[LP] MONO – Requiem For Hell

Poids lourd du post-rock depuis 1999, le quatuor tokyoïte MONO revient, deux ans après le fascinant doublé « Rays of Darkness » et « The Last Down », avec un neuvième album à la dualité la plus vitale. Produit par Steve Albini, « Requiem For Hell » est une œuvre bouleversante de puissance et de frisson, de violence et de pesanteur, dont les pulsions de vie et de mort l’élèvent tel un colosse dans les flammes.

Mono - Requiem For Hell

Il suffit de contempler la pochette de « Requiem For Hell » pour saisir toute la force du disque. Deux êtres dans l’ombre, serrés l’un contre l’autre, observent le tourbillon d’âmes ailées, aspirées par l’œil d’un cyclone de lumière, tournoyant sans fin jusqu’à les avaler et les engloutir. Œuvre aux contours bibliques, dans ses références, soulignant la lutte des anges et des démons, les cinq pistes prennent tout leur sens quand l’écoute est entreprise.

Avec « Death in Rebirth », le martèlement insistant de la batterie et l’acharnement continu des guitares, sortant peu à peu d’un inquiétant mutisme, installent la première scène. Exercice de patience, de passion également, de conviction sûrement, de tension surtout, du long de ses terribles huit minutes s’intensifiant martialement pour s’achever dans le bruit le plus crispant, l’ouverture du neuvième album de MONO fait ressentir toute la noirceur d’un quatuor instrumental habitué à aller au-delà des limites et des conventions. Cette dualité est d’autant plus soulignée, mise à côté de « Stellar », incarnation musicale lumineuse du calme après la tempête. Loin du tumulte passé, la tranquillité reprend le dessus et la renaissance s’accomplit. L’orchestration se fond alors avec le bruit, comme un vent soufflant les feuilles d’automne, pour laisser s’installer la tension dramatique de l’éponyme « Requiem For Hell », et ses dix-huit minutes impériales.

Dans sa première moitié, « Requiem For Hell » repart de plus belle avec de longues suites d’accords et de rythmiques prenant toujours plus de vitesse jusqu’à s’effacer, disparaître comme des fantômes, pour renaître plus ardemment dans une terrible seconde moitié, frénétique et dramatique, évoquant le chaos et la désolation. En bref, l’incarnation d’un enfer sonore…

À chaque étape du disque, MONO provoque des sensations enfouies autant qu’il invoque des émotions contraires. La grande rigueur, savante et disciplinée, du jeu du quatuor japonais sert alors toute la passion narrative de cet album éprouvant émotionnellement tant il cherche l’implication la plus totale de l’auditeur. Il  montre alors l’incarnation d’un acte physique fusionnel et jusqu’au-boutiste de ses figurants. Nous battons au rythme de « Ely’s Heartbeat », sublime fusion du classique et du post-rock, de l’orchestral et de l’électrique, pour sublimer le meilleur des deux mondes avant de reconsidérer finalement que la pochette de « Requiem For Hell » est bien l’incarnation d’un tout : de cinq œuvres mises bout à bout, célébrées avec ardeur et recueillement dans « The Last Scene », conclusion solennelle et nébuleuse d’un disque instrumental qui n’a point besoin de mots pour se raconter. Fascinant.

crédit : Mitja Kobal
crédit : Mitja Kobal

« Requiem For Hell » de MONO, sortie le 14 octobre 2016 chez Pelagic Records.


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Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques