Certains musiciens se contentent d’interpréter le folk en y apportant, certes, une once d’âme admirable ; mais peu se décident à dépasser le genre pour y trouver des idées toujours plus intéressantes et, bientôt, attachantes. Ce que fait à la perfection Manolo Redondo sur un nouvel album aux douces saveurs éclectiques et somptueuses, confortables et entêtantes.
Artiste touche-à-tout passionné et passionnant, le Parisien Manolo Redondo (Manuel Dedonder, dans le civil) n’aime pas stagner ou se cantonner à un genre particulier. Lorsque l’on parcoure son blog, on découvre en effet un créateur soucieux de s’ouvrir à toutes les possibilités, tant que celles-ci lui permettent de s’épanouir dans des compositions sonores multiples. Avec, toujours, ce besoin de faire naître des sons proches de l’illustration cinématographique, tant il met ses nombreux talents au service de l’image mentale, de l’œuvre dans son ensemble et sa singularité. Donnant ici à voir son côté folk (mais pas uniquement), il offre avec « A Drop About to Drown » une collection de chansons aériennes et inlassablement soignées et évocatrices, dans une cohésion parfaite et sans faille.
Ainsi, les titres prennent vie devant nous, presque sous la forme d’une prise directe, sans fard. Ils cherchent dans l’immédiateté des harmonies (Bird Watchers) ou de cuivres sensibles et délicatement posés (Pink Dolphins) la pureté d’arrangements suspendus et immédiatement captivants. Même lorsqu’il les étire en marchant sur les traces de Steven Wilson (Talking Loud ; Move, Try, Do…), le compositeur respire avant de poser ses bagages instrumentaux sur des paysages plus dépouillés et sauvages, entre nature aride et oasis revigorante (Presque une île, Unfair Trade). Il y a ici une preuve du temps méticuleusement passé sur chaque instrument, sur chaque détail apte à créer un univers totalement inédit et rassurant, dans lequel on se sent immédiatement à l’aise mais qui demande également une vraie concentration pour en découvrir toutes les pépites ainsi que l’énergie déployée (A Cute Fist Fight, Empty Life and Full Moon).
Si l’on ne devait garder à l’esprit qu’un seul groupe dont l’image se confondrait avec celle de Manolo Redondo, ce serait sans aucun doute Shearwater (en dehors de la ressemblance vocale entre les deux projets), même si l’esprit de « A Drop About to Drown » s’éloigne de cette illustre comparaison pour voler de ses propres ailes au fur et à mesure des écoutes. Ici, les impressions se mêlent aux sensations, aux surprises et à la beauté de lieux encore sur le point de s’épanouir. En acceptant de son plein gré sa formidable originalité et son sens aiguisé de le construction de titres tous plus impressionnants de maîtrise les uns que les autres, le musicien se lance à corps perdu dans une quête de l’humanité ; la sienne bien sûr, mais aussi celle, plus universelle, de l’être lui-même. Chaque chanson devient alors la goutte d’eau qui abreuve et permet à la vie d’éclore, le long de chemins acoustiques sensitifs et regorgeant de vitalité, le tout dans un besoin de perfectionnisme allié magnifiquement à l’immédiateté des sentiments. Une bouffée d’oxygène plus que bienvenue.
Gageons que nous suivrons les pérégrinations de Manolo Redondo pendant encore de nombreuses années, tant cet album est addictif et remarquable.
« A Drop About to Drown » de Manolo Redondo est disponible depuis le 25 mai 2015 chez Microcultures.
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