[Interview] Olivier Connan, programmateur de la Bonne Aventure et des Nuits Secrètes

Ce week-end, la seconde édition de la Bonne Aventure (23 – 24 juin) bat son plein à Dunkerque. Olivier Connan, programmateur du festival, également à la manœuvre des Nuits Secrètes, nous a accordé quelques précieuses minutes de son temps pour nous présenter l’histoire et l’ADN singuliers de ses deux rendez-vous estivaux incontournables des Hauts-de-France.

crédit : Mathieu Drouet
  • Bonjour Olivier, tu es le programmateur des Nuits Secrètes et de la Bonne Aventure. On trouve, d’un côté, un festival qui fête sa 17eédition, identifié auprès du grand public avec ses parcours secrets et ses masques emblématiques, de l’autre, un tout jeune festival dont c’est cette année la seconde édition. Qu’est-ce qui réunit foncièrement ces deux évènements ? Et quelle serait leur singularité ?

Ce qui les réunit, c’est la fête, les artistes, un public et le lieu où ça se passe. C’est le plus important. Certains le font dans des champs, des parcs, nous, on a choisi de faire ça en ville. Ce qui les réunit, c’est aussi que c’est familial, c’est une programmation basée sur la fraîcheur, la pop, tout ce qui est dans l’air du temps, des découvertes régionales, des nouveaux albums.
Mais ce qui les différencie, c’est que pour les Nuits Secrètes c’est l’intérieur des terres, le secret de l’Avesnois, et pour la Bonne Aventure, c’est la puissance maritime, la plage, voilà la particularité. Pour faire une différence, je dirai que c’est introspectif et l’autre assez explosif.
Le plus important, c’est de s’amuser avec les deux. Avant tout c’est le plaisir !

  • Les deux évènements se déroulent dans les Hauts-de-France, la nouvelle grande région fusionnant le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie, mais à près de 150 km et deux heures de voiture l’un de l’autre. Si les Nuits Secrètes sont implantées depuis leurs débuts à Aulnoye-Aymeries en plein cœur du Parc Naturel régional de l’Avesnois, la Bonne Aventure a choisi de s’installer au cœur du centre-ville de Dunkerque, en bordure de mer. Qu’est-ce qu’apporte cet éloignement géographique entre les deux évènements ?

Ce que ça apporte, c’est une vision particulière du Nord de la France. C’est une terre de fêtes avec le carnaval de Dunkerque ou bien Lille 2004, par exemple. Deux événements qui ont une vision contemporaine de « faire la fête ».

  • Y a-t-il d’ailleurs une recherche de complémentarité entre les deux évènements dans ton travail de programmateur ?

Oui, certains artistes jouent des deux côtés, mais très peu. La complémentarité c’est la manière dont je scénarise les choses. Les parcours secrets sont l’ADN des Nuits Secrètes que l’on a ramené ici. Il y a des similarités pour que le public se repère. Ici, on est en gratuit alors que les Nuits Secrètes, c’est payant. Aulnoye a 17 ans d’existence et ici c’est un jeune bébé : un quasi majeur et un jeune enfant. C’est intéressant de faire les deux, ça donne deux visions du Nord : complémentaires et positives.

  • D’ailleurs, comment définis-tu les grandes lignes de ta programmation ? J’ai pu noter une recherche d’un certain équilibre entre des têtes d’affiche, françaises ou internationales, et des projets émergents ou inédits. 

Tout est résumé, je suis assez d’accord. Il y a une recherche d’actualité avec des nouveaux albums, des artistes dans l’air du temps qu’on a envie de voir et qui sont ici en exclusivité : comme Eddy de Pretto, Angus & Julia Stone ou KOKOKO!. Il y a aussi tout un travail d’émergence de découvertes. Le principe d’un festival, c’est de voir un maximum d’artistes en un minimum de temps, et c’est ce qui plaît au public. Ce qu’on cherche en tant que spectateur, c’est de découvrir des nouveaux groupes et de nouveaux univers. Plus de 50 concerts ici et 70 à Aulnoyes, c’est une sorte d’épopée, le public aime cette ivresse musicale.

  • Est-ce que la découverte doit toujours être le moteur du travail d’un programmateur ?

Oui, je pense. Surtout quand on parle de « musiques actuelles », car il y a un travail historique avec les artistes, mais aussi d’actualité, par exemple avec le nouvel album de Camille. Elle est venue à Aulnoye trois fois, et à chaque fois il y avait l’actualité de son album. Et ça intéresse le public de pouvoir suivre de nouveaux artistes et d’autres qui sont des compagnons du festival, et de voir l’avancée de l’artiste.

  • Quand on pense Nuits Secrètes, la notion de « parcours secrets » n’est jamais bien loin. Comment est née cette idée de parcours et étiez-vous les premiers, du moins en France, à proposer ce concept original ? La Bonne Aventure ne serait-elle pas finalement la petite sœur, l’héritière de cette tradition nordique ?

Nordique… Nordiste ! Les parcours secrets, c’est sorti de ma tête, je suis parti de ma pratique de festivalier, je vais toujours beaucoup dans des concerts et des festivals. C’est une manière originale de présenter les artistes, on est en petit comité, avec des configurations et des endroits différents sur lesquels on travaille en sur-mesure. Il y a 100 personnes, et donc c’est une rencontre intime avec l’artiste. C’est complémentaire avec ce qu’on fait sur les grandes scènes. C’est un modèle déposé, dont on a déposé le concept et dont certains s’inspirent. La Bonne Aventure, c’est un peu les Nuits Secrètes à la plage.

  • Peux-tu me raconter concrètement ce qu’est un parcours secret ? Comment repère-t-on ces lieux et convainc-t-on en tant que programmateur un groupe, un artiste de participer à ce format de concert hors cadre si je puis dire ?

C’est d’abord un gros travail de repérage des lieux. On se balade toute l’année dans les villes et villages aux alentours de Dunkerque et d’Aulnoye-Aymeries, on essaye d’aller dans lieux dans lesquels on n’est pas allé les années précédentes. Après, c’est le regard que je vais avoir sur le lieu qui va m’inspirer et qui va me permettre de croiser ça avec les univers artistiques que j’essaye d’inviter. La plupart des artistes sont intrigués parce que ce n’est pas tous les jours qu’on a ce type de proposition. Tous ne se prêtent pas au jeu, parce que sur un plan médiatique, quand tu es en tournée, l’enjeu est moindre de faire un parcours secret, alors qu’il est très important sur le plan artistique. Par exemple, il y a Vanessa Wagner qui joue ce week-end à La Bonne Aventure et elle a travaillé une performance spécialement pour ici. On les convainc avec de la ferveur !

  • Quels sont les retours les plus spontanés et encourageants que tu as eu des festivaliers ou des artistes qui ont pris part à ces parcours secrets ?

Les retours se font en direct pendant le concert. Le public n’est pas habitué à avoir ce genre de configuration où ils sont très proches de l’artiste, avec le sentiment d’avoir un concert à la maison, chez eux. Ça touche presque des sensations physiques. Les plus beaux retours se font en direct et c’est ça qui est bien.

  • L’autre grand rendez-vous des Nuits Secrètes comme de la Bonne Aventure, ce sont ses Grandes Scènes où vont jouer les grands noms de la programmation. Quels sont, pour chaque rendez-vous, les trois concerts que tu ne voudrais manquer pour rien au monde cette année ?

J’ai plutôt l’habitude de défendre ma programmation, donc je pense qu’à La Bonne Aventure, ce qu’il ne faut pas rater c’est KOKOKO!. Les Marcels parce qu’il y a une histoire particulière avec le Nord, puisqu’ils sont d’ici, ils ont préparé un set spécial ! Et aussi j’adore Camille.

À Aulnoyes il y a alt-J, Lomepal et puis Meute.

  • Qu’en est-il des nouveaux talents ? Des concerts créés spécialement pour l’occasion ?

Il y en a plein. Sur le front de mer, tout ce qu’on fait est assez spécial à l’image des Mamys and Papys et de Salt and Pepper, le croisement des deux chorales qui est unique, c’est les plus vieux qui sont les plus jeunes. Il y a plein de projets spéciaux, mais c’est ce qui plaît dans les festivals : un festival, c’est de la rareté et de l’inédit, donc c’est ce qu’on propose.

  • Pour terminer, quelle est ta botte secrète pour convaincre nos lecteurs de venir sur les Nuits Secrètes et la Bonne Aventure cet été ?

Laissez-vous guider par la programmation, faites-lui confiance et ouvrez vos chakras !


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Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques