[LP] Dätcha Mandala – Rokh

Depuis quelques mois, la carrière de Dätcha Mandala a connu une formidable ascension, largement méritée certes, mais qui aurait pu mettre au groupe une pression parfaitement compréhensible. On attendait donc leur nouvel album afin de prolonger la magie ou, au contraire, de la voir stagner, selon la façon dont chacun se positionne. Constat sans appel : l’opus est bel et bien celui de la consécration, repoussant les limites du rock dans une folie mélodique inspirée et contagieuse. Le genre de disque dont on ne ressort pas indemne.

Nul n’aurait cru avoir la chance de voir Dätcha Mandala fouler les planches du Stade de France ; pourtant, le rêve est bel et bien devenu réalité, grâce à une première partie n’étant pas due au hasard pour Les Insus, le 15 septembre dernier. Nous n’avions pas la chance d’y être mais, selon ce que nous avons pu briguer au fil des médias, l’extase était totale, tant pour le public que pour les Bordelais. C’est dans ces circonstances que, presque deux mois jour pour jour après l’événement, arrive « Rokh », nouvelle pépite de nos compagnons de plaisir dans les moments de doute. Verdict ? « Rokh » est, tout simplement, LE monument musical de cette fin d’année, délivrant plus de quarante minutes d’un rock à la fois chargé de sueur et intelligent, décrochant la mâchoires et les uppercuts sonores au moyen d’un irréprochable sens de la composition et de la production.

Entrer dans la lumière, sans attendre : « Have You Seen The Light ? », faussement apaisé, laisse parler les instincts primaires de nos musiciens, installant, en un roulement de tambour, la sagesse pour mieux la tordre et fausser son apparente passivité. Tout est affaire de dosage, chez Dätcha Mandala : un savant mélange de dégustation et d’orgie, de célébration et de fougue. « Da Blues » erre sur les terres brûlées du style, celles que d’autres ont foulées il y a quarante ans (Janis ?), mais avec une modernité imparable dans le jeu des guitares et de la section rythmique quand, plus loin, « Uncommon Travel » lâche la meute avant de la rappeler au bercail et de célébrer le festin dans un instant acoustique de toute beauté. N’oublions pas, non plus, les constantes prises de risque que Dätcha Mandala décide de saisir à bras le corps afin d’étoffer une écriture déjà profonde : les cordes et le piano de « Misery » sont bouleversants, folie contenue d’une confession harmonique à la sensibilité à fleur de peau, tandis que « Smiling Man », chanson de la mélancolie et de la solitude, nous ferait presque défaillir à travers ses chœurs saisissants et magnifiques. De quoi rivaliser avec la cadence infernale de « Anahâta » et l’inexorable progression de l’étiré et testamentaire « Loot », pièce finale convoquant les esprits malfaisants autant que les anges gardiens.

Synthèse intime et dynamique de décennies pendant lesquelles la colère fréquentait assidûment l’extase, « Rokh » remet les pendules à l’heure et s’installe sur sans conteste au Panthéon des meilleurs albums de rock français de 2017. Dätcha Mandala n’a décidément pas volé sa réputation et la gloire qui s’annonce à lui ; à ne manquer sous aucun prétexte, de crainte de passer à côté d’une collection vibrante et délicieuse de tableaux sonores inoubliables.

crédit : Julien Dupeyron

« Rokh » de Dätcha Mandala, sortie le 10 novembre 2017 chez MRS Red Sound.


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Raphaël Duprez

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