[Live] Radiohead au Zénith de Paris

Le dernier passage à Paris du groupe d’Oxford remontait à quatre ans plus tôt, autant dire des lustres ! Maintenant que « A Moon Shaped Pool », son dernier album en date, est sorti, digéré et apprécié unanimement, il ne restait plus qu’à voir si Radiohead allait réussir la prouesse de retranscrire des chansons aussi complexes en live.

Radiohead - Le Zénith Paris

Les deux dates sont bien évidemment complètes depuis les premières minutes de la mise en vente. Devant la salle, les négociations vont bon train. Un homme est prêt à lâcher le précieux sésame à une désespérée. Son prix ? Après 5 secondes d’analyse, ce sera 150 euros. La femme en face refuse, et pourtant pas sûr qu’elle ait trouvé une meilleure affaire par la suite.

Pour votre serviteur, ce seront les deux nuits d’affilée. Choix raisonnable quand nous savons que les Anglais changent leur setlist à hauteur de 50% chaque soir. Les deux concerts commencent, cela dit, de façon identique, avec les cinq premières chansons du dernier album, qui sera joué quasiment dans son intégralité chaque soirée. Chic !

« Burn The Witch » gagne en punch et fait office de starter efficace, mis en valeur par un éclairage rouge du plus bel effet et un jeu d’écran somptueux, qui prouve une fois de plus le soin qu’apporte le groupe à sa scénographie. Jonny Greenwood vend déjà du rêve, jouant de la guitare avec un archet. Puis il s’en va se mettre au piano pour « Daydreaming ». Silence de cathédrale dans la salle, moment merveilleux presque hors du temps, cette version live offre la solennité qui semble manquer à sa contrepartie studio.

Hormis les magnifiques interprétations des chansons issues du dernier disque, le groupe régale de ses plus grands classiques. Le premier soir aura droit à « Paranoid Android » et « No Surprises ». Le deuxième à « There There » et « 2+2=5 ». Énorme surprise : la présence de « Creep » le premier soir, précédé de rires sardoniques de Thom Yorke. Le public n’en croit ni ses yeux ni ses oreilles, le moment est forcément magique. OK, « Creep » n’a pas la classe des morceaux qu’on trouve sur « Kid A » ou « In Rainbows », mais elle reste une pop song magnifique avec de beaux moments de bravoure. Et, quoi qu’il arrive, elle demeure une partie importante de la bande-son de la vie de n’importe quel fan de Radiohead, voire même de musique en général.

Le tout reste quand même fortement électronique, et la foule perd complètement la tête sur « Idioteque », ou une version à 200 à l’heure de « National Anthem ». Sur scène est présent le batteur de Portishead, déjà en place lors de la dernière tournée, pour un total de deux batteries.
Mais nous retrouvons surtout Jonny. Guitariste épique et héroïque, il balance les solos les plus improbables, des pistes de guitare décalées et intrigantes, avant d’aller jouer du piano, puis du xylophone, puis de la mini-batterie, ou encore de triturer des machines pour en sortir des sons improbables. Comme à chaque concert de Radiohead, il est l’élément le plus impressionnant, celui sur qui nous revenons poser constamment notre regard. C’est bien simple : cet homme sait tout faire. Nous en viendrions presque à nous demander pourquoi il n’est pas sélectionné en équipe d’Angleterre pour l’Euro. Thom Yorke aussi est toujours égal à lui-même, toujours fou, sautant dans ses chorés dont lui seul a le secret.

Les deux concerts passent comme des charmes, le groupe semble prendre son pied, au point de ne plus vouloir repartir et de rester 2 heures 20 à chaque fois, pour le plus grand plaisir d’une foule en transe.
Mais toutes les choses ont une fin, et celle du premier soir prendra la forme de « Pyramid Song ». Piano hanté, guitare une nouvelle fois jouée à l’archet, batterie jazzy, elle nous laisse assommés. Le deuxième soir, c’est « Karma Police », classique s’il en est, qui finira de ravir les fans. « For a minute there, I lost myself ». Repris en chœur à l’infini, même la chanson terminée, Thom ne peut s’empêcher de rejouer les accords de guitare pour relancer la foule.
Allez, nous pouvons nous le dire, les concerts de la précédente tournée étaient quand même un peu mous du genou. Celle-ci remet les compteurs à zéro et refait de Radiohead cette bête de scène capable de proposer, pendant plus de deux heures, un show magique qui alterne beauté froide puis chaleureuse, guitares déglinguées, électro qui donne envie de danser avant de devenir apocalyptique. Oui, « For a minute there, I lost myself ».


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Sébastien Weber

chroniqueur attaché aux lives comme aux disques d'exception