sincère.

Invoquer la langue anglaise pour définir son propre parcours pourrait paraître déplacé, voire inutile ; pourtant, la chanson éponyme prouve que parler, s’exprimer est universel, et encore plus lorsqu’il s’agit de dessiner, de tracer les lignes des chemins empruntés et parcourus pour atteindre l’extase et la félicité. Ces bonheurs simples que « De la tendresse » interroge en les confrontant à ce que l’on nous demande d’être, et non à ce que l’on est vraiment ; ici, la collaboration avec #MissVero offre une lecture à deux voix, un écho qui nous transperce et nous questionne sur la manipulation autant médiatique que politique à laquelle nous sommes chaque jour confrontés, sur l’impact du professionnel sur le personnel ; à quoi bon, finalement, perdre notre temps pour des choses qui n’en valent que peu la peine ? « Revelations » est une lumière succédant à ces ténèbres oppressantes, tandis que « Je t’aime plus » fait du désir physique le mouvement libérateur de la tendresse, de l’affection, quand les sentiments s’estompent ; on n’est bien avec l’autre qu’en parcourant son corps, sa peau, ses lèvres, dans une vision presque hédoniste du quotidien, trouvant dans « Mon ombre » le complément, naturel (l’être aimé, notre forme démesurée projetée par le soleil ou un lampadaire solitaire, la nuit) ou artificiel (les anti-dépresseurs, l’alcool), de la solitude dans laquelle on s’enferme de nouveau. « Yellowdie » se fait hymne de ces sept pistes, témoin de leur consistance parfaite et complémentaire, avant que « Walking Along » ne prolonge le voyage vers des contrées nouvelles qu’il nous tarde de découvrir.

Prendre le temps de contempler ce qui nous entoure, tout en se faisant face dans le miroir afin de relever les moindres aspérités et rides de la nostalgie et de ce qui nous paraît impossible mais demeure à portée de main ; voilà à quoi nous invite Yellow en nous narrant ses pérégrinations, ses promenades partant de l’inconnu pour découvrir l’intime, le profond, le soi. Une ballade que l’on fait le sourire aux lèvres, une larme au coin de l’œil, mais qui nous permet avant tout de saisir le sens de nos pas, de sentir le sable ou l’herbe sous nos pieds. De profiter, tout simplement.

« Ma petite vie » de Yellow est disponible depuis le 8 avril 2015 chez RSP Music.


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Raphaël Duprez

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