[EP] In The Canopy – The Light Through

Allant encore plus loin dans l’exploration des harmonies et orchestrations inédites de leur précédent EP, les Canopiens offrent un disque tout simplement unique et bouleversant.

In The Canopy - The Light Through

Les rencontres les plus belles et précieuses sont toujours le fruit du hasard, la surprise demeurant au centre de l’émotion, de la passion, de l’étreinte avec un corps autant matériel (l’humain) que désincarné (l’art). Si d’aucuns peuvent, selon leur propre aveu, affirmer que les coïncidences n’existent pas, qu’il y a un but précis pour chaque chose, le mystère de la découverte de ce qui est autre demeure présent pour soutenir le contraire et, alors, donner du sens à ce qui n’en a pas. Apporter une vérité et une pureté inattendues, inespérées souvent, alors qu’on lâche prise et que personne, autour de nous, ne semble capable de nous relever. La musique d’In The Canopy, plus qu’une illustration sonore déjà riche et somptueuse, est à elle seule l’incarnation du fantasme quotidien de l’affection, d’un plaisir simple et surprenant qui se présente devant nos yeux à un moment impromptu mais qui, on le devine presque immédiatement, ne nous laissera plus jamais seuls. Autant le dire d’emblée : « The Light Through », leur nouvel EP, est un condensé de beauté et d’intelligence incomparable et délicat, sensible et magnifiquement humain. Un mélodrame qui ne cherche jamais de « happy end » ou de morale. Un dialogue avec la profondeur de l’âme : ses succès, ses échecs, mais surtout les merveilles qui s’y cachent.

Aux apparences dépouillées et admirables de « Never Return », sorti depuis deux ans, succèdent les élans déliquescents et multiples de visages musicaux à la fois paisibles et terriblement expressifs. On écoute ce nouveau disque comme on parcoure les lignes de la main de l’être aimé, alors que celui-ci se repose à nos côtés. Comme on observe, lentement, le visage et les traits d’un frère, d’une épouse, d’un aïeul : en y croisant les regards de l’expérience et du chemin qu’il a fallu gravir pour atteindre les cimes de ces titres aériens et complexes. Entre une évocation baignée de sonorités islandaises et de chœurs atmosphériques menant aux larmes (Opening) ou encore de doux élans de pop-folk scandinave (In The Attic), le groupe dépose ses repères mélodiques comme on couche ses pensées sur le papier d’un journal intime, comme on approche une flamme tremblante de la bougie qui va réchauffer nos esprits en proie au doute. Fouillé et offrant une possibilité illimitée de lectures différentes, « The Light Through » déroule ses orchestrations intimistes et fortes dans une progression infinie de guitares délicates et de claviers lumineux (1, 2, 3, 4 Hands) avant de briser les rythmes grâce au bruit pluvieux de percussions douces et orientales (Crystal Ball), puis de mêler les repères ainsi posés dans une brume poétique éclairée (Keeping An Eye), rayonnante et électrique (The Light Through).

Et, dans ces chants bouillonnants et liquides, dans ces voix claires et multiples, on découvre à nouveau que les frissons viennent bel et bien de cette apparence organique de l’art à la fois mélodique et pictural évoqué par In The Canopy. Nos yeux se ferment pour contempler les aquarelles qui défilent sous nos paupières, les peintures figées dans le temps ; des visages, des paysages, des rues désertes. Mais la sensation de mouvement prend le dessus sur cette immobilité parfaite ; mutation des sens et des émotions, le disque jette sur la toile ses propres couleurs, à grands coups de pinceaux harmoniques justes et osés. Chaque arrangement, chaque instrument se voient ainsi confier la modification du trait, tels des fusains ou les pastels que chacun de nous a découvertes dès l’enfance. Car il y a aussi une innocence latente dans « The Light Through », un besoin vital de passer, en quelques minutes, d’une feuille vierge à une autre recouverte d’encres colorées, traçants les contours et les emplissant de chatoiements, d’éclats éblouissants et réconfortants. Une mutation sensitive et offerte afin de modifier notre vision du temps qui passe ; de lui redonner sa véritable valeur en nous faisant acteurs émerveillés de ces remarquables et savoureux moments d’exaltation autant que d’introspection.

crédit  : Pauline Le Goff
crédit : Pauline Le Goff

Le nouvel EP des Canopiens se boit, enivre et nous offre une intensité spirituelle qui résonne longtemps dans nos membres et nos âmes. Inclassable et inépuisable, il est tout simplement la pièce maîtresse de ce début d’année, et le restera sans doute longtemps, très longtemps.

« The Light Through » d’In The Canopy, sortie le 13 février 2015.


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Raphaël Duprez

En quête constante de découvertes, de surprises et d'artistes passionnés et passionnants.