[Clip] [Exclusivité] Claptrap – Public Eye

Tout fan de rock indé hexagonal se doit de connaître Éric Pasquereau. Musicien inventif et polymorphe, chanteur habité, il est bien évidemment l’un des membres éminents de Papier Tigre et par extension de la fameuse Colonie de Vacances. Sous l’alias, The Patriotic Sunday de 2005 à 2015, il laissait s’exprimer ses propres fantômes folk, ses élans pop, mais aussi sa propre curiosité musicale avec une sensibilité peu commune. C’est donc avec une certaine excitation que la rédaction d’indiemusic a accueilli les prémices d’une nouvelle aventure, sous l’entité Claptrap. L’honneur nous est d’ailleurs fait de pouvoir présenter en exclusivité pour vos yeux ébahis (elle est facile !) le clip du morceau « Public Eye ».

Claptrap peut être d’ailleurs considéré bien plus comme un quatuor, qu’une expérience solitaire, même si Éric Pasquereau a signé tous les morceaux. En même temps, avec lui, la musique s’envisage rarement solo. Il s’est donc entouré de musiciens expérimentés et aventureux en les personnes de Julien Chevalier de La Terre Tremble !!! ayant aussi posé sa voix et sa guitare sur l’album « Actual Fiction » de The Patriotic Sunday en 2011 ; Paul Loiseau, pour un CV assez similaire du côté de la Terre Tremble !!! alors que du côté de The Patriotic Sunday, son spectre musical couvrait piano, percussions, claviers, batterie et guitare ; et enfin Vincent Robert, la voix et les claviers des géniaux Electric Electric. À noter que sur scène, le groupe verra l’arrivée de la talentueuse et aventureuse musicienne Rachel Langlais (Pyjamarama, Boy & The Echo Choir…), elle a d’ailleurs sorti un album d’ambient expérimental de piano, « Dothe », préparé sur Un je-ne-sais-quoi, le même label que Claptrap. Ainsi Éric Pasquereau les a embarqués sans aucun mal, dans ses envies d’expérimentations et d’explorations, en particulier dans la richesse de timbres et de textures sonores, des plus acoustiques au plus synthétiques, d’un instrumentarium iconoclaste et foisonnant propice à toutes les déviations stylistiques. « Public Eye » en est un parfait exemple. Il s’ouvre sur une digression esthétique travaillant les vertus évocatrices de la dissonance des cordes d’une mandoline (en tout cas, c’est que nous supposons). Cette sonorité vibrante installe un état d’équilibre fragile, un espace sonore mouvant, sur lequel peut se déployer une sensibilité organique collective digne de feu Blonde Redhead, évoquant non sans hasard les sonorités feutrées de la bossa nova, l’expressionnisme du sirtaki, les lointaines expérimentations psyché des Beatles.

Du côté de l’image, une série de gros plans intrusifs capture le regard de magnifiques yeux, renforce les vertus d’évasion de la musique en nous extirpant progressivement du réel. À tel point que ces pupilles, ces iris, ces cils se détachent progressivement et symboliquement de leurs corps hors champ, pour former des entités fantasmagoriques à part entière. La relation organique entre la musique et l’image démontre une profonde envie de faire vivre une expérience inédite et nouvelle, qui dépasse de fait, les habituels rouages de la musique pop. La voix d’Éric Pasquereau, pleine de nuance et de tendresse semble ainsi faire le lien entre notre monde et un univers parallèle qui semble s’ouvrir à perte de vue (oui, celle-là est facile aussi !) au-delà du cadre. Les repères sont bouleversés. Il y a quelque chose d’enivrant dans cette mécanique créative, qui interpelle et suscite à plein régime l’imaginaire. Une multitude de questions aussi naïves qu’évidentes déboulent sans prévenir : homme ? femme ? triste ? heureux ? en colère ? qui attend ? qui observe ? qui réfléchit ?

crédit : Geoffroy Pithon

Petit conseil : pour profiter pleinement de ce moment, laissez tomber tout ce que vous êtes en train de faire, respirez un grand coup, installez-vous confortablement, activez le plein écran, et surtout laissez-vous happer par ce bonheur musical et vidéo étrange absolument captivant.

« Adulting » de Claptrap, sortie le 28 janvier 2022 chez Un je-ne-sais-quoi.


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Laurent Thore

Laurent Thore

La musique comme le moteur de son imaginaire, qu'elle soit maladroite ou parfaite mais surtout libre et indépendante.