[Live] Minuit et A-Vox à l’Aéronef

Soirée à thème à l’Aéronef : alors que tout le monde est venu découvrir sur scène Simone Ringer et Raoul Chichin (enfants de Catherine et Fred, aka les Rita Mitsouko), la soirée débute avec le concert des locaux de A-Vox, là aussi un frère et une sœur, Virgile et Anthéa. A-Vox avaient déjà été une des rares très bonnes surprises du dernier Main Square Festival après leur victoire au tremplin régional organisé par la ville d’Arras.

Minuit © David Tabary
Minuit © David Tabary

Au Main Square, ils n’avaient eu aucune peine à remplir l’espace de la grande Green Room. Autant dire que la toute petite scène du club de l’Aéronef paraît presque trop petite pour contenir toute l’énergie déployée par ces deux-là. Surtout Anthéa qui a bien du mal à rester plus de 10 secondes sans sauter dans tous les sens, que ce soit derrière ses claviers, derrière son micro en bord de scène, ou bien avec son jarrepad, un pad fixé autour de sa cuisse comme une jarretière. Virgile est beaucoup plus calme derrière sa batterie, mais non moins efficace. Une nouvelle fois, leur prestation nous fera penser à un autre duo vainqueur du tremplin régional du Main Square, Klink Clock. Même si A-Vox a une approche beaucoup plus électro et malgré tout plus explosive. En tout cas A-Vox n’a aucun mal à jouer les chauffeurs de salle, et ce dès les premières secondes de son set avec une intro jouée dans le noir, à quatre mains et autant de baguettes lumineuses pour une séance de percus vivifiante.

Puis vient le moment de découvrir Minuit sur scène. Le groupe est fatalement précédé d’un buzz autour de leurs ascendants familiaux. Dans la salle avant le concert, ça discute du sujet, et pas toujours positivement. Certains en viendraient presque à soupçonner Raoul et Simone de faire exprès de ressembler (physiquement ou vocalement pour Simone) à leurs parents. On hallucine un peu…

Le groupe entre en scène avec une intro de dos, avant de se retourner et d’entonner le titre « Sur les berges », probablement le seul morceau qui lie vraiment Minuit aux Rita Mitsouko par le style. Sur les paroles « l’amour, j’en veux ! », les photographes du premier rang subissent une agression sexuelle collective d’une fan un peu trop éméchée qui se frotte contre eux en hurlant sans cesse ces paroles. Photographe de concert, un métier à risque…

Anecdote mise à part, ce qui frappe très vite, c’est que Minuit est un vrai groupe. Il n’y a pas que Raoul et Simone, les Minuit sont six en scène et jouent vraiment tous ensemble. La cohérence et le plaisir de jouer en groupe est palpable. Joseph Delmas à la guitare a des faux airs à la fois de Lenny Kravitz et de Mathieu Chedid selon ce qu’il joue ou ses attitudes, et fonctionne à l’unisson avec Clément Aubert un poil plus discret à la basse. Raoul Chichin les rejoint parfois, quand il ne décoche pas des riffs de folie de l’autre côté de la scène, tandis que Simone se déhanche au centre. Le début du show respire la fraîcheur et la joie de vivre.

Le moment fort du concert tient probablement à l’enchaînement des deux titres « Caféine » et « Recule ». Sur « Caféine », le groupe se met un peu en retrait et laisse Simone seule dans la lumière. Le regard de celle-ci transperce toute la salle et sa voix cristalline vient chercher un à un chaque spectateur pour mieux l’hypnotiser ; un frisson de douceur et de bien-être parcourt la foule malgré un texte qui devrait plutôt inspirer la fatigue et le mal de crâne. Simone est tellement dans son truc que sa bouche se déforme légèrement pour sortir certains sons venus d’ailleurs. On réalise alors qu’on avait une sirène devant nous depuis le début.

Mais alors que nous pensions être au maximum de l’intensité du concert, vient le titre « Recule ». Le groupe, toujours en retrait, laisse Simone nous chanter une histoire entre mysticisme et violence physique. Prise par son propre texte, Simone a les larmes aux yeux et tremble légèrement. Un silence pesant s’empare de la foule. On n’osera pas se retourner mais c’est comme si on devinait l’ensemble du public derrière nous avec les yeux humides. Puis lorsque la chanson prend un tour de révolte avec les paroles « Au diable la peur, je prends les choses en main », les musiciens du groupe reviennent en pleine lumière aux côtés de Simone, comme pour l’épauler et faire face. C’est là que l’on comprend que Minuit a un certain art de la mise en scène, quasi cinématographique. L’exercice semble néanmoins éprouvant pour Simone qui sort quelques instants de scène.

L’occasion pour Raoul et ses acolytes de sortir une reprise très rock de l’instru « Maiden Voyage » d’Herbie Hancock. Simone revient pour une autre reprise tout aussi rock mais un peu plus funk de l’excellent « You Only Live Once » des Strokes (indiquée, volontairement ou non, comme « We Only Live, Once »). Le concert a manifestement pris un virage plus énergique et se termine en apothéose avec le délirant « Flash ». « Si ton corps dort, sort donc tes griffes » nous chante Simone, mais visiblement il n’y a plus un seul corps endormi dans la salle. Le groupe sort de scène sous un tonnerre de cris de joie et d’applaudissement.

Sur la setlist, aucun rappel n’est prévu. L’Aéronef envoie sa playlist d’après concert, mais le public en redemande tellement que le groupe revient. Les micros son déjà coupés et on n’entend pas ce que Raoul nous dit. Pour le coup, on n’a pas de mal à se convaincre que ce rappel n’était vraiment pas prévu. C’est ce que Raoul indique une fois son micro rallumé. Du coup, le groupe propose de refaire « Sur les berges », le premier morceau du concert. Éclat de rire général quand les Minuit se remettent de dos, comme s’ils recommençaient le concert du début. Le morceau se termine et le concert s’achève pour de bon. Chacun repart en ayant le sentiment d’avoir vécu un moment privilégié : un petit club qui assiste à la naissance d’un grand groupe, qu’un jour plus personne n’aura l’idée d’appeler « les enfants des Rita Mitsouko ».


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David Tabary

photographe de concert basé à Lille, rédacteur et blogueur à mes heures