Cyesm – Half Of A X-ing

C’est pas trop tôt !
Il aura fallu 4 albums depuis Rough (2009) pour que Cyesm, pierre angulaire du label manceau Good Citizen Factory, nous sorte autre chose que de la soupe indigeste et insipide.
Il faut dire aussi que Pascal Boudet (pilote de la machine Cyesm) avait fait fort pour Rough, album aux multiples facettes et aux nombreux invités de talent (Monsieur Saï, Pandra ou encore Wun Spirit pour ne citer qu’eux). Un album qui avait pour grande qualité un fort dynamisme et un éclectisme ne se perdant dans un ensemble trop hétéroclite. Un grand album en somme.

Oublions tout ce qui fût produit entre 2009 et 2012 avec cette nouvelle fournée « Half Of A X-Ing » supposée être la bande originale d’un long métrage encore secret (ou fictif ?).
Pour cet opus, le boulimique de production a décidé de revoir certains de ses fondamentaux, afin de surprendre son auditoire et ses outils de production.

En effet, « Half Of A X-Ing » n’est pas un simple album pour Cyesm. C’est l’Album qu’il faut retenir de Cyesm. Une grande œuvre est ainsi née ; percutante, dramatique et passionnante, les trois mots me venant en premier à l’esprit à l’écoute d’Half Of A X-Ing.

Ici, le musicien prime sur le producteur, ce qui ne fût pas le cas pendant longtemps. On a affaire à un album d’une cohérence rare et à l’histoire sonore avalant les oreilles dans une salive de crasse.

En même temps, ce recueil de chansons démarre très fort avec l’introductif « Overture » qui annonce les couleurs de l’album : noires et parfois rougeâtre (doit-on y voir un lien avec son vieil album, récemment réédité, The Murder Of Loretta Shawn ou la très belle BO d’un film imaginaire ?).

Est-ce de la pure prétention de nommer son morceau « The Perfect Track » ? On ne va pas chercher à répondre à la question, mais il est clair qu’on a là un des meilleurs morceaux de l’album. Illustrant très bien celui-ci à travers une progression folle qui se conclue en apothéose sonore, on pense énormément à une version plus actuelle d’Ez3kiel d’ailleurs. Les sons choisis ne ressemblent pas à ce que l’on a l’habitude d’entre chez Cyesm mais on reconnaît pourtant sa patte, en particulier sur les sons de batteries choisis (à mes yeux le repère idéal pour deviner une composition du sieur, ses sons de caisse claire, hi-hat et le groove choisi).

Les morceaux suivants s’inscrivent dans la lignée de celui-ci jusqu’à une track légèrement surprenante : « Meet Me At The Pub ». Cette piste a un groove très singulier où l’on imaginerait idéalement un rappeur s’exerçant dessus.
La basse emporte l’auditeur vraiment très loin, tout comme ce synthétiseur apparaissant de temps en temps pour nous prouver que notre producteur s’inscrit bien dans l’air du temps ; dans tout ce que 2012 a de génial musicalement.

L’album se poursuit et on a droit à l’interlude émotionnel qui fait vraiment du bien « Gone Is A State ».
Ici, on se repose enfin un peu les oreilles après toutes ses explosions synthétiques, avant de repartir au combat sur « About To Turn » qui nous envoie directement en plein cauchemar morbide. Le glas sonne.
La suite n’est que recueil. « Surrender » impose le respect et l’introspection, un morceau à la production impeccable où la basse ronfle, et aux sons magnifiques. C’est féerique, c’est triste, c’est beau !

Cette nouvelle galette se termine sur « Hoax », émissaire de la mouvance musicale actuelle, la marque que le dubstep a laissée ces dernières années. Le bon dubstep, pas cette bouse servile qu’on est amené quotidiennement à entendre. Ici, on en parle dans le sens d’une rythmique servant le groove et les émotions. On parle de musique.

Pour cette première chronique, j’ai souhaité me pencher sur un artiste que je suis depuis longtemps. Je dois avouer avoir démarré l’écoute de cet album avec l’intime conviction que j’allais encore m’emmerder à l’écoute de ses productions. Pourtant, Cyesm m’a mis sur le cul. C’est la troisième fois maintenant ; la première fois ce fût à l’écoute de Loretta Shawn et la seconde à l’écoute de Rough.
On a ici affaire à un très grand artiste dont j’aimerais pouvoir remettre en cause son choix de sortir un album tous les deux mois, mais un album de cette grandeur m’en empêche. Cyesm se veut plus dub, plus mûr, moins instantané et plus intelligent. Plus profond aussi. On a le droit à un très grand album d’un artiste qui gagnerait à se produire beaucoup plus en concert avec un réel groupe autour de lui.

http://www.gcfactory.org/cyesm-half-of-a-x-ing-free-download/

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Maxime Dobosz

chroniqueur attaché aux expériences sensorielles inédites procurées par la musique