Parmi la multitude de sessions live qui fleurissent sur la Toile en cette période de confinement, l’une d’elles a retenu notre attention et, depuis, ne nous lâche plus. Kaagari a décidé de nous offrir un titre inédit dont la captation en noir et blanc nous invite à savourer ses mouvements trip-hop et, ainsi, à nous sortir de notre torpeur. Un rêve éveillé nous permettant de traverser les murs et de profiter du ciel, de parler aux fantômes parcourant notre planète à l’arrêt.
Impossible de rester de marbre en regardant et écoutant « Toktime ». Dès son entrée en matière rythmique, le titre de Kaagari nous voit perdre nos moyens et nos facultés de résistance. Les cervicales se mettent en mouvement, lentement, la tête nous tourne, notre regard s’immobilise et scrute l’écran. La cadence musicale berce nos secondes et modifie le temps, tel qu’il est ; un nouveau schéma pour affronter les jours sans que ces derniers n’aient l’air de se ressembler. Tout comme « Toktime », d’ailleurs : car plus l’écoute se répète, plus notre vision paraît différente, obsédée par la conjonction des mélodies, des sonorités spectrales murmurant à nos côtés et, plus que tout, de la voix de Kaagari, surpassant dans son interprétation l’effet de distance qu’elle utilise pour renforcer les ambiances instrumentales.
Autour de nous, tout devient monochrome. Seule source de lumière, Kaagari nous fixe, parfois, afin de mieux nous posséder. Le départ qu’elle espère dans ses paroles est une réalité, même si elle doit demeurer spirituelle ou fantasmée. Dans les brumes du plaisir et du mystère, notre corps s’adapte aux impulsions salvatrices de « Toktime ». Nous sommes ailleurs. Nous sommes-nous-mêmes.
