Le musicien français -bat- alias Baptiste Giuliano se raconte avec beaucoup de sincérité, de générosité et de poésie dans le morceau éponyme de son prochain album, sorte de livre ouvert sur sa propre vie où le geste créatif devient cet étonnant exercice de synthèse et de recul sur l’existence. Dans cet élan artistique qui dépasse allègrement le strict cadre de la musique, il tend ainsi des ficelles entre tous les aspects de sa propre vie, son passé de sportif de haut niveau, son rôle dans l’éducation, sa famille, sa musique, pour dessiner la quadrichromie de son identité riche et entière. Très loin du simple concept, ce morceau se révèle avant tout comme un acte de pure humanité, de la part d’un artiste, totalement impliqué dans son corps comme dans sa tête dans sa propre musique.
En toute simplicité, -bat- nous invite d’ailleurs dans la vidéo associée à ce morceau pivot de son nouveau long format, à pénétrer les coulisses de sa démarche, une démarche colorée et vibrante, remplie de couleurs vives, parcourue par des sentiments multiples : la nostalgie, l’espoir, la frustration, le regret, la sagesse… Et ce qui relève de l’intime devient alors universel. Il y a bien sûr le langage des mots en premier lieu, mais aussi celui du corps puis celui de l’accordéon, instrument fétiche et emblématique de -bat-, qui donne une tonalité particulière à cet élan égo trip subtil et inventif. Ainsi chacun, chacune pourra trouver des échos aux paroles de la chanson dans sa propre existence. À travers un état d’esprit totalement volontaire et altruiste, Baptiste affirme plus largement à son humble échelle, dans le processus de création de son album, cette proximité entre l’artiste et l’artisan. Loin des superproductions et de la surenchère de la grande industrie musicale, -bat- revendique dans le faire, une musique à taille humaine, mais absolument pas dénuée d’ambitions, qu’elles soient esthétiques, performatives, poétiques, pluridisciplinaires… Il a par exemple ainsi sollicité l’artiste Alias Ipin pour une série de 40 sérigraphies, qui accompagneront la sortie vinyle de l’album, tout en répondant de manière troublante aux paroles de « QUADRACHROMIE ».
Ce clip sera la rampe de lancement d’un album prenant le parti de s’adresser directement à nous, pour nous dire les choses simplement, sans tomber dans le pathos, le gnangnan, le convenu, le banal. Il crée ainsi une troublante proximité avec son auteur. Dans une période propice à la tentation du jeunisme, -bat- prouve par là même tout simplement, qu’à la quarantaine passée qu’il est toujours possible de se réinventer quand la passion est intacte, et l’inspiration mordante. Tout en conservant son ADN « chanson » et des parallèles évidents avec des artistes comme Java, Mano Solo, Zoufris Maracas et même les Négresses Vertes (qui d’ailleurs n’avaient pas hésité à s’immerger dans le bain des musiques électroniques aux côtés du producteur et musicien anglais Howie B au moment de l’album « Trabendo », en 1999), -bat- s’est tourné, quant à lui, vers l’ingénieur du son Charlie Maurin pour soigner tous les recoins de sa musique, et lui donner ce souffle électronique captivant, ce grain décisif et moderne. Il s’impose comme l’une des premières belles surprises de ce début d’année chez indiemusic, au point de le rapprocher d’artistes aussi marquants de ces dernières années tels Odezenne, Lombre ou encore Gaël Faye.
« QUADRACHROMIE » de -bat-, sortie le 27 janvier 2023 chez Green Piste Records. Il se produira le 30 mars 2023 aux Trois Baudets à Paris.
