[Interview] Kid Wise

Ils sont aujourd’hui six musiciens à donner leurs lettres de noblesse à une jeunesse bouillonnante d’envie et de folie. Moins sages qu’à leurs débuts, mais toujours aussi jeunes dans leur tête, nous avons rencontré Vincent, guitariste et Nathan, bassiste du projet Kid Wise lors du festival Fnac Live à Paris le 20 juillet 2014. L’occasion d’aborder entre autres l’évolution musicale et narrative du groupe, l’écriture et l’enregistrement de leur premier album à paraître en 2015 sans oublier la scène, leur véritable exutoire artistique.

Kid Wise © Solène Patron

  • Vous êtes passés du studio à la scène avec des concerts en France et récemment en Suisse. Est-ce que la scène vous permet d’aller plus loin dans vos morceaux ?

Vincent : Oui, les morceaux en studio sont réalisés avec beaucoup d’arrangements, de précision et de détails qu’on ne peut pas reproduire sur scène. Par exemple sur le dernier EP, il y avait un orchestre presque symphonique. On a retravaillé ces parties avec des guitares, ce qui donne des sons plus percutants, plus dynamiques. On va dire que les morceaux du CD sont « sages » et sur scène ils deviennent « sauvages ».

  • Est-ce que ça ne change pas un peu le style, ça ne devient pas un peu plus rock ?

Nathan : Oui effectivement, il y a une énergie, parfois même punk dans la gestuelle, dans le son. On retravaille aussi les structures pour le live qui ne sont pas forcément les mêmes que sur l’album.

  • C’est une redécouverte alors pour le public…

Vincent : En fait, on veut que le public redécouvre nos morceaux, que les gens qui viennent nous écouter retrouvent certaines choses, mais en découvrent d’autres sur scène. Un peu comme les groupes qu’on adore, tel que Radiohead, Sigur Rós, on pense connaître les morceaux et quand on les voit sur scène, on se dit qu’en fait il y avait des choses qu’on n’avait pas calculées et on en ressort changé. On essaye de faire la même chose, mais à plus petite échelle (rire).

  • Kid Wise a-t-il déjà trouvé son public ?

Vincent : Je ne sais pas si on peut dire qu’il y a un public qui nous suit, parce qu’on n’a pas encore fait plusieurs concerts au même endroit. Mais par exemple, à Garorock, j’ai rencontré des personnes qui étaient venues le samedi spécialement pour nous voir. Je leur ai dit « Mais il y a aussi Fauve, d’autres groupes programmés… ». Mais ils m’ont répondu qu’ils nous avaient vus dans un petit bar à Rennes, où il y avait 70 personnes et qu’ils tenaient absolument à nous revoir. C’est assez impressionnant.

Nathan : On est un jeune groupe alors c’est difficile d’évaluer s’il y a vraiment un public. J’ai le sentiment que c’est en train de se mettre en place. À chaque fois, qu’on joue en concert, on rencontre de nouvelles personnes. Mais c’est normal, car, à part Paris, on n’a pas joué plusieurs fois dans la même ville.

  • Vous avez annoncé en juin sur votre page Facebook que vous aviez terminé votre album.

Vincent : Il n’était pas terminé quand on l’a annoncé. En fait, il est fini depuis la semaine dernière.

  • Et quel est son nom ?

Vincent : L’innocence

  • Quand sortira-t-il ?

Vincent : On espère tout début 2015, mais nous n’avons pas de date précise aujourd’hui.

  • Dans cet album, abordez-vous toujours les thèmes autour de la jeunesse avec ses multiples facettes ou avez-vous évolué depuis ?

Vincent : On a composé l’album de manière innocente, d’où son nom. Il parle toujours de la jeunesse, mais d’une manière différente, plus poétique, car on avait plus de temps pour s’exprimer. L’album parle de la jeunesse, mais au travers d’images et d’instants vécus. Cet album, c’est comme un polaroid de notre enfance à tous les six.

  • L’écriture de l’album s’est faite à 6 mains ?

Nathan : Pour la musique en partie. Ça dépend des titres, chacun a eu une part plus ou moins importante dans la composition. Au niveau des textes, c’est Augustin qui s’en est chargé. Il adore écrire et comme c’est le chanteur, c’est bien qu’il ajoute sa touche personnelle.

  • Mais vous avez dit que l’album était le polaroid de ce que vous avez vécu. Est-ce que vous avez apporté des idées au niveau des textes ?

Nathan : Oui, ça arrive qu’on apporte des idées qu’Augustin retravaille par la suite. J’ai écrit quelques textes, Clément aussi. Mais on n’a pas vraiment de lignes conductrices…

Vincent : C’est l’anarchie… une anarchie contrôlée (rire)

Nathan : Je n’irais pas jusque-là, mais tout se passe sur l’instant, quand ça vient. Et c’est un peu pareil dans le processus de composition instrumentale.

Vincent : En fait, on travaille la voix comme un instrument à part entière. En studio de répétition, on va trouver une idée musicale forte, Augustin, lui va avoir une ligne de chant dans la tête. Il va y poser des mots qui lui viennent de manière naturelle et qu’il va retravailler par la suite pour en faire quelque chose de construit.

  • Cet album donne-t-il lieu à des collaborations ? Par exemple, aux Vieilles Charrues, vous avez fait un morceau avec Disiz.

Nathan : Oui, c’était un peu la surprise, car on ne savait pas qu’il viendrait. On ne l’avait encore jamais rencontré et une heure avant de monter sur scène, il est venu, on a discuté et en un quart d’heure, on a pris la décision de faire ça ensemble. Il est monté sur scène, on n’avait rien préparé, pas répété ensemble et c’était juste phénoménal. On l’écoute depuis des années et le fait qu’il soit sur scène avec nous, c’était incroyable. Sur l’album, il y a eu deux collaborations. La première avec un artiste iranien, Mohammad Mousavi, à qui on a laissé carte blanche pour un interlude au milieu d’un morceau. Il nous a envoyé sa composition par internet depuis l’Iran. C’est un morceau très émouvant, mêlant guitare et voix de son père qui est chanteur religieux. Ça respire l’Orient et c’est juste majestueux.

Vincent : Il a travaillé dans des conditions particulières, car je ne suis pas sûr que dans son pays, il ait le droit de jouer autre chose que de la musique religieuse. Il a donc fait ça dans sa chambre. À la première écoute, il y a eu une décharge d’émotions tellement forte que j’en ai pleuré. On aimerait qu’il vienne un jour sur scène.

Nathan : La deuxième collaboration, c’est l’amoureuse d’Augustin qui apporte une touche de féminité sur l’avant-dernier morceau de l’album. Comme il le dirait lui-même, c’est le symbole de l’innocence retrouvée.

Vincent : Elle s’appelle Matilda et elle chantait dans un groupe qui a splitté. Elle a rencontré Augustin, puis elle est venue chanter. C’est arrivé en fin d’album, c’était complètement inattendu, et ça a apporté de la fraicheur et de la sensualité.

  • Est-ce qu’on retrouve le côté expérimental dans l’album ?

Vincent : Le passage le plus expérimental sur l’album est le morceau de Mohamad. Tout ce qui est expérimental se passe sur scène. On se donne une part d’improvisation, ce qui fait que chaque concert est unique. On est comme des jazzmen. Du coup, notre petite « fan base » qui viendra nous voir deux fois en concert verra deux choses différentes. Un jour, on fera une impro de 2 minutes, une autre fois, même si pour l’instant ça n’est jamais arrivé, on fera une impro de 10 minutes. L’expérimental reste sur scène pour l’instant.

  • Le style musical de Kid Wise a-t-il évolué avec cet album ?

Nathan : Au fur et à mesure que le groupe existe, une forme de maturité s’est installée. La façon de composer a évolué également.

Vincent : Le premier EP de Kid Wise était électronique, le second EP était organique. L’album qui va sortir sera un hybride de tout ça.

  • Combien de temps avez-vous mis pour réaliser cet album ?

Nathan : On avait peu de temps pour composer l’album avant d’entrer en studio. Mais on a eu la chance de travailler avec Serge Faubert, le père de Leo le batteur, qui connaît bien notre musique. On a pris le temps nécessaire. En tout, on a fait 30 jours de studio et 30 jours de mixage, donc beaucoup de temps de mixage, et plusieurs versions pour arriver à ce qu’on souhaitait.

Kid Wise © Solène Patron

  • Est-ce que vous pouvez nous parler de votre collaboration avec le Laboratoire de Curiosités ?

Nathan : En fait, on les aime. Ce sont eux qui sont à la base de tout. Je suis le dernier à être arrivé dans le groupe, en février 2013. Le Laboratoire de Curiosités nous a proposé de venir jouer à Paris, c’était mon deuxième concert avec le groupe. On a fait deux concerts à Paris, dont un en appartement en acoustique. Le Labo nous a permis de rencontrer nos managers, Mickaël et Quentin, et de fil en aiguille, tout s’est enchainé. Du coup, on est très heureux et très fiers de les retrouver aujourd’hui au Fnac Live.

Vincent : Ce projet a marqué un tournant pour tout le monde, pour le groupe, pour les gens qui nous entourent. Même pour le clip, les acteurs qui n’en étaient pas, ont eu des propositions. Pour les réalisateurs, idem. Ils nous ont contactés pour le plaisir puis ils ont eu plein de propositions. C’est une chance extraordinaire de les avoir rencontrés.

  • Finalement, Kid Wise, ça n’est pas contradictoire ? La sagesse normalement vient avec l’âge.

Nathan : Oui, mais sage c’est aussi ne pas faire de bêtises. Mais on se dit en fait qu’on est de moins en moins Wise.

Vincent : Théo, notre guitariste, nous a dit une phrase qui nous a fait beaucoup rire : le fossé entre Kid et Wise se creuse de plus en plus. Finalement, on devient de plus en plus enfant, fou et un peu débile. La sagesse, on la laisse un peu de côté.

Nathan : Oui et quand on est nombreux et qu’on fait beaucoup de kilomètres, ça fait du bien de dégoupiller un bon coup. Mais on essaye d’être beaucoup plus sage quand on travaille notre musique.


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Sylvie Durand

Curieuse, passionnée par les voyages, la musique, la danse. Par tout ce qui aiguise les sens.