[LP] Fire/Works – Shenanigans

Il y a deux ans, le premier album de Fire/Works, duo formé autour des Montréalais Jonathan Peters et David Lagacé, nous séduisait avec raison. Un « Grand Voyageur » éponyme majestueux, des titres qui prenaient la mer (Out At Sea) ou la route de cols enneigés (Heïma). Un disque sublime, profondément attaché à décrire des paysages s’étendant à perte de vue et à couper le souffle.

FireWorks - Shenanigans

Nous voici en octobre 2014, moment choisi par nos deux artisans pour dévoiler « Shenanigans », second album à la maturité avérée, en apparence moins évident, en réalité moins accessible et qui demandera aux auditeurs curieux et patients que nous sommes de prendre le temps nécessaire pour s’en approprier l’écoute. « Shenanigans » porte bien son nom, manigance en français, tant le coup semble bien préparé par Fire/Works pour nous attarder longuement sur ce second opus. C’est peu dire que nous ferons des allers-retours, sans autre but que de revenir sur chaque détail, chaque état, chaque humeur et pigmentation d’une musique aux couleurs automnales, parfois hivernales, où l’été ne semble pas enclin à pointer le moindre de ses rayons.
Porté par une mélancolie qui s’estompe selon les morceaux, Fire/Works nous fait emprunter les trajectoires complexes mais raffinées d’une musique à l’instrumentation prodigieusement travaillée.

Rien que sur la première piste, « Underneath Your Skin », on ressent clairement cette évolution dans l’univers des Canadiens. Quatre minutes toutes en réserve, qui donnent une part égale au chant et aux instruments. Au milieu de pluies rythmiques cuivrées et boisées, la voix de Jonathan Peters se fraye un chemin en compagnie d’une guitare aux notes retentissantes. Un moment à la fois fort et inédit. En peu d’accords joués à la six cordes, conférant un va-et-vient mélodique, le chant nous berce comme une flamme vacillante, accompagné d’une voix féminine subtile et ravissante aux chœurs sur « The Japanese One ». Ou quand les doux murmures réveillent les jeunes fantômes… Parmi d’autres pistes moins marquantes, on s’éprendra pour le chaleureux « Ancestor’s Shadow », rappelant la ferveur du gospel (sûrement en raison de la présence de l’orgue) comme la clameur d’un Bon Iver sur les refrains en choeur. Un instant collectif et fraternel, qu’on aurait bien aimé habiter davantage les autres pistes. Autres moments forts de cet album, « Elephants », où David Lagacé à l’accordéon porte l’enthousiasme collectif propre aux chants de marins et « A Spirit », marche dans la brume, ballade folk romancée par la présence de violoncelles et de violons venant donner un autre souffle et une singularité propre au morceau.

« Shenanigans » n’a rien de l’album nomade qu’était « Grand Voyageur ». Plus grave dans le ton, plus fouillé dans ses constructions, ce nouveau disque n’a plus l’insouciance de son frangin. Nous perdons la légèreté du premier opus pour gagner une certaine noblesse, un goût des mélodies recherchées, de l’insécurité aussi à force de construire des titres moins linéaires. Nous goûtons ainsi à des chansons parfois minimalistes (les orchestraux Ruins, Ruins et Cardboard, l’instrumental Staircase), qui nous laissent périodiquement un peu seuls face à la musique, sans repère.

FireWorks

« Shenanigans » de Fire/Works, sortie le 7 octobre 2014 chez Coyote Records / Abuzive musik inc.


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Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques