[LP] FVNERALS – Wounds

Aurions-nous pensé trouver un jour un espace de respiration dans un disque de doom ? Nous retenions jusqu’à présent de ce genre musical des riffs lourds ne décollant jamais, une ambiance de plomb s’étirant sur d’interminables pistes à l’atmosphère poisse. FVNERALS trouble avec talent le tableau. Notre curiosité attisée par un nom laissant croire à un groupe de « trve » metal et une pochette noire de jais laissant peu de place à l’espoir, nous pouvions nous attendre à une démonstration de force brute telle qu’entendue et approuvée dans les œuvres d’illustres confrères ? Notre a priori a été mis à mal et la première écoute a provoqué autant d’interrogations que de frissons.

FVNERALS - Wounds

Depuis 2013, FVNERALS a déjà bâti une œuvre dont la cohérence et la beauté sont époustouflantes : deux EP (« The Hours » en 2013 et « The Path » en 2015) et un album (« The Light » en 2014). Lumière qui paradoxalement et subtilement s’invite en creux dans les compositions tirées vers le haut par la voix sublime de Tiffany Strom en contrepoint des notes saturées de sa basse balisant de pierres anguleuses le chemin parcouru dans les ténèbres à l’écoute de ces sept nouveaux morceaux.

Passé l’introductif « Void », beau et sombre instrumental monocorde nous invitant à nous délester avant ce voyage intérieur, la surprise ne vient pas tant de la pesanteur qui s’abat sur nos tympans que de la délicatesse qui, telle une prêtresse, mène la (black) célébration.
L’éponyme « Wounds » ouvre la voie : arpèges rugueux et pulsations brutes s’entrelacent et lorsque nous nous prenons subrepticement à espérer une proche guérison, nous voici entraînés par le fond, le chant lancinant de Tiffany comme un cri désespéré.

Les plaies dont il est question ici sont béantes et nous remercions le groupe de ne pas y jeter de sel. La douleur est vive et bien présente, illustrée par le fracas d’accords assourdissants comme les sursauts d’une âme meurtrie. Pourtant, les harmonies éthérées et magnifiques dont ne s’embarrasse d’ordinaire pas le doom sont comme un baume qui apaise un peu la souffrance. Le bien nommé « Shiver » l’illustre lorsque s’envole une mélodie que nous croirions venue tout droit du Moyen-Orient. Mêlée à des accords d’une lourdeur sourde, l’effet est saisissant et un solo plaintif ajoute aux frémissements.

Nous ne pouvons reprocher au groupe de se cacher derrière une pléthore d’effets et un son exagérément gonflé. La guitare est tantôt rageuse, tantôt limpide et chaque accord injecte insidieusement le venin épaulé par une batterie dont les coups sur les fûts sont autant de coups de pilon nous faisant courber l’échine.  Puissante, la fulgurance est cependant retenue et rarement l’impression de grands espaces n’aura été si forte. La part belle laissée au silence est pour beaucoup dans ce sentiment d’être au milieu d’un vaste nulle part. Ce deuxième album bénéficie d’une production irréprochable, laissant toute place aux diverses couches de déflagration, qu’elles soient en avant ou en retrait dans le mix.

FVNERALS
crédit : FVNERALS

« Crown » est un sommet de tension où les feed-back appuient le propos du trio rageur et décharné guitare-basse-batterie. Un piano aux accords branlants ouvre « Where » et clôt l’album de notes fébrilement égrenées. Avons-nous atteint la lumière que nous devinions tout au long du parcours ou n’était-ce qu’une illusion ?

Aucune embellie en vue et il n’est point question de catharsis tant le malaise reste palpable à l’issue de l’écoute. Pourtant, FVNERALS réussit à atteindre le sublime tout en remuant jusqu’au tréfonds de nos êtres. Dans ce paysage désolé, la richesse des textures tout comme l’ampleur du chaos subjugue et nous hante des heures après l’écoute.

« Wounds » de FVNERALS est disponible depuis le 14 octobre 2016 chez The Native Sound.


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Olivier Roussel

Olivier Roussel

Accro à toutes les musiques. Son credo : s’autoriser toutes les contradictions en la matière.