[EP] Albe – Anémones

Il est, au premier abord, difficile de décrire la musique d’Albe, tant celle-ci joue finement des pulsations électroniques et des courants rock de créations en mouvement constant. « Anémones », tel une fleur filmée en accéléré lors de sa lente progression vers le soleil, attise nos sens et notre imaginaire, périple étonnant et très vite essentiel dans la conception d’un art nouveau, dense et constellé d’infinies myriades sonores.

La cinématographie d’« Anémones », sa capacité à grandir au fur et à mesure de la naissance de ses trois phases, n’exige cependant aucune culture picturale préalable. En effet, Albe se focalise plus précisément sur le film que chacun pourra se faire de ses circonvolutions harmoniques et de ses arrangements progressifs qui – en tout cas, la question se pose régulièrement – paraissent avoir été interprétés par une multitude de musiciens. Armée de ses machines et de sa guitare, la compositrice embrase les brindilles d’une électro hyperactive, complexe sans devenir, à aucun moment, opaque ou instable. La prouesse de l’EP tient dans une équation qu’elle seule pouvait résoudre : réconcilier l’intelligence, seconde après seconde, de tonalités tout sauf semblables et répétitives, à la sensibilité d’une œuvre dont l’auditeur peut immédiatement, et passionnément, s’imprégner.

La différence entre les trois pistes de l’opus se trouve dans leurs intentions profondes, de même que dans leur scrupuleuse succession. « Racines » introduit l’univers d’Albe avec calme et conviction, de quelques notes cristallines suspendus au-dessus du vide à l’entrée de la guitare, ces réponses mutuelles brodant le canevas d’une musique humaine, fluide et tendre. Les rythmes s’intensifient, résonnent et se prolongent au contact d’arpèges et de nappes graves et abyssales ou de larsens parsemés ici ou là, non comme de potentielles menaces, mais bel et bien comme les visions complémentaires de tout un spectre harmonique. « Anémones » expérimente, s’immerge corps et âme dans le langage de l’interprète, succession de surprises célestes et s’amusant à égarer la mélodie afin de ne conserver que l’ambiance dans sa plus pure définition. « Pleine lune » se permettra d’accélérer le tempo et de convier au spectacle nocturne du disque des samples vocaux dont les impulsions définissent un nouveau mode d’expression, une invocation de l’être au cœur d’une constellation électronique et organique.

L’implication d’Albe est totale et donne naissance à une sculpture esthétique vivante et radieuse. « Anémones », stellaire et océanique, confond ciel et mer en rompant, avec délicatesse et respect, l’horizon qui les sépare.

« Anémones » d’Albe, disponible depuis le 22 novembre 2019.


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Raphaël Duprez

En quête constante de découvertes, de surprises et d'artistes passionnés et passionnants.