[Live] LCD Soundsystem aux Nuits de Fourvière

Pour cette édition 2018 des Nuits de Fourvière, le mythique festival qui a lieu tous les étés de juin à fin juillet dans les amphithéâtres romains de Fourvière sur les hauteurs de Lyon, nous avons la chance d’assister à une bonne dizaine de concerts. Un des concerts les plus attendus de cette édition était celui de LCD Soundsystem, rare en France (deux dates à Paris sur cette tournée), qui poursuivait la promotion de son quatrième album studio « American Dream ».

crédit : Tore Sætre

Le concert avait beau être sold out depuis des mois, la météo désastreuse de ce début juin à Lyon en aura découragé par dizaines, et des places d’occasion s’échangeaient à des prix défiants toute concurrence jusque quelques minutes après l’ouverture des portes. Néanmoins, si la foule n’est pas très dense près de deux heures avant le début du concert – ce qui permet à quelques warriors encapuchonnés dont nous faisions partie d’être au premier rang, légèrement protégés du déluge qui s’abat sur l’amphithéâtre. Sur scène, énormément d’instruments protégés et dissimulés sous des bâches noires. Pas un chat, et un énorme compte à rebours qui semble annoncer un début ou une fin de concert très lointain, plus de 3h30 à s’écouler. Pourtant, musique il y a, un set de dance / techno / house pas désagréable pour nous faire patienter sous la pluie, et visiblement signé Shit Robot. Il nous faudra presque l’intégralité de son set pour remarquer qu’il était en fait sur scène tout le long, mais tout au fond et caché par les instruments entre deux colonnes romaines. Curieux. On se demande un peu ce que ça fait de jouer pour un public qui ne sait même pas que vous êtes là.

Le chrono affiche environ 2h15 restantes lorsque LCD Soundsystem prend place sur scène, ce qui annonce un concert aux dimensions exceptionnelles pour les Nuits de Fourvière. Rien qu’à cette idée, une bonne partie du public frémit d’excitation et hurle de joie alors que le groupe (nombreux) de James Murphy prend place sur scène et que les instruments sont déballés, surplombés par la plus imposante boule disco que nous n’ayons jamais vue. Et dès les premières notes de « You Wanted a Hit », on a compris que le concert serait dantesque. Pluies diluviennes, rafales de vent et dance-rock de haut niveau joué à un volume indécent (les basses !) mais avec un mixage absolument parfait. Le crescendo hystérique d’un des meilleurs morceaux du troisième album du groupe nous fait entrer de manière impériale dans l’univers à la fois frénétique et mélancolique si particulier des New-Yorkais, et Murphy, touchant nounours de 48 ans, est particulièrement en forme. Après cette ouverture magistrale de près de 10 minutes, le groupe enchaîne avec un tube plus resserré mais tout aussi efficace, « Tribulations », de son premier album. Le public chante ces « Haaa-haaaa ahhh ahhh » en chœur, comme réconfortant pour faire oublier un peu plus les conditions, mais le groupe est suffisamment impressionnant et hypnotique pour s’en charger tout seul.

La pluie n’existe plus, seule compte cette alchimie de disco et de post-punk qui s’avère particulièrement propice à nous rendre tous dingues. Rapidement les ponchos volent, les gens se dénudent sous la pluie pour danser, communier, s’abandonner un peu plus dans cette orgie délirante. Le groupe puise dans ses quatre albums en proportions assez équitables, les deux derniers légèrement plus en avant et le second (et pourtant meilleur album du groupe) légèrement oublié. Se succèdent ainsi des ballades plaintives « I Can Change » (avec une intro piquée à Kraftwerk pour l’occasion), des furies dance-punk « Daft Punk is Playing at my House », « Yr City’s a Sucker », « Get Innocuous ! » et des hymnes imparables d’hier « Someone Great », et d’aujourd’hui « How Do You Sleep », qui conclut le set principal. Il reste alors plus de trois quarts d’heure sur le compte à rebours, le groupe annonce qu’ils vont faire semblant de partir et revenir jouer quelques morceaux, la tempête fait rage et on se prend à frissonner un peu maintenant que la musique s’est arrêtée. Ils ont joué 14 morceaux, la plupart autour de 7-8 minutes de durée, et une reprise incroyable de Chic, « I Want Your Love », assurée principalement par la magnifique claviériste Nancy Whang, deuxième star du groupe.

Retour sur scène après la pause demandée par l’amer et violent « How Do You Sleep ? » (sommet incontestable de leur dernier album). On commence en douceur avec la jolie ballade « Oh Baby », une de ces chansons langoureuses typiques des plaintes amoureuses de James Murphy, et la fin du concert aligne coup sur coup les imparables « Emotional Haircut », avec ses chœurs sardoniques, puis « Dance Yourself Clean », le tube énorme de « This is Happening », dont le beat central suffit à vous fracturer la colonne vertébrale tant il est puissant, et enfin le merveilleux « All My Friends », attendu comme le messie et accueilli par un mouvement de foule hystérique qui se met à patauger joyeusement dans la mare qui s’est formée peu à peu dans la fosse, arrosant copieusement les trois premiers rangs qui étaient encore à peu près secs et se retrouvent désormais trempés de l’os des pieds jusqu’aux fesses (merci les gars, vraiment.). Néanmoins, malgré cette désagréable et humide surprise, le morceau conclut avec superbe un concert époustouflant en tous points et d’une générosité inégalable. Petit bémol frustrant : à cause de la pluie, le groupe a commencé en retard, et il reste encore une petite dizaine de minutes sur le compte à rebours, soit largement de quoi revenir et jouer le grand absent de ce concert, le chef d’œuvre « New York I Love You, But You’re Bringing Me Down », qui conclut certains de leurs meilleurs concerts et qui aurait été la cerise sur le gâteau, le sésame pour faire de ce concert un des meilleurs de toute notre vie de mélomane acharné. Mais non, le groupe ne reviendra pas, il est presque minuit, la météo est toujours aussi affreuse et l’euphorie commence peu à peu à se dissiper. Inoubliable.


Retrouvez LCD Soundsystem sur :
Site officielFacebookTwitter

Photo of author

Maxime Antoine

cinéphile lyonnais passionné de musique