[LP] [Exclusivité] Butch McKoy – Heart Ink Black

Un disque difficilement classable, car ne ressemblant à rien de connu ni de facile dans la composition et l’interprétation. Butch McKoy signe un opus intemporel, mystique et humain, créant ainsi un genre qui lui est propre et ne cesse à aucun moment de fasciner l’auditeur

Butch McKoy - Heart Ink Black

Comment réagir lorsque l’on se retrouve face à une musique que l’on qualifie non pas d’originale, mais de totalement inattendue ? Comment plonger dans les limbes de ces mélodies au cordeau, de ces accords qui, plus que d’être plaqués, vont au contraire prendre un envol imprévisible, tantôt mystérieux, tantôt bienveillant ? Découvrir « Heart Ink Black », le nouvel album de Butch McKoy, revient à accepter de n’avoir aucun préjugé sur son contenu, ni sur sa véritable valeur. Car ces chansons d’un autre temps, de celles que l’on ne comprend qu’une fois confronté à leur puissance émotionnelle, ne se contentent pas de nous frapper ; elles nous hantent, nous possèdent, nous déstabilisent. Et, forcément, nous prouvent que l’on est ici face à un monument extraterrestre hors du commun.

Les pistes de « Heart Ink Black » transcendent les genres, allant du folk le plus intimiste (« Sound Of Love », « My King » et son piano grave et tendu) à des élans presque psychédéliques et atmosphériques (« The Blood »). Continuellement sur le fil du rasoir, au bord du précipice, l’auteur-compositeur distille ses tourments dans des arrangements simples et percutants, comme on peut le constater à travers les élancements en écho de passages entre violence et introspection (« Everlasting », « Eternity »). S’amusant à brouiller les repères et abandonnant le format couplet-refrain pour, au contraire, faire de chaque titre une quête existentielle à part entière, Butch McKoy nous convie à une errance sur les plaines désertiques qu’il parcourt tel un ermite, sans destination connue ni boussole pour lui permettre d’orienter sa pensée (« New Wine », poignant). Et quand l’électricité apparaît enfin, seule source de lumière visible à l’horizon, c’est pour mieux nous bousculer et nous pousser vers l’abysse, quelque part au milieu de la fureur et de la tension (« The Plain »).

Au centre de ces bouillonnements volcaniques, de cette implosion de l’âme et du corps, la voix tremble, évolue, se modifie selon le carcan sonore dans lequel elle se meut, telle le serpent tentateur nous poussant au péché. Vivant chaque mot comme s’il était le dernier, l’artiste s’approprie les syllabes, les malmène, les étreint avec une passion et une dévotion de tous les instants. Tour à tour fantomatique et palpitant, ce chant du désespoir et de la remise en question de frontières trop souvent réductrices rugit, pleure, crie. Alors, « Heart Ink Black » se métamorphose, créature hybride venue du centre de la terre, là où la lave et le feu ne demandent qu’à remonter vers la surface et brûler nos cœurs. Un objet harmonique incroyable et fascinant, que l’on écoute encore et encore, sans aucune lassitude. La source inépuisable d’une introspection se faisant chair et sang, pour mieux courir dans nos veines et nos esprits.

Butch McKoy

« Heart Ink Black » ose et dérange, mais demeure avant tout un phénomène atypique et incomparable. Une chasse aux démons de notre quotidien. L’exutoire idéal de nos troubles les plus secrets et tendancieux. Une référence infinie et vitale qui fera couler beaucoup d’encre (noire, de préférence)…

« Heart Ink Black » de Butch McKoy, sortie le 29 avril 2016 en version digitale et le 13 mai 2016 en version physique chez Bruit Blanc.


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Raphaël Duprez

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