Rencontre avec Von Pariahs

A l’occasion d’une rencontre organisée par la Sacem, le label Yotanka et Radical Production, suite à leur résidence au Chabada, j’ai eu la chance de faire plus ample connaissance avec Von Pariahs.
À quelques semaines de la sortie de leur premier album « Hidden Tensions », cette entrevue m’a permis de revenir sur le parcours sans temps mort du sextet nantais pour mieux cerner leurs influences comme leurs ambitions.

de gauche à droite : Romain, Sam, Hugo et Théo – crédit : Fred Lombard
  • Bonjour Von Pariahs !

Von Pariahs : Salut !

  • Est-ce que je peux avoir une petite présentation du groupe ?

Théo : Sam est au chant, Théo, à la guitare, Hugo est à la basse, et Romain est claviériste.

  • Et il manque qui du coup ?

Sam : Marco, deuxième guitare et Guillaume, à la batterie.

  • Si vous deviez définir Von Pariahs, que diriez-vous ?

Théo : Von Pariahs, tu veux parler du nom ou de la musique ?

  • D’abord du nom alors. Pourquoi avoir choisi ce nom là plutôt qu’un autre ?

Théo : On voulait un nom qui fasse rock, parce qu’on était en Vendée, et que la scène ne l’était pas vraiment.
On voulait que lorsque les gens tombent une affiche avec marqué « Von Pariahs », ils se disent sans voir le style que ça serait un concert de rock.

crédit : Fabien Tijou
crédit : Fabien Tijou
  • Et donc pour le style : rock ?

Théo : Du rock, mais pas que !

  • Du rock au sens large ?

Théo : Ouais, dans le sens où nos influences sont hyper variées.

  • Sam, tu es originaire de Jersey, donc d’origine anglaise, quels avantages cela apporte-t-il selon toi au projet ?

Sam : Déjà une aisance. Il y a toute une culture que j’ai en moi et que j’essaye d’exprimer aussi à travers mes paroles. J’ai la chance d’avoir connu et grandi avec deux cultures : du coup, j’absorbe tout ça et je le recrache sur papier.

  • Je me doute que ça n’aurait pas été envisageable d’écrire en français ?

Sam : Non, pas pour moi, non.

crédit : Fabien Tijou
crédit : Fabien Tijou
  • J’ai essayé de donner ma définition d' »Hidden Tensions », elle est certainement incomplète, mais je la partage avec vous : entre punk et new-wave, une plongée entrainante dans l’obscurité et la violence. Cette définition ressemble-t-elle à ce que vous avez voulu rendre sur l’album ?

Théo : C’est très bien si c’est ce que tu as ressenti. Chacun peut ressentir notre musique à sa manière, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises interprétations.

  • À l’écoute des titres de ce premier album, j’ai trouvé une sorte de constance : on rentre directement et sans perdre de temps dans l’intensité des morceaux. Il y a quelque chose de brut. C’est ce que vous avez voulu insuffler dans cet album ?

Théo : Carrément. C’est nos influences punk qui ressortent dans ce travers-là, où on ne perd pas de temps avant d’entrer dans le vif du sujet, car je crois que c’est là où on est le meilleur.

  • D’ailleurs, je crois qu’il n’y a pas sur votre album de titres qui dépassent les fameuses trois minutes trente.

Théo : En tout cas, au dessus de quatre minutes, il n’y en a pas un seul.

  • Il y a pas mal de morceaux sous les deux minutes vingt même.

Romain : Même moins de deux minutes sans compter le larsen d’Uptight (rire).

  • En résumé, des titres efficaces…

Théo : Exactement, simples et efficaces !

  • À côté de ces titres, on va dire « nerveux », « Gruesome », « Still Human », « Someone New »…, il y a quelques morceaux « à part » tels « In The Fairground » et « 19.09 ». Quel regard avez-vous sur leur place au sein de l’album ? Était-ce pour donner un peu de souffle, apporter un temps calme à l’album ?

Théo : « At The Fairground » n’a pas été réfléchi dans ce sens-là. Il a été réfléchi d’une manière spontanée dans l’idée de faire une bonne chanson. Après, c’est vrai qu’il relâche un peu la pression.

  • C’est un peu la ballade de l’album ?

Théo : Oui, après il y a « 19.09 » voire « Under the guns » aussi. Si tu veux, ils n’ont pas été écrits dans le but de faire des balades, mais c’est ce que ça donne à la fin. Et on en est très contents comme ça !

  • Rien n’a été calculé si je comprends bien ?

Théo : Totalement. On n’a pas tendance à réfléchir de cette manière. Je pars du principe qu’à partir du moment où on essaye de plaire aux gens, on perd en authenticité, en spontanéité et en honnêteté.
Ça serait le meilleur moyen de rendre une musique banale et sans âme. Et on s’y refuse.
On est dans une autre optique où l’on fait les choses comme on a envie de les faire. On ne demande pas aux gens leur avis.

  • Accordez-vous un côté « one-shot », « la première est la bonne » à ce que vous faites ?

Théo : La spontanéité a une grande importance sur notre musique, mais on travaille énormément nos morceaux. On est vraiment de gros bosseurs.
Du coup, je dirais que c’est 50/50.

  • Ce disque, « Hidden Tensions » est un véritable concentré de singles potentiels. Est-ce qu’il y a des titres que vous avez envie de mettre plus en avant que d’autres ?

Théo : Les douze, car ils sont excellents ! Tous les titres nous représentent, les douze pistes sont notre reflet. On ne peut pas choisir un ou deux titres, c’est comme si tu demandais à un papa de choisir entre ses gamins.

  • Imparable ! On va parler un peu de la scène musicale nantaise. Maintenant que vous y habitez, quelle relation avez-vous avec ?

Sam : On s’entend bien avec pas mal de groupes. Par exemple, Rhum for Pauline, DAN, Pegase. On partage un studio de répét avec Elephanz et Pillow Pilots. Après, on va chacun connaitre des musiciens à droite, à gauche, pas forcément d’ailleurs de la scène nantaise.

  • De par des expériences passées ?

Sam : Non, juste des chemins qui se croisent.

Théo : Des affinités, des coïncidences, des rencontres.

Sam : Je pense par exemple à Fordamage, à My Name is Nobody ou à Papier Tigre qui sont des groupes nantais, indés, un peu plus vieux que nous.

Théo : Après, c’est une scène foisonnante. C’est une ville où il y a beaucoup d’artistes, beaucoup de musiciens. Venir de la même ville ne veut pas dire qu’on fait la même musique et heureusement ! Et on en a la preuve très clairement avec Nantes.

crédit : Fabien Tijou
crédit : Fabien Tijou
  • Vous sortez votre premier album après plusieurs années d’existence pour ce projet. À quand remontent les débuts de Von Pariahs ?

Théo : Le groupe existe depuis quatre ans. La formation remonte à 2009.

  • Sortir un premier disque après quatre ans, c’était pour une question de maturité ou l’histoire de trouver les bonnes personnes avec qui l’enregistrer ?

Théo : C’est un tout. Après, en quatre ans, on n’a pas chômé. On a enregistré deux EPs et un double single. Au bout de trois ans et demi, on a enregistré notre premier album. Là, ça fait quatre ans, car l’album est enregistré depuis quelques mois déjà.
Chaque année depuis la formation du groupe, il y a eu un enregistrement sauf qu’on est dans une dynamique où il y a constamment un foisonnement de la scène émergente sur la toile.
C’est assez monumental tous les groupes qui émergent, donc forcément pour sortir du lot, pour intéresser des gens qui vont nous faire découvrir à un maximum de personnes, on est parti du principe qu’on voulait faire un premier album dans la qualité la plus grande qu’on puisse envisager. Et pour nous-mêmes, on voulait les meilleures personnes, les meilleurs studios. Ou celui qui nous correspond le plus. On voulait tout ça, que tous les critères soient réunis pour qu’on soit fiers de ce qu’on a fait. Et à l’heure actuelle, c’est le cas !

  • Comment voyez-vous l’évolution de votre projet depuis les premiers enregistrements ?

Théo : C’est dur à dire, on n’est pas encore arrivé à enregistrer le deuxième album même si on a déjà enregistré des morceaux pour le second en pré-production. Savoir où la musique va, lorsqu’on rentre en studio, c’est toujours plein de coïncidences, de choses qui se font de manière spontanée. C’est ça qui est intéressant, et surtout dans le rock’n’roll.
Du coup, on verra bien, mais nous l’objectif c’est d’écrire des bons morceaux !

Sam : On peut dire que c’est quand même devenu plus efficace. Notre son est plus carré, plus réfléchi, plus mûr.

  • Je trouve que sur votre disque, il y a des références aux années 80s, de nombreux chroniqueurs ont pu le souligner, mais je trouve que votre musique reflète également une mouvance rock plus actuelle des Hives à Bloc Party même. Ces groupes ont-ils d’une manière ou d’une autre influencé votre propre musique ?

Théo : C’est pas des artistes ni des albums qu’on va écouter dans la vie de tous les jours. C’est plutôt des artistes qui ont été importants dans mon adolescence et ça a peut-être été le cas pour vous aussi (aux autres membres) ?
C’est le genre de groupes avec les Strokes, avec Franz Ferdinand, tu vois toute cette vague du rock 2000 qui a joué un rôle dans notre éveil au rock. À l’heure actuelle, on n’écoute pas ces artistes-là, mais après, si on s’inscrit dans la lignée d’esthétique de ces groupes, pourquoi pas. On n’appartient pas à une scène précise.

  • On ressent aussi clairement des influences de Joy Division, des Talking Heads, des groupes vraiment ancrés dans les années 80s dans Von Pariahs. Si on vous proposait de prendre la voiture du Doc Brown en version break pour emmener tout le monde, est-ce que ça vous tenterait de jouer à cette époque-là ?

Sam : Vu qu’on a également beaucoup d’influences qui viennent des nineties, ouais, ça nous dirait parce que c’est sûr qu’on serait des superstars parce qu’on ferait la musique que les gens feraient dix ans après donc dix ans avant !

crédit : Fred Lombard
crédit : Fred Lombard
  • Si je vous demande de me donner quelques disques qui ont influencé Hidden Tensions ?

Théo : « Psychocandy » de The Jesus and Mary Chain, « The Idiot » d’Iggy Pop, « Three Imaginary Boys » des Cure, le premier Franz Ferdinand… Je sais pas, il y a tellement d’albums. Je peux pas tous te les citer. Les Talking Heads, les Stooges, les Undertones, les Crumbs, pas les Cramps. Ouais, plein de choses !

  • Ce premier album, vous l’avez enregistré dans deux studios différents ; le Black Box et l’Odyssey. Pourquoi deux studios et pourquoi ces studios ?

Théo : Le studio d’Angers, Black Box, nous a permis d’enregistrer tout l’instrumental. On l’a enregistré en live pendant sept jours en studio pour les douze morceaux. Et le studio Odyssey a servi à enregistrer les voix. C’est le studio de notre ingénieur du son, il nous connait bien, il nous suit depuis un moment déjà et il connait très bien la voix de Sam et qui sait comment la mettre en valeur, avec quel type de micro, quel type de compression. Et du coup, ça s’est fait séparément ces deux enregistrements-là, et c’est deux entités qui se rejoignent après sur le disque pour former les chansons.

  • Vous me parliez tout à l’heure du deuxième album, qui était déjà plus ou moins avancé… Vous l’aviez déjà dit plus tôt dans l’interview, vous ne vous accordez pas de pause.

Théo : L’album actuel restera toujours pour nous une grande fierté et un disque qu’on défendra de tout temps, mais notre envie d’avancer en tant que musiciens, en tant que groupe nous pousse à mettre en place de nouveaux morceaux. Et ce qui est cool, c’est qu’ils viennent comme ça !
On ne force rien et on laisse les choses se faire !
À l’heure actuelle, on a plusieurs morceaux pour le deuxième album.

  • Ces morceaux, vous allez déjà les jouer en live ou vous allez attendre un peu ?

Théo : Quelques un, mais pas trop non plus. On veut pas tout dévoiler.

  • On va parler de la pochette du disque qui est très belle avec une famille de fantôme. Qu’est-ce que ça signifie pour vous ?

Von Pariahs - Hidden Tensions

Théo : Ça représente plein de choses, et en même temps, et comme je te disais tout à l’heure, il n’y a pas de vérité. C’est une œuvre qui a été faite par Théo Mercier. À sa conception, il avait certainement quelque chose en tête que moi j’ai comprise différemment.
Pour moi, c’est une sorte de photo d’une famille actuelle ; avec toutes les mauvaises choses qu’il peut y avoir derrière et toutes l’apparence qu’il peut y avoir au-dessus.
Le rapport à l’image que l’on donne finalement dans notre société.
Y’a d’autres gens qui vont y voir des voiles, d’autres gens un côté science-fiction avec le délire des fantômes. Je pense qu’aucune piste n’est à écarter.
Ce qu’il faut retenir, c’est que ça nous inspire une tension cachée qu’on exprime à travers les morceaux du disque.

  • Finalement, au sein de Von Pariahs, vous insistez sur le fait que c’est à chacun de ressentir à sa manière, à sa façon votre musique, votre univers.

Théo : À partir du moment où l’on créé une œuvre d’art, il faut accepter que le public s’en empare et qu’il l’interprète avec ses propres codes.

  • La sortie de l’album, c’est le 30 septembre. Quelles sont vos attentes par rapport à cette sortie ?

Théo : C’est qu’un maximum de personnes puisse écouter cet album.

Romain : Ce que Théo veut dire, ce qu’on écrit pas les morceaux pour plaire à tel ou tel personne.

  • Par rapport à cette sortie, est-ce vous avez des annonces à faire ? Un clip qui va sortir ?

Théo : Oui, on va sortir un clip le 30 septembre, ça sera le clip de Gruesome.

  • OK, premier titre de l’album. Merci pour l’exclu !
    Une grande tournée française qui vous attend à partir d’octobre, vous prévoyez également de sortir des frontières ?

Théo : Passer à l’étranger, c’est un but. Le truc, c’est de définir le bon moment pour le faire. On sait qu’on a déjà des opportunités.
La première tournée pour l’instant se concentre sur la France.

  • Vous serez de retour au Chabada le 12 décembre avec Griefjoy. Ca va vous faire quoi de revenir jouer ici sachant que vous avez fait une résidence ici.

Théo : Ça sera l’occasion d’encore foutre une claque à tout le monde !

  • Merci beaucoup et bon retour sur Nantes !

Von Pariahs : Merci à toi !

Merci à François du Chabada ainsi qu’à Clarisse, Vivien et Vincent de Yotanka pour avoir permis cette rencontre.

vonpariahs.com
facebook.com/vonpariahs

Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques