[LP] Mademoiselle K – Hungry Dirty Baby

Mademoiselle K nous revient enfin après un silence frustrant, parsemé d’interrogations sur les rumeurs devenues rapidement certitudes d’un nouvel album en anglais.

Mademoiselle K - Hungry Dirty Baby

Absence qu’on lui pardonnera volontiers. Car cet écart de bonne conduite auprès de ses fidèles de la première heure et d’une nouvelle fan base qui ne se connaît pas encore, en France comme à l’international, nous permet de retrouver une Katerine en mode trio réinventée, revivifiée, entière et en même temps transfigurée. Avec un disque punchy et punky où l’on se sent comme à la maison, sans déraison.

Il y a quelques mois, Mademoiselle K avait le choix entre simplement claquer des doigts et monter le son ou claquer la porte pour aller faire ce qui lui plaisait. Se sentant à l’étroit dans son jeans usé par les mêmes scènes, les mêmes promos, les mêmes artifices de l’univers musical et prête à donner de la voix afin d’ouvrir sa voie à l’étranger pour porter ses portées hors de nos frontières, elle est retourné (un peu) à l’école et a (beaucoup) amélioré son anglais dans le but de donner vie à toutes ses nouvelles compos qui déménagent et la démangent.

Le confort, ce n’est pas son truc. Faut que ça bouge, que ça se remette en cause pour qu’on en cause aux quatre coins de la planète. Mademoiselle K veut être universelle dans le macrocosme des scènes obscures occidentales ou orientales. Et cette nouvelle orientation, qui n’a en aucun cas pour but de nous désorienter, nous amène tout naturellement vers un nouvel album où tout se modifie sans changement rédhibitoire .

Prenez cette ouverture d’album qui martèle et nous atèle aux douze titres dont nous ne sommes pas prêts de décrocher. « I Can Ride A Fucked Up Bull » nous met d’emblée un coup de boule qui fait du bien, car ce KO au premier round présage (tuméfié) d’un chaos tout le long d’un LP promis à sonner comme un OK sans hoquet. La patte griffée et acérée de Katerine est bien là, on la sent confortable derrière sa basse pour une messe tout en anglais au cours de laquelle elle n’en perd jamais son latin. Elle expire dans la langue de Shakespeare et nous retenons notre respiration pour ne louper aucune parole ou note de musique. Virage musical dont nous avions eu un avant-goût avec le clip « Glory », second morceau de l’album et deuxième vidéo après « R U Swimming? ».

Sonnant comme un hymne, presque une revanche, le titre est un vrai rallye qui rallie au passage tous les curieux s’étant postés sur la nouvelle route à suivre de Mademoiselle K. Un morceau qui roule à tombeau ouvert, à déguster en sirotant un cercueil. On nage de bonheur dans l’eau fraîche de « R U Swimming? ». Dans le grand bain bien sûr. Aux tonalités brit pop punk des 80’s façon Jam ou Joe Jackson, on croule sous le crawl de la mélodie qui donne de bons coups d’épaules comme pour nous inviter à pogoter. Avant que le morceau qui porte le titre de l’album (ou l’inverse) nous fasse nous poser quelques instants pour mieux écouter et entendre les revendications de Katerine, qui s’en fout d’être célèbre et préfère régler d’abord ses problèmes amoureux avec un mot ritournelle qui la condamne à ne pas être entendue sur les ondes.

Qui sait du coup si « Hungry Dirty Baby » ne deviendra pas le morceau de demain qu’on s’enverra par timidité quand on voudra chopper ? Avant d’arriver à l’intimité d’un « Love Robots », titre qu’on plisse dans l’oreiller pour le partager avec son complice avant que la vie ne devienne un supplice ou un simple caprice. Lorsque Mademoiselle K nous répète, dans « Walk of Shame », qu’elle est une blushing machine, on se dit qu’elle serait plutôt une machine à rugir et qu’elle s’est peut-être laissée aller à baisser un peu les bras sur une chanson qui pourtant nous tombe dessus à bras raccourcis.

Frais et presque primesautier, il permet de débrayer plus facilement sur « Ur Wow », le slove de l’album où les joues se rapprochent et la chaleur des corps se fait encore plus moite. Un cri du cœur pour un écrit des corps qui s’abandonnent dans une mélodie indolente. Telle une Daltrey des années 2015, Mademoiselle K en appelle avec tact à notre tactilité dans le presque Summerien « Watch Me ». Touch me, Feel me ; un morceau définitivement dans l’heure du temps. Le drôle de titre qu’est « Laaa La » ne doit pas vous distraire de cette piste de l’album qui en emprunte plusieurs, lorgnant soit du côté de Franz Ferdinand, soit des Ting Tings. Un morceau qui déroute mais vous envoûte dans un système comme si vous étiez sous LCD.

« Morning Song » permet de reposer la voix de Katherine tandis qu’elle se défoule sur sa basse, plus encline à affronter la foule dans un titre plein de « ahahah » et de houle. Sans doute le morceau « vilain petit canard » de l’album que l’on s’empresse d’écouter avant le sublime, complexe et très inspiré « Someday ».

crédit : Iris Della Roca et Lou Levy
crédit : Iris Della Roca et Lou Levy

Pour sa rentrée, Mademoiselle K nous fait une sortie d’album triomphante, en ayant pu installer un nouveau langage, de nouvelles connivences avec un public qui la touche et qu’elle veut toucher. Nous serons au premier rang lors de sa nouvelle tournée imminente où nous n’hésiterons pas à lui clamer des « Thank you ! » d’amour.

PS : Il existe sur l’album un morceau caché, en français, intitulé « C la mort ». À vous de mériter de le découvrir en écoutant « Hungry Dirty Baby » dans son intégralité !

« Hungry Dirty Baby » de Mademoiselle K, sortie le 19 janvier 2015 chez Kravache.


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Nicolas Nithart

grand voyageur au cœur de la musique depuis plus de 20 ans