[LP] ArchiveX – Some Ungodly Hour

ArchiveX tente d’oublier sa vie de soldat dans la rédemption sonore à base d’un gospel envoûtant et électrifiant, hésitant entre soul noire et âme américaine.

ArchiveX - Some Ungodly Hour

Difficile de découvrir vraiment qui est ArchiveX, dont on se fait l’image d’un super-héros noir des 70’s sur fond d’une bande originale de la Stax et le rageur autant que rêveur chapelier fou d’Alice au pays des électrons. Que sait-on de lui ? Il semble qu’il ait vécu des misères et des dépressions au sein d’un bataillon de l’US Navy, se soit reposé dans la musique puis l’a balancé dans un caniveau et y être revenu pour renaître grâce à la puissance d’une Mahalia Jackson. Il se présente comme écrivain, éditeur, insomniaque, et tout cela, sans visage, ou du moins, un visage aussi flou que son art. Musicien surprenant, le Californien découvre dans un vieux chœur gospel une nouvelle pulsation pour son sang. Et l’alchimie opère. Bien sûr, on se rappelle de l’usufruit de Moby et du blues qui avait tout d’une entente cordiale. Ici, on préférera parler d’un amour fou, d’un amour avec sa beauté et sa cruauté et d’une union charnelle (le gospel, avant d’être spirituel, est un séisme des chairs). La voix d’ArchiveX éprouve cette passion pour le gospel, que la voix de Daryll Hall trahissait pour le rhythm’n’blues ; cette frénétique palette de couleurs des cordes vocales, cette ampleur de sons et de sentiments.

« Pilgrim of Sorrow » est une bestialité de profondeur humaine, une sauvagerie vocale, un hymne aux battements d’un cœur moribond. Au-delà de la voix de son auteur réside l’autre part de ces prières ; celle qui promène, entraîne et voyage à travers la musique. Les compositions rythmées et frôlant parfois le tribal, dignes des meilleurs funks et des plus acides rocks, forment un zigzag incessant allant d’un ordre établi à une surprise. « Intermission » est une preuve de la culture du monsieur et de son irrégulier solfège, de son envie d’expérimenter, de se trouver quelque part sans désirer s’y trouver. Se produisent alors un déconcertant concert, un surprenant mélange, une parfaite improvisation, une liberté créative. Alors, à quoi bon essayer de découvrir le vrai visage de cet alias : le mystère lui permet l’expérience libre et le résultat est si incisif que l’inconnu n’est qu’un attrait de plus. Son disque sera sous peu remixé, autre piste pour nous dépister et aller plus loin encore dans les tubes à essai de son art, en insufflant plus d’électronique dans son vieux chœur. ArchiveX vient en réalité de nous faire perdre la notion de temps, dans des courants qui s’opposent d’un sud à un nord, du noir au blanc. Voici Thom Yorke dans la peau de James Brown.

Étrangement envoûtant, « Some Ungodly Hour » inquiète autant qu’il intéresse et il est impossible de ne pas y trouver un peu d’or et de trésor. C’est aussi l’une des rares fois qu’une musique à tendance noire (soul, blues, funk…) se mélange si habilement à un rock, indie et même électronique. Une petite encyclopédie de la globalisation humaine en somme.

ArchiveX

« Some Ungodly Hour » de ArchiveX est disponible depuis le 30 septembre 2016 chez Inconvenient Thoughts & Music.
« Some Ungodly Remixes » sortira au printemps 2017, ainsi qu’une édition spéciale prévue la même année.


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Guillaume Mazel

Écrivain, dessinateur et cajolant mon oreille depuis môme, c'est depuis Madrid que je recherche des sensations à transmettre partout.