[LP] K! – La femme en boîte

Comédie dramatique douce-amère imprégnée d’humour noir, de déclarations d’amours égarées et de regrets qui, finalement, n’en sont pas, « La femme en boîte » de K! est un opus incomparable, une histoire des dérives humaines, du meurtre au désir, de la mort à l’espoir infime de sortir de l’abîme. Un chef-d’œuvre d’ironie et de passion.

« La femme en boîte ». Rien que le titre du premier album de K! est un mystère à lui seul, s’offrant à une multitude d’interprétations. Pour nous, cette boîte dont il est question, et qui prédomine dans chacune des syllabes de la musicienne, c’est cette collection d’anecdotes, de contes cruels valorisés par des instrumentations aussi fortes que précises, compléments indispensables au propos que l’on découvre en quarante minutes acides, amères et désabusées. Mais K! n’en oublie pas pour autant de nous faire ressentir, grâce à une dérision jamais complaisante mais subtilement intrusive, des sensations de déjà-vu, des illustrations musicales d’échecs, de tortures mentales et de leurs conséquences, plus ou moins bienheureuses ou, au contraire, traumatisantes. Une thérapie de choc, mais baignée d’une douceur confidentielle qui nous fait aimer ces mots, ces mélodies, cette femme sans limites et à l’imparable honnêteté.

L’album s’ouvre sur un extrait de « L’homme qui aimait les femmes » de François Truffaut, la voix inoubliable de Charles Denner argumentant, à contre-emploi, les terrifiantes images qui vont suivre. Car l’être féminin est au centre de ces comptines acérées, aiguisées comme les couteaux vengeurs et les objets du quotidien devenus des armes meurtrières sur « L’adultère ». Dès lors, « La femme en boîte » se nourrira des pulsions, des défauts et des lacunes qui font de la relation et de l’identité un chemin pratiquement impossible à parcourir d’un bout à l’autre, l’influence de parasites inattendus venant, sans crier gare, percuter le bon vouloir de sa créatrice. « J’ai marché sur des têtes, j’ai couru à l’envers / et j’ai mis en brochette mon cœur et mon derrière », confesse K! sur l’hypnotique et ravageur « Le chemin ». Plus loin, elle confesse l’attirance sexuelle et sentimentale érigée en extase grâce à « Entre mes jambes », quand la substance résume le plaisir, ses origines et ses issues, fatales ou méritoires. Ne sombrant jamais dans une crudité gratuite, elle s’émeut de ces petits riens qui font toute la différence, de ces hontes qui n’en sont pas et bousculent les codes trop lisses et propres d’une bienséance à la ramasse. Les chœurs masculins de « La femme en boîte » prolongent la beauté effacée par l’animalité, avant que « C’que j’étais belle » ne sème le doute, l’interrogation du physique et de ses impressions artificielles, tandis qu’il est si simple d’être soi et que le temps est compté, la solution pouvant sourire là où on ne l’attend pas. S’achevant sur les dissonances cathartiques de « Dors », soulagement et rédemption mérités et, finalement, réels, l’album se dilue mais laisse en nous une marque cuisante, puissante et obsédante.

Mère nourricière de nos refoulements sentimentaux et psychiatriques, de nos peurs paralysantes et de nos forces cachées, K! se mue en un symbole libertaire, une statue dressée sur le sol meuble d’une écriture souvent trop sage et idyllique. « La femme en boîte » est une pièce aigre et savoureuse, une boisson alcoolisée aux effets secondaires déroutants et splendides.

« La femme en boîte » de K! est disponible depuis le 2 mars 2018 chez La Couveuse / Differ-Ant / Believe.


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Raphaël Duprez

En quête constante de découvertes, de surprises et d'artistes passionnés et passionnants.