[Interview] Playground Theory

Note for our readers : for the ENGLISH LANGUAGE VERSION of the interview, CLICK HERE.

En l’espace de deux albums radicalement différents mais toujours animés d’une même passion pour le folk et la pop, le projet grec Playground Theory est parvenu à bouleverser les codes de genres qui, sous leurs doigts, trouvent une nouvelle signification, propice à toutes les libertés de la part de créateurs passionnés par leur art. Leur réputation commençant à grandir, aussi bien dans leur pays d’origine qu’à l’international, il était grand temps de rencontrer le groupe afin de faire le point sur son existence, sa carrière et ses projets à venir. Un entretien complet pour mieux découvrir le phénomène Playground Theory !

crédit : Lilika M.
  • Bonjour et merci de bien vouloir répondre à nos questions ! Tout d’abord, pouvez-vous nous présenter Playground Theory : quand le projet a-t-il vu le jour ? Comment a-t-il évolué, de ses débuts à maintenant ?

Playground Theory a été créé en 2009 par un groupe d’amis, Vagelis (batterie), Dimitris (claviers) et Marcia (voix et claviers). Ce qui nous lie avant tout, c’est notre plaisir de jouer et d’écrire notre propre musique. Depuis nos débuts, nous avons collaboré avec de nombreux artistes très talentueux et produit et sorti deux albums (« Speaking Of Secrets » en 2013 et « Connect The Dots » en 2016).

  • Lorsque l’on écoute votre musique, et plus particulièrement votre premier disque, « Speaking Of Secrets », on peut y découvrir un mélange étrange de pop et de rock, ainsi que des influences et ambitions musicales très cinématographiques. Quels genres d’images et d’émotions désirez-vous transmettre à travers vos chansons ?

Chaque chanson exprime un sentiment différent. Sur « Speaking Of Secrets », les pistes servent à créer une atmosphère, un lien entre l’image et le son. Par exemple, « Waves » est un mélange d’images de vagues et de leurs mouvements, avec l’idée du passage dans nos vies de toutes les personnes que nous croisons et qui, dans un sens, évoluent selon un courant similaire.

  • Quels sont les rôles de chacun lors du processus de composition ? Est-ce que vous arrivez avec un certain nombre d’idées que vous soumettez aux autres et sur lesquelles vous travaillez, ou est-ce que chacun d’entre vous est libre de suggérer des idées, des sonorités particulières ou certains types d’arrangements ?

La structure initiale et les mélodies des chansons sont écrites par Dimitris et Marcia. Marcia rédige les paroles et compose les lignes vocales, Dimitris s’occupe des claviers, des riffs et, parfois, des lignes de basse, et Vagelis s’occupe de toute la section rythmique. Lorsque nous répétons, il arrive souvent que de nouvelles mélodies soient ajoutées par les musiciens avec lesquels nous collaborons. Ainsi, le processus d’écriture évolue constamment autour de nous.

  • Votre son est très précis et admirablement bien arrangé. Combien de temps passez-vous, en moyenne, en studio ? Comment travaillez-vous sur chaque chanson, de ses premières versions aux titres définitifs ?

Nous passons énormément de temps à créer le noyau central de chaque chanson en partant d’une démo déjà élaborée. Comme nous te l’avons dit auparavant, chaque chanson est enrichie de nouveaux éléments qui apparaissent lors des répétitions avec le groupe complet, ainsi qu’en compagnie des artistes invités. Quand nous sommes absolument certains que la chanson est prête, nous allons alors en studio, où nous enregistrons toutes les voix et les instruments en direct ; puis notre producteur, George Priniotakis, met sa touche personnelle et complète la production des chansons, ou leur amène une perspective totalement nouvelle. Ce processus final peut prendre plus de temps que prévu ; mais, au vu du résultat, nous sommes pleinement heureux et satisfaits !

  • « Speaking Of Secrets » a été salué par la critique et le public, et a également été considéré comme l’un des meilleurs disques de l’année 2013 par de nombreux magazines et blogs. Avez-vous ressenti une certaine pression au moment de commencer à travailler sur votre second album, « Connect The Dots » ?

Pas du tout, tout simplement parce que nous avions foi en nos nouvelles compositions. Pendant les concerts qui ont suivi la sortie de « Speaking Of Secrets », nos nouvelles chansons (comme « Little Things » ou « Prison Song ») ont toujours été appréciées par le public. Elles l’ont ému. Après la sortie de notre premier album, nous avons revu nos objectifs à la hausse, surtout en termes de production et d’enregistrement, pour pouvoir amener notre musique à un niveau encore plus élevé.

  • « Connect The Dots », contrairement à votre album précédent, sonne de manière plus « humaine », si je puis dire. Il pourrait presque être considéré comme un disque folk, du fait de l’humanité qui ressort de chacune des chansons. Dans quel état d’esprit étiez-vous avant de commencer à travailler sur cet album ?

« Connect The Dots » est basé sur des chansons qui contiennent des éléments axés sur le mode oriental (les riffs, les voix), et non plus sur les simples modes majeur ou mineur. Cela peut expliquer pourquoi tu le décris comme plus « humain » et folk. Nous voulions expérimenter de nouvelles manières de composer, basées sur la rencontre entre les influences orientales et occidentales, et également utiliser des idées venant de la musique traditionnelle grecque, en plus de nos propres influences, plus populaires (l’électro, le trip-hop, la dream pop ou le shoegaze).

  • La chanson d’ouverture de l’album, « All That Could Have Been », sonne comme une confession des années passées et de tout ce qui vous est arrivé depuis le premier chapitre de votre quête musicale jusqu’à maintenant. Avez-vous des regrets à propos de cette période ?

« All That Could Have Been » est une chanson qui parle des possibilités et des choix de vie que nous avons dû faire, de même qu’elle nous rappelle l’importance du hasard dans nos décisions, à un moment donné, et de la façon dont tout cela a influencé ce que nous sommes devenus. Ce n’est pas vraiment à propos des regrets, mais plus de ce qui fait ce que nous sommes. Donc, d’une certaine manière, cette chanson est intimement liée à notre quête musicale à travers toutes ces années.

  • Contrairement à ce que pourrait signifier son titre, « Prison Song » est une chanson pleine d’espoir, mais également chargée de mélancolie et d’un désir très intense de faire exploser toutes les barrières, tous les murs qui nous enferment. Que souhaitiez-vous exprimer à travers ce titre ?

« Prison Song » est une reprise d’une chanson traditionnelle grecque de la région de Zakynthos. Elle a été chantée et réinterprétée par de nombreux détenus qui y exprimaient leur histoire, leurs peurs et leurs espoirs alors qu’ils étaient emprisonnés, au XIXe siècle, à un moment où Zante était encore sous occupation anglaise. Dans un sens, en effet, elle mélange la mélancolie et le désir de faire sauter toutes les barrières. C’est notre seule chanson dont les paroles sont en grec. Comme nous avions eu la chance de l’entendre interprétée par des chanteurs traditionnels de l’île de Zante, nous avons ressenti le besoin urgent de la jouer à notre manière.

  • Le titre de l’album, « Connect The Dots », suggère un besoin vital de se retrouver après avoir été aspiré par le music business et, peut-être, avoir perdu une partie de votre âme pendant tout ce qui concernait la promotion et les tournées. Il sonne également de manière plus franche, plus directe, comme si vous aviez besoin de vous reconnecter avec votre propre personnalité. Était-ce quelque chose que vous aviez à l’esprit au moment de commencer à travailler sur le disque ?

Concrètement, « Connect The Dots » illustre le besoin de nous reconnecter avec nous-mêmes, mais également de regrouper tous les éléments en apparence opposés de nos existences et de les réunir en une seule et même entité. Chaque chanson est une étape de notre histoire. L’album, vu comme un tout, est aussi bien un moyen de combiner ces événements qu’un voyage permettant à chaque auditeur d’imaginer sa ou ses propre(s) histoire(s).

  • Playground Theory existe depuis 2009. Huit ans plus tard, quel regard portez-vous sur votre projet ? Des regrets ? Des espoirs ?

Huit ans, c’est très long ; mais, si tu considères que nous avons étudié et joué de la musique pendant pratiquement toute notre vie, nous pensons qu’il est toujours possible d’évoluer et de créer de nouvelles chansons. « Connect The Dots » est sorti en 2016 et, à l’heure actuelle, nous sommes déjà en train d’écrire et de composer de nouveaux titres. Nous avons d’ailleurs l’intention de sortir un nouveau disque dans le courant de l’année.

  • Il y a beaucoup d’éléments naturels dans votre musique, ainsi que vous la décrivez sur votre page Facebook : « Une tentative de donner vie à des rêves éveillés, des pensées secrètes et des craintes enfouies, ainsi que le sentiment de flotter sur la mer, le visage plongé… dans le son. » Et il est évident que votre musique est, par de nombreux aspects, proche de mouvements et d’images naturalistes, comme l’océan, le désert et la forêt. Êtes-vous d’accord avec cette conception de votre art ?

Oui ! Nous sommes totalement d’accord, surtout parce que nous trouvons notre inspiration dans de nombreuses images de paysages, dans les mouvements que ceux-ci diffusent, et nous les relions à des sentiments et des états d’esprit particuliers. La mer et ses ondulations sont présentes dans bon nombre de nos chansons, parce que cela permet de créer plusieurs niveaux émotionnels parfois contradictoires, mais toujours très musicaux. Être nés et avoir été élevés en Grèce, ainsi qu’avoir la chance de vivre près de la mer, a définitivement influencé notre manière de nous exprimer artistiquement.

  • Que pouvez-vous nous dire sur l’état actuel de l’industrie musicale en Grèce ? J’ai eu la chance d’échanger quelques messages avec No Clear Mind, et il semble difficile pour les groupes ou artistes venant de votre pays de se faire connaître à l’international. Êtes-vous concernés par ces difficultés, et est-ce que votre label, PuzzleMuzik, vous aide à vous faire connaître dans d’autres pays ?

Bien sûr, c’est difficile. Pour pouvoir être écouté ailleurs qu’en Grèce, un groupe doit impérativement avoir les bons contacts pour permettre d’apporter la promotion adéquate à un public particulier. Une agence ou un intermédiaire sont souvent nécessaires. Notre label se focalise principalement sur notre promotion en Grèce et nous a grandement aidés à mettre en avant notre musique ici. Mais il est évident que nous aimerions beaucoup jouer dans d’autres pays (en France, par exemple ; ce serait fantastique !). En ce qui concerne l’industrie musicale en Grèce, tu serais impressionné par la variété et la qualité des groupes qui émergent en ce moment. On dirait que, pendant les années de récession que nous venons de traverser, il y a eu une progression incroyable de nouveaux artistes, et de la musique en général, dans des genres très diversifiés.

crédit : Lilika M.
  • Quel sont projets dans les mois à venir ?

Enregistrer et composer de nouveaux titres, et bien sûr monter sur scène à Athènes et un peu partout en Grèce.

  • Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?

Merci de nous avoir permis de nous exprimer sur indiemusic. Continuez à nous faire profiter de toute cette bonne musique !


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ENGLISH

Thanks to two amazing records, both opposite but also bathed in folk and pop music, Greek band Playground Theory has been able to create a new way of expressing emotions and inspiration through music and lyrics, bringing new standards to arts and performances and allowing its member to compose all their songs in a free state of mind and a constant desire to express the band’s passion for what it brings to life. Their reputation keeps growing up, year after year, in their homeland as well as in other countries. It was then about time to meet the crew members and let them talk about their career, history and future projects. Here is an intense interview with the amazing musical phenomenon Playground Theory !

crédit : Lilika M.
  • Hi and thanks a lot for answering our questions ! First of all, could you introduce yourselves : when was Playground Theory born ? How did it evolve from its foundations to now ?

Playground Theory was formed in 2009 by a group of friends, Vagelis (drums), Dimitris (keys) and Marcia (vocals and keys). Our love for playing and writing our own music was our bond. Since then, we have collaborated with many talented musicians and have produced two studio albums (« Speaking of Secrets » – 2013 and « Connect the Dots » – 2016).

  • While listening to your music, especially with your first record, « Speaking Of Secrets », one can hear a weird mix of pop music, rock and cinematographic ambitions and influences. What kind of images and feelings tend you to express through your songs ?

A different feeling is expressed through each song. In « Speaking Of Secrets », the songs convey an ambience through pictures and sounds. « Waves », for example, mingles the picture of waves and their movement with the idea of all the people that come and go from our lives.

  • Who is doing what during the composition process ? Do you come with a few ideas and give them to the musicians, or is everybody free to suggest tunes, sounds or arrangements ?

The basic structure and melodies of the songs are written by Dimitris and Marcia. Marcia writes the lyrics and vocal lines, Dimitris the keys, riffs and sometimes bass progression and Vagelis is in charge of the rhythm section. In the process of rehearsing, a lot of new melodies can be added by other musicians we collaborate with. So, the process of songwriting is always evolving along with us.

  • Your sound is truly precise and well-arranged. How much time do you spend in the studio ? How do you manage to work on every song, from beginning to the end ?

We spend a fair amount of time creating the core of each song and usually a demo recording. As stated earlier, each song is enriched by new elements that come up while rehearsing with the whole band. When we believe that the song is ready, we move on to the recording studio, where we record again all voices and physical instruments and our producer, George Priniotakis, gets to put hands on and finish the production of the song or maybe give it a whole new perspective. That final process may last more than expected, but there is always a happy and satisfactory ending !

  • « Speaking Of Secrets » was acclaimed by critics and the public, and also considered as the best album of the year by many magazines and music blogs. Did you feel some kind of pressure before working on your second record, « Connect The Dots » ?

Not at all, since we had strong faith on our new material. In our concerts following the release of « Speaking Of Secrets », new songs ( « Little Things », « Prison Song ») have always been highlights and « touched » the audience. After our first album, we had higher standards concerning the production and the recording process, so we could take our music to the next level.

  • « Connect The Dots », as opposed to your previous record, sounds more « human », if I may say so. It could almost be considered as a folk album, because of the humanity which surrounds every song. In what state of mind were you before starting to work on this album ?

« Connect The Dots » is based on songs that contain various eastern modal elements (riffs, vocal lines) and are not based on major or minor scales. This is perhaps why you described it as more « human » and folk. We wanted to experiment with combining eastern and western elements and use ideas from Greek traditional music, along with our western influences (electronic, trip-hop, dream pop, shoegaze).

  • The opening song of the album, « All That Could Have Been », sounds like a confession about the past years and what happened from the first chapter of your musical quest to its actual shape. Are there things you regret about the way things happened ?

« All that Could Have Been » is a song about all the possibilities and turnouts our life could have taken and a reminder that randomness along with our choices at given moments form our current status. It’s not exactly about regret, but more about what really makes us who we are. So, in a way, this song is also connected to our musical quest throughout the years.

  • On the opposite of its title, « Prison Song » is full of hope, but also mixed with melancholy and a strong desire to get rid of barriers and walls. What did you want to express through this particular song ?

« Prison Song » is a cover of a traditional Greek song from the region of Zakynthos. It was sung by various inmates who sung their stories, fears and hopes while in captivity, during the 19th century when Zante was under English occupation. In a way, it is mixed with melancholy and a desire to get rid of any barriers. It is our only song with Greek lyrics. Having heard this song by traditional singers on the island of Zante, we felt the urge to play it in our own way.

  • The title of the album, « Connect The Dots », suggests a need to find yourself again after being pushed in the music business and, maybe, losing a part of your soul because of touring and promoting. It also sounds more straight-to-the-bone, as if in the urge to reconnect with your own personality. Was it something you had in mind while starting working on it ?

Basically, « Connect The Dots » expresses the need to reconnect with ourselves and to connect the seeming irrelevant aspects of our lives and make a whole. Each song is a part of our story. The whole album is the way to combine these stories and a journey for each listener to create his/her own stories.

  • Playground Theory is active since 2009. Eight years after, how do you consider your project in 2017 ? Any regrets or hopes ?

Eight years is a fairly long time, but considering that we have been studying/ playing music for the most part of our lives, I believe that one can always evolve and create new songs. In 2016, « Connect The Dots » was released and we are now already writing and recording new material. We plan to release some new songs this year.

  • There are many natural elements in your music, as you describe it in the introduction to your music on your Facebook page : « An attempt to make daydreams, secret thoughts, clotted up fears and the feeling of floating in the sea face down… into sound ». And it is obvious that your music is, in many ways, close to natural movements and visions, like oceans, deserted landscapes and forests. Are you agree with such a vision of your art ?

Yes ! We strongly agree as we get get inspired by various landscape images and movements and frequently connect them with feelings and states of mind. The sea and its movement is present in a few of our songs, as it conveys many layers of feelings often conflicting, but still very musical. Being born and raised in Greece and living by the sea definitely has influenced our way of expressing ourselves.

  • What can you tell us about the musical world in Greece ? I have had the chance to get in touch with No Clear Mind, but it seems difficult for bands and artists from your country to go worldwide. Do you feel concerned by these difficulties, or does your label, PuzzleMusik, act to help you spread in many different countries ?

It surely is difficult. In order to get heard abroad, a band needs the right contacts that could provide the appropriate promotion to the right audience. An agency or a middle person is usually needed. Our label mainly focuses on promotion in Greece and has helped us a great deal in promoting our work here. We would love however to play in another country (France would be great!). As for the musical world in Greece, you would be amazed by the variety and quality of the new bands emerging here. It seems that, during the years of the recession, there has been an enormous increase in high quality new music in various genres.

crédit : Lilika M.
  • What are you planning to do in the forecoming months ?

Record and compose new stuff, appear on live stages in Athens and and the rest of Greece.

  • Anything else you want to say ?

Thank you so much for having us on indiemusic ! Keep up the great music !


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Photo of author

Raphaël Duprez

En quête constante de découvertes, de surprises et d'artistes passionnés et passionnants.