[Live] Jack Savoretti aux Étoiles

Les Étoiles sont posées entre des échafaudages, des boutiques et des cafés. Château d’Eau, fief de la gentrification. Sa vie nocturne est celle d’un quartier contrasté, peut être irrité. Les gens et les regards se croisent. La rencontre deviendra-t-elle un combat, quand certains habitants seront poussés aux périphéries ? Dans cet espace trouble, Jack Savoretti a amené un chant fédérateur et une musique dansante.

Jack Savoretti © Solène Patron
Jack Savoretti – crédit : Solène Patron

Trois albums et des EPs. Longtemps, déjà, que Jack Savoretti transporte sa musique à travers les USA et le monde. Quasiment inconnu en France il y a quelque temps, il se révèle aujourd’hui comme le folk-rock qui peut faire lever les foules. « Written in Scars », riche de vingt titres, est sorti à l’automne dernier. On y repère tout de suite le caractère : écorché mais gentil. L’album a son charme, mais celui-ci ne peut complètement résonner que sur scène. Tels les musiciens de rue, Jack Savoretti écrit une musique qui ne peut trouver son écho que face au vide, face à la foule.

Il a le chant graveleux. Où coulent les ruisseaux fiévreux. Où roulent les roches des mondes et des merveilles. C’est cette voix qui marque le plus. Elle a l’impact des frondes, mais l’aura des sages. Elle semble porter le terrible et la fougue dans le même instinct. Il y a aussi l’idée du contrepied. Ténébreux, mais tellement heureux. De la même façon, Jack Savoretti pourrait être un gentil garçon qui joue aux méchants, ou bien l’inverse. Pourtant, très vite, au fil du concert, on s’aperçoit que la sincérité émane de cet homme. Certains médias se sont questionnés sur sa filiation musicale avec Bob Dylan, mais il n’y a pas que de ça. Jack Savoretti n’a pas seulement la volonté de marcher sur les traces d’un prédécesseur, d’une étoile sûrement inégalable. Il traverse les terres en se frayant son propre chemin. Alors, il évolue sur un terrain aux mille facettes. Il a cette volonté d’aller chercher les différents horizons. Les différentes pulsions. Les différents courants. Au lieu de suivre les grands, il a l’audace de dresser des ponts entre leurs richesses.

Accroché à sa guitare comme si elle était son cœur et ses poumons, Jack Savoretti livre un peu plus d’une heure de musique. S’il porte toute l’histoire avec sa voix, l’impulsion musicale provient très certainement de ses deux compères. Un bassiste au charme groovy. Un batteur à la percussion enjouée. Entre les trois résidents, une incroyable alchimie qui se traduit par d’abondants sourires. Cascade de bonheur. Et c’est ici que se trouve la magie du concert. Au-delà de l’abîmé folk-rock, l’atmosphère se crée par une communion. Tout d’abord sur scène, elle emportera finalement la salle. Dans cet tornade calme, Jack Savoretti a la particularité de faire de chaque titre des tubes. De chaque mélodie, une parole entêtante. Les refrains se conçoivent comme des slogans à l’écho fédérateur. Ils cognent dans les têtes comme ils y dansent. Il y a quelque chose de démentiel et de pulsionnel. Face à Jack Savoretti, le public fait corps avec la musique.
Le concert sera ouvert par le si politique « Written In Scars », où le refrain « We are the revolution, we want it all tonight. We want to take back what’s rightly ours » s’accapare comme on monte sur une barricade. Le titre lance un concert vif et dansant. Suivront le nonchalant « Back To Me », l’entraînant « Home » et le doux « Broken Glass ». Au fil des morceaux, la voix se tend, se détend et sourit. À côté, la basse s’échange pour la contrebasse. Le bassiste installe son charme solaire sur la salle. Jack Savoretti parle à son public, comme on raconte ses souvenirs à ses plus proches. Avec beaucoup de joie, de bienveillance, et sans pudeur. Il sera question d’anecdotes, de piano absent et de Bob Dylan. D’ailleurs, ce dernier sera repris, sobrement à la guitare, avec « Nobody ‘Cept You ».
Alors, sûrement que ses albums ont quelque chose de trop attendu, de trop écorchement lisse ; mais, sur scène, Jack Savoretti offre simplement un joli plaisir, frissonnant et dansant. Souvenir d’un soir où les pieds frappent le sol et les mains battent l’air au-dessus des têtes.


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Juliette Durand

étudiante en cinéma, arpenteuse des scènes parisiennes et passionnée des musiques qui prennent aux tripes