[Live] Slowdive au Trabendo

À un petit mois de la sortie de son quatrième album éponyme, Slowdive est venu faire son premier concert en France en trois ans. Premières impressions sur le retour d’un groupe qui ne semble ne rien avoir perdu de sa grâce et de sa superbe, 22 ans après l’expérimental « Pygmalion ».

Slowdive – crédit : David Servant

En première partie, c’est Dead Sea qui ouvre le bal dans une atmosphère brumeuse et oppressante, où la dream pop flirte avec l’électronique. La voix du projet parisien tente de surfer sur des compositions très produites pour un résultat un peu mitigé, mais avec quelques belles réussites. Une bonne mise en matière qui rappelle simplement à quel point la tête d’affiche du jour influence encore la nouvelle scène, jusqu’en France.

L’arrivée de Slowdive se fait peu après, vers 21 h, avec en bande-son « Deep Blue Day » de Brian Eno. Comme il y a vingt ans, en fait, quand ce dernier collaborait avec le groupe ; une manière de dire que le temps s’était simplement arrêté pour Slowdive, qui reprend juste les choses là où il les avait laissées… Ou, du moins, à son son pré-« Pygmalion », c’est-à-dire entre shoegaze et dream pop, avec sa formule classique à trois guitaristes, un bassiste et un batteur. Ainsi, les cordes aiguisées du groupe – qui évolue toujours le nez penché sur ses impressionnantes collections de pédales – n’ont, de cette façon, le droit qu’à un léger complément, avec un petit synthé pris en mains par Rachel Goswell de façon très intermittente, notamment pour les nouvelles compositions. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la beauté de leur son, éthéré, onirique, mélancolique, n’a pas pris une ride.

Après 22 ans de silence, le long hiatus de Slowdive a effectivement été brisé par les deux morceaux géniaux que sont « Star Roving » et « Sugar For The Pill », en attendant un quatrième album sublime. Le quintet n’a rien perdu de sa superbe sur scène, avec ces deux singles qui symbolisent bien deux couleurs auxquelles le groupe s’attache depuis ses débuts. Shoegaze pour le premier, avec ses cordes saturées et distordues sur des refrains instrumentaux mélodiques et jouissifs. Dream pop pour le second, par son onirisme et sa mélancolie qui ont inspiré de nombreux groupes indie rock des générations suivantes – Beach House en tête -, presque tous les autres morceaux de la setlist pendant le concert sonnant presque comme le rappel de cette évidence.

Et si, sur scène, le groupe est officiellement reformé depuis trois ans – puisqu’il était notamment passé par Paris, au festival Villette Sonique ainsi qu’à La Route du Rock, en 2014 -, ce concert au Trabendo figure comme un symbole alors que c’est toute une génération d’artistes qui revient en force depuis peu, à l’image de My Bloody Valentine et de Ride, qui ont longtemps boxé dans la même catégorie. Comme si le revival 80’s, qui a beaucoup envahi nos ondes et définissait presque une ambiance globale, semblait petit-à-petit être remplacé par celui des années 90 dans les esprits. Mis à part ses nouveaux sons, Slowdive n’hésite ainsi pas à accomplir de longs retours en arrière ; même si, par exemple, « Catch The Breeze » était le seul extrait du premier album présent sur cette setlist, qui a en fait surtout donné la part belle au culte « Souvlaki ».

C’est d’ailleurs en réécoutant des titres comme « When The Sun Hits » qu’on se rend aussi compte à quel point les voix de Neil Halstead et Rachel Goswell nous avaient manqués, que ce soit tour à tour ou en harmonie. Dès l’entrée sur scène, l’émotion semblait assez palpable, à l’image des multiples sourires de Rachel échangés presque individuellement avec le public parisien, ou des cris d’excitation des fans qui se sont arrachés tous les billets du soir. Nous avons d’ailleurs remarqué que toutes les générations étaient assez représentées dans la fosse de la salle de la Villette, autant pour celles qui ont vécu les premières années du groupe que celles qui étaient à peine sorties du landau quand il se séparait en 1995.

Après le rappel, c’est le titre « Slowdive », l’un des tout premiers du quintet, qui vient finir le concert sur des notes très shoegaze. Nous n’en demandions pas moins pour confirmer qu’on avait pris une des plus grosses claques de cette année. L’album, qui arrive le 5 mai quant à lui chez Dead Oceans, figurera sûrement en pôle position de nombreux tops de fin d’année. Une belle revanche pour un groupe qui n’avait pas vraiment eu toute la reconnaissance publique et surtout médiatique qu’il méritait alors en son temps.


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Charles Binick

Journaliste indépendant, chroniqueur passionné par toutes les scènes indés et féru de concerts parisiens