« Exit Inside » est le beau rayon de soleil de ce début d’année. The Angelcy pourrait un peu trop facilement être assimilé à une énième sensation folk, de ces mêmes sensations qui nourrissent la gourmandise de la blogosphère, toujours soucieuse d’être à l’origine de phénomènes médiatiques underground. Le groupe organisé autour de l’emblématique Rotem Bar Or, poursuit son petit bonhomme de chemin sans se soucier des autres. Ainsi, l’air de rien, il atterrit directement dans la première division de la musique indie, celle qui agite chaque jour la rédaction d’indiemusic, avec un album promis à un bel avenir.
L’aventure du groupe israélien, (doit-on le rappeler ?) The Angelcy débute en 2010, comme une sorte de nécessité : nécessité d’être et d’exister, dans un pays trop étroit pour les envies voyageuses de Rotem Bar Or, la voix et l’âme de ce groupe. La musique folk est avant tout sincère et intemporelle, s’inscrivant dans l’histoire de chacun d’entre nous ; même si, spontanément, elle est associée à la scène folk américaine. The Angelcy est ainsi un groupe de folk par essence, qui nous raconte des histoires profondément humaines. Leur message, plus militant que politique, participe à sa manière à cet élan populaire planétaire pour la paix, plus que nécessaire aujourd’hui. Sans tomber dans les clichés de nos représentations culturelles souvent éloignées de la réalité, il semble pour le moins évident que la jeunesse israélienne est, de fait, extrêmement marquée, dans son cœur et dans sa chair, par cet enjeu mondial. Proche de la souffrance des peuples, que la guerre touche de plein fouet, « Exit Inside » raconte avec simplicité le quotidien, les espoirs et les craintes, le vague à l’âme des hommes et des femmes subissant des décisions qui les dépassent. Quand l’absurde devient réel, la musique et la spiritualité sont des moyens très humains pour mobiliser les ressorts de l’existence et surtout célébrer la vie.
Ainsi, après une très belle introduction instrumentale, « Baby Boy » se révèle dès les premières notes de musique, dès les premiers mots. Il pose le décor. « My baby boy is in the army of disbelief, my baby boy is in the army of midsummer grief « .Le sujet est sensible, mais l’ambiance ne vire pas au mélodrame ; bien au contraire. Porté par une énergie collective rare et une complicité instrumentale indéniable, le morceau captive l’attention et interroge notre humanité.
The Angelcy évoque rapidement de sacrés clients de la musique indépendante : Tuung, Get Well Soon, Andrew Bird, Calexico,Hayden et même le grand Vic Chesnutt, pour le timbre de voix si particulier de Rotem Bar Or. Comme pour le grand Vic, il y a ce petit quelque chose de vital dans l’incarnation du chant de Rotem Bar Or. Sur « Freedom Fighters », The Angelcy prend même de faux airs de Violent Femmes dans une version acoustique punk qui était la marque de fabrique de la bande à Gordon Gano.
Bien loin de singer ces musiciens qui nous ont tant fait rêver, Rotem Bar Or et sa bande séduisent par leur approche de la musique. « Exit Inside » est parcouru par un vent de liberté, un souffle qui sent bon le swing d’antan, le klezmer et la musique de rue. Les musiciens passent d’un instrument à l’autre, l’air de rien. Parfois, la clarinette anime les débats. Le ukulélé amène une légèreté et une candeur qui aèrent le tracklisting. Les morceaux puisent dans la palette sonore de cette formation polymorphe, des intentions cinématiques qui soulignent avec grâce la poésie et la musicalité des textes de Rotem Bar Or. Ce qui pourrait nuire à la cohérence du disque permet justement d’afficher des nuances sensibles, qui font de chaque morceau un moment unique. Le dernier titre, « Dreamer », se termine à peine qu’on a déjà envie d’appuyer à nouveau sur Play. Le pari est gagné.
Certains morceaux résonnent d’ailleurs plus longtemps que les autres, comme « Rebel Angel ». Une chanson qui nous interpelle avec son texte à plusieurs niveaux, partant du cas sensible et intime du chanteur (ce que nous supposons) et de la complexité de sa relation familiale, sujet ô combien universel. « I am a killer, I kill with words, I killed my mama and my papa too. ».
« Exit Inside » est un beau disque voyageur et spirituel, simple et généreux ; une œuvre militante bien plus profonde que son côté lumineux pourrait le laisser supposer.
« Exit Inside » de The Angelcy, sortie le 29 février 2016 en Europe chez Sony/Jive Epic.
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