Alors que son premier album, « Lovers Be Alert », sort demain, Einleit nous convie à découvrir son univers si particulier grâce aux superbes prémisses annoncées par « Pull My Heart », court-métrage à la fois contemplatif et vertigineux faisant du lien amoureux et passionné la source de scènes aussi troublantes que fascinantes.
Dans un univers aseptisé et terne, les protagonistes de « Pull My Heart » se regardent, s’évitent, se frôlent ou s’accrochent l’un à l’autre en silence, laissant l’image parler pour eux. Difficile choix artistique de la part de Einleit avec ce nouveau clip : car le handicap et ses conséquences sont au cœur de son propos, tant musical que visuel. La mélancolie et la solitude côtoient le sacrifice dans des mouvements de caméra lents et précis, chaque pictogramme mis en scène par Masato Riesser et James F. Coton (avec l’aide incomparable de leur directeur de la photographie, Alexandre Jamin) ressemblant à s’y méprendre à un tableau tracé par de grands maîtres de la peinture, Edward Hopper en tête. Dans cette évanescence picturale, le titre lui-même s’étire et semble porter l’espoir d’un éveil, d’un geste, d’un mouvement. On est triste. On a peur. On reste sans voix devant ce couple à la dérive, porté par le caractère féminin ici tourmenté et perdu.
Objet de fantasme, d’abandon et de doute, « Pull My Heart » nous frappe par la violence de sa suggestivité, par la sincérité de son émoi intérieur. Vaincre le sort qui s’acharne paraît impossible et éphémère, le quotidien ressemblant à une éternelle répétition. On ne verra jamais l’acte de libération, aussi terrifiant soit-il ; au contraire, on se laissera prendre par surprise devant ces vignettes d’un drame annoncé, sans que celui-ci ne nous saute cruellement aux yeux. Et cette question, posée par Einleit à travers sa chanson : qui décide du sort de l’autre ? Une vidéo inoubliable, chargée d’angoisse et de pureté.
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