Downtempo issu d’un trio en fusion, « Liminal » est tout simplement magnifique, dense et profondément maîtrisé.
Passé les premières secondes de « Liminal », on se demande quelle mouche a piqué l’Australien RY X. Enfin, cette mouche ne devait pas être si énorme. Tout n’a pas changé, sa voix de pleureur mélancolique qui battait nos sentiments il y a quelques mois avec l’EP « Berlin » est toujours aussi translucide. Mais le mérite ne revient pas qu’au castrat bobo. La formule de cet acide se compose de deux autres atomes crochus, Adam Freeland et Steve Nalepa. L’un est un producteur/DJ originaire de Brighton, fervent de cassures analogiques appelé « breakbeat » dans le jargon musical. L’autre nous vient de Los Angeles, producteur, compositeur et professeur de musique électronique et expert du logiciel Ableton Live. Nous voilà avec un triangle géographique qui inspire tant par ses provenances que par la faculté musicale de chacun. « Liminal » ne pouvait qu’être exceptionnel.
La logique formelle de The Acid se veut désorganisée et imprévue, laissant un bon nombre d’obstacles involontaires diriger son inspiration. Un enregistrement de terrain en quelque sorte, qui s’intègre facilement aux bruits externes comme ceux de la rue, des oiseaux, d’un passage de vélo et d’un grincement d’une veste en cuir. Ils ne sont même plus sûrs de ce qu’ils ont composé en premier, comme nous l’explique obscurément Ry : « C’est comme peindre avant de savoir ce que vous voulez peindre. Vous être coincé dans le processus avant d’avoir l’idée de ce que vous voulez réellement faire. C’est la beauté de la liberté. » La beauté de l’inattendu, l’imprévisible saveur de la surprise.
Dans un enchevêtrement de portraits fantomatiques, la pochette sème le trouble. La musique en fait de même. Légères pulsations et longues fréquences, l’ensemble est un downtempo piquant et gazeux. Tout nous monte au nez autant qu’il nous fait planer. Parmi les 11 titres que composent cette poésie électrique, pas un seul morceau n’est en trop, aucun ne rabaisse ou ne relève l’autre. C’est comme dans le cochon, tout est bon. Blague charcutière à part, « Liminal » est tout simplement inventif, ample et profondément maîtrisé. Quand tout est impeccable, les mots se font courts. Élu produit de l’année !
« Liminal » de The Acid, sortie le 9 juillet 2014 chez Infectious / [PIAS].
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