[Live] Shame à l’Élysée Montmartre

Révélation Britannique cette année avec son premier album « Songs of Praise », Shame incarne avec Idles ce que l’indie rock délivre de mieux aujourd’hui outre-Manche. Prestation aux contours de fêtes, l’ambiance est spéciale le 14 décembre 2018 à l’Élysée Montmartre : c’est la dernière du groupe pour 2018, la fin d’une tournée. Si bien qu’on sent les Londoniens très chauds et remuants pour en faire quelque chose de grand.

Shame – crédit : Cédric Oberlin

C’est comme s’ils pouvaient définitivement lâcher les chevaux, qu’il n’y avait aucune raison de se préserver. On le sent notamment dans les vociférations de son leader, Charlie Steen, qui semble avoir l’intention d’user sa voix jusqu’au bout. Déjà capables de remplir l’Élysée-Montmartre, les Londoniens sont responsables d’une grande messe punk, entraînant un public parisien euphorique et difficile à contenir derrière le crash pit.

Le chanteur, véritable électron libre qui symbolise la symbiose avec ce public survolté, en allant constamment et sauvagement à son contact. Dès les premiers riffs affutés de « Dust on Trial », il vient chercher les fans les plus expressifs dans la fosse, ce qui produit une surexcitation immédiate. Juste après, pendant le brûlot « Concrete », le jeune anglais va jusqu’à balancer son micro dans le public, puis se précipite pour le récupérer afin de ne pas louper le refrain. On ne doutait pas de la capacité de Shame à foutre le bordel, mais peut-être pas aussi vite. À l’ancienne (évoquant pêle-mêle The Fall, The Clash et Fugazi), mais diablement actuel, ce punk rock est aussi abrasif que mélodique, virulent que jouissif.

Entre paroles acerbes et guitares acérées, un vent de fraîcheur souffle de l’autre côté de la Manche. Les nouvelles partitions inédites ajoutées dans la setlist confortent d’ailleurs cette ligne directrice que Shame entend suivre : « Human for a Minute », « Cowboy Supreme » ou encore « Exhaler » sont ainsi les prochains hymnes qui porteront un second long format plus qu’attendu.

Plus ancienne, « One Rizla » – annoncée même comme « la première chanson que nous avons écrite » – est l’un des principaux détonateurs dans le public. L’agitation redouble sur son refrain instrumental tubesque qui symbolise tout le talent mélodique de la formation. « Je ne me suis jamais considéré comme un chanteur » rétorque Charlie Steen avant d’entamer « The Lick ». En effet, cette partition le voit se lancer sur un spoken word grave et bouillant, sur un rythme bien plus lent qui nuance intelligemment le show. « Gold Hole » vient conclure un set intense et surpuissant juste avant un rappel pour le moins improbable. Embarquant sur scène leurs copains de tournée, Sorry, les Londoniens s’essayent avant Noël à une cover décalée de « Feliz Navidad » de José Feliciano.

À la fois porté sur les diatribes militantes et des compositions accessibles, Shame a trouvé le juste milieu pour devenir un futur champion du rock anglais, et nous démontre une fois de plus que le punk n’est pas mort et enterré pour le grand public. En tout cas, on n’a plus d’excuse pour l’ignorer : le potentiel est bien là.


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Charles Binick

Journaliste indépendant, chroniqueur passionné par toutes les scènes indés et féru de concerts parisiens