Une vague hip-hop souffle sur la scène John quand Lotti démarre. Deux Havraises sur scène, une seule et même histoire. Tantôt mélancoliques, amoureux, sensibles, mais toujours sincères, les mots tombent justes et précis teintés de neo soul et de RnB. À force de détermination, Lotti va chercher un public qui ne la connait pas et pourtant, quand elle lui demande à la fin « Et toi, t’aurais envie d’aller où ? », tout le monde reprend en cœur « Hollywood ».
- Beauregard c’est ton premier festival ?
Presque, on a joué à l’Armada de Rouen, mais avec Beauregard, ce sont mes deux plus grosses scènes. C’était trop bien, bon feeling. Intense parce qu’on est deux et qu’on doit aller chercher les gens, mais j’adore ça et je trouve que ça s’est bien passé, il y avait vraiment une bonne ambiance.
- Est-ce que tu as déjà été festivalière ?
Adolescente, j’allais à Tours au festival Terres du Son, tous les étés avec mes potes, mais Beauregard, je ne l’ai jamais fait.
- C’est quand même un peu la classe d’y aller pour la première fois et directement sur scène.
Oui, c’est vrai, mais tu vois, ça m’a donné l’envie d’y aller en tant que festivalière. Pas impossible que je sois là l’année prochaine si la prog est cool.
- Quand est-ce que tu t’es dit : OK, ça commence à décoller, j’ai envie d’en faire mon métier ?
On prend un peu les choses comme elles viennent depuis deux ans. On ne s’est pas vraiment posé de questions, on a sorti 5 titres sur le projet « Dalva » qu’on a monté dans une coloc à Paris et 2-3 semaines plus tard on faisait la première partie de Chilla, et après les live sont arrivés un peu comme ça. On ne fait de prospection, on a des lives qui tombent dans la boite mail et on est hyper reconnaissantes. Du coup-là, on est en création et en live en même temps, c’est un nouveau processus.
- À quoi ressemble ton processus créatif ?
Si notre EP « Dalva » ne compte que cinq titres officiels sur les plateformes, en live on teste d’autres morceaux et il y a donc pas mal d’exclu.
C’est en rencontrant Doom’s (manager), qui est là, et qui a un studio dans lequel on bosse tous ensemble. On fait beaucoup d’instru à six mains, car je tends vraiment à créer un univers un peu particulier, ce qu’on fait ce n’est pas que du rap. Ce n’est même plus du rap, je pense. Ça tend vers le hip-hop, le RnB et la pop urbaine. Pour moi, c’est important de poser les choses musicalement. J’ai besoin d’être hyper inspirée puis on fait la prod tous ensemble, j’écris mon texte, je chante et parfois on remanie les prods pour le live. Il y a trois beatmakers en tout sur ce projet.
- Quel est ton rapport à l’écriture ?
Quand j’étais petite, j’écrivais souvent des trucs : des nouvelles, des poèmes, et le goût de la lecture m’ont été transmis par mes parents. Mais pour moi, c’est vraiment la musique. J’écris parce que texte plus instru, pour moi ça produit un univers complet qui me plaît. J’ai du mal à me cantonner à un truc qui me plaît dans la vie et ça me permet d’en combiner déjà deux.
- En plus après tu as le live, donc on peut dire que ça fait trois.
Exactement, et en plus après tu peux réaliser tes propres clips ; ça fait quatre. Faire ton propre stylisme ; ça fait cinq. L’univers de la musique me permet de m’épanouir dans beaucoup de choses. Je me sens hyper chanceuse d’avoir trouvé la musique, car cela me permet d’explorer plein de choses que j’aime.
- Tu peux nous parler du clip de ton titre « Hollywood » ?
Je l’ai écrit et co-réalisé avec Hannah Papacek Harper. On a bossé main dans la main et j’ai engagé que mes potes. C’était un des buts de ma vie en vrai, pouvoir travailler avec mes amis, ça et faire plein de trucs en même temps.
- Comment tu envisages le fait d’être une femme sur scène aujourd’hui ?
Écoute, je l’envisage bien parce que personnellement je ne suis pas de celles à qui cela va mettre des bâtons dans les roues. Le simple fait d’être moi, c’est-à-dire une femme qui chante, qui essaie de s’imposer dans cette industrie, qui est libre, ma condition de femme aujourd’hui, elle ne me freine en rien. En revanche, j’ai conscience que ce n’est pas le cas de tout le monde. J’ai été éduquée de manière très forte, romantique active. Chez moi, les femmes, elles ne se laissent pas marcher sur les pieds. Je bosse avec beaucoup d’hommes, mais je les dirige plus qu’ils ne me dirigent.
- Quelle est ta relation avec ta santé mentale ?
J’adore la psychologie. Tout le monde a des angoisses, des élans de tristesse comme de plein pouvoir. Je sais que j’ai un ego assez gros pour dépasser tout ce qu’il se passe à l’intérieur de moi. On le retrouve dans mes textes. J’ai lu un livre intéressant justement, ça s’appelle « L’Art de la thérapie » de Irvin Yalom ; c’est un thérapeute de Brooklyn qui passe en revue plusieurs exemples à travers les histoires de ses patients. On apprend beaucoup sur soi et les autres.
- Trois chansons que tu écoutes en ce moment…
« A rose in Harlem » de Teyana Taylor
« Island in the Sun » de Weezer, c’est un peu toute mon enfance.
« Nubian Farlow » de Varnish la Piscine. Il produit des rappeurs suisses et là, c’est son projet solo que je trouve très réussi.
- Une chanson avec le mot « vie »
« Reste en vie » de Luidji
- Un livre à lire
« Dalva », le nom de mon EP est nommé ainsi en référence à « Dalva » de Jim Harrison. Considéré par beaucoup comme un hymne à la vie et la preuve que l’on est ce que l’on fait, une invitation à la sculpture de soi, le livre raconte l’histoire de Dalva qui découvre l’histoire de sa famille liée à celle du peuple sioux et de l’Amérique violente quand elle s’installe dans le ranch familial au Nebraska.
Je pourrais aussi te citer « Cent Ans de solitude » de Gabriel García Márquez et « Ask the Dust (Demande à la poussière) » de John Fante, un roman semi-autobiographie qui se passe à LA.
- Merci Lotti pour ces recos, on va aller écouter tout ça. À bientôt.