[EP] Fil Bo Riva – If You’re Right, It’s Alright

Sur le fil, Fil Bo Riva l’est certainement. Une corde bien grosse alors, pour supporter sa voix rauque et sa bipolarité musicale. Il y a de quoi écouter, de quoi rire et de quoi pleurer. Avec ses cinq morceaux à la dualité lunaire, « If You’re Right, It’s Alright » est un minéral corsé tout droit sorti d’une roche précieuse dont nous n’avons pas encore mesuré toute sa richesse.

Fil Bo Riva - If You’re Right, It’s Alright

Il est difficile de croire qu’il fut bercé par la musique italienne des années 60. La première raison réside dans son origine : Filippo Bonamici est né et a grandi à Rome. Plus tard, les Beatles et les Rolling Stones commenceront à façonner sa toile musicale. Sans léger traumatisme, les quatre années qu’il a passées dans un pensionnat religieux pour garçons en Irlande n’ont heureusement pas eu raison de sa curiosité. Bien au contraire, elles lui ont permis de s’ouvrir au monde – non ecclésiastique de surcroît. Après une installation à Berlin et une rupture amoureuse (schéma classique de l’auteur en peine), Fil Bo Riva voit le jour sous le joug d’une voix rocailleuse qui sonne blues, folk et rock’n’roll. Et tandis que les cinq morceaux de « If You’re Right, It’s Alright » se déversent dans nos têtes comme une chute de graviers, nous nous demandons où il puise toute l’énergie et la force de cette voix éméchée.

« J’ai toujours eu dans un coin de ma tête l’idée de devenir musicien, mais j’étais occupé à autre chose – travailler dans des cuisines ou comme barman à Munich, Madrid et Rome ou étudier le design industriel à Berlin. Ce genre de choses. J’avais joué dans différents groupes, mais je n’avais jamais cru qu’on pourrait y arriver. Sans parler des avertissements de mes amis, du genre : « La musique ? Tu finiras dans la rue ! » » Ironiquement, ce sont en quelque sorte les rues européennes qui ont élevé la musicalité de Fil Bo Riva, jusqu’à ce qu’il tombe dans les bras de Felix A. Remm et de Robert Stephenson que l’on peut présenter comme ses deux producteurs, dont l’un a élargi son paysage sonore et l’autre l’a traîné directement du bitume à son studio pour y enregistrer les chansons de cet EP.

« Je ne sais pas lire la musique, je suis complètement autodidacte. Donc je commence toujours par me demander quel feeling et quelle émotion faire passer. Qu’est-ce que je veux dire ? Au bout du compte, tout ce dont tu fais, toute expérience t’apprend quelque chose. Et ces leçons doivent se refléter dans ton travail, sinon tu risques de succomber à la stagnation. » L’archétype même de l’artiste vagabond, qui est aujourd’hui tristement utilisé à défaut par les majors, reprend toute sa valeur légendaire dans le travail de Fil Bo Riva, si tant est qu’une légère mélancolie et un travail très fin sur les genres et leur rythme viennent ajouter une plus-value teintée de saut d’humeurs irrésistibles (« Like Eye Did »), voguant ainsi entre la résilience crado (« Killer Queen ») et l’abondance lunaire (« The Falling »). Et pendant que Claudio Capéo se force un peu trop la voix sur son accordéon – à croire qu’il voudrait devenir aphone –, Fil Bo Riva s’élève à bien plus, en taillant son aura magique au burin. Nous attendons de pied ferme sa statue.

Fil Bo Riva

« If You’re Right, It’s Alright » de Fil Bo Riva est disponible depuis le 23 septembre 2016 chez [PIAS] Germany.


Retrouvez Fil Bo Riva sur :
FacebookTwitterSoundcloud

Photo of author

Julien Catala

chroniqueur mélomane, amoureux des échanges créés autour de la musique indépendante