NYX, Sommes-nous les enfants de la nuit ?

La critique d’album est à chaque fois une chose subjective. Notre point de vue est le nôtre et nous le défendons sans pour autant défendre une vérité. Mais il reste cependant cette procédure que nous suivons quasiment tous. De l’ordre du matériel, nous parlons label et nombres de pistes. Musicalement, nous parlons d’instruments et de textes. De techniques et d’influences. Nous en parlons avec nos mots et nos ressentis. Mais un schéma semble à chaque fois structurer nos écrits. Nous écrivons des chroniques musicales. Et faisons en sorte que ça y ressemble. Face à « NYX, Sommes-nous les enfants de la nuit ?»,  je ne peux dresser la chronique qui décortiquerait la performance. En donnant le pour et le contre. Je ne peux et je ne veux pas le décortiquer. Autant le film est expérimental, autant il nous expérimente.

NYX

Sortir de la séance et être surpris par la lumière. Puis marcher, prendre le métro et se rendre compte que l’inertie nous séquestre. C’est un peu ça. C’est complètement ça la sensation après « NYX, Sommes nous des enfants de la nuit ? ». On ne voit plus vraiment les éléments de la même façon. Comme si pendant longtemps un questionnement nous avait échappé. Et que voilà, à présent, il est là et ne veut nous lâcher.
D’ailleurs à cette question, serait-ce une réponse que les filles laissent entrevoir par une des très rares paroles « Je ne sais plus d’où l’on vient » ?

Perdues, elles la suggèrent. Guidées par une lampe torche, elles marchent. Alors qu’en même temps que le film traverse la nuit, Julia et Carla s’engouffrent dans l’obscurité. Du coucher à l’aube, elles traverseront elles aussi le film. Métaphore romanesque. Onirique ou bien lyrique du songe. Les yeux bandés ou masqués. À visage couvert. Pareillement thomR guide notre visage sur ce qu’on ne voit pas, sur ce qui ne devrait pas être à voir. Des visages flous. Des Hommes qui ne vivent plus à travers de corps, mais de silhouettes. Des reflets. Des peaux atténuées par une fenêtre. Regarder l’envers du décor. Ce que la nuit est au jour. Ce que l’ombre est au corps. De la même sorte, les sons explosent à l’écran. Les bruits se superposent à la musique. Ces bruits oubliés, qu’on croyait sans importance, sont révélés, sublimés. Ces allumettes craquées comme des nébuleuses. Une voix grecque hantée de mythologie. La musique est tragique, lourde portée par le violon. Ténébreuse aussi. Monté en intensité sur Nightdrive/Apocalypse.

NYX

Et puis si on se trompait ? Si le vivant n’était pas là où on l’attendait ? Dans la nuit, c’est le corps dénudé d’Ivan Fatjo qui apparaît. Blanc et vitalisé par de nombreuses poussières crépitantes. Vivant de mille façons. Puis lorsque, peu à peu le jour arrive, que le corps se pousse vers la lumière, seuls les vêtements, les parures restent en vue. Terrible mise en abîme du jour et de la représentation humaine.

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La vie et la nuit. La rébellion dans la ville endormie. Sans repères et sans conformisme. La nuit est une mise à nue. Instinctive et introspective. Tache Rouge. Sang qui palpite dans les veines d’un vivant. Incendie londonien qui naît et crépite dans le noir. Telle l’épée d’un torero transperçant le garrot d’un taureau, un avion fend la lune. Violent.
À contre-pied, Julia s’endort, en plein jour, à l’ombre d’une tombe. Cimetière d’un village mort.

NYX

À l’image de la meute d’oiseaux qui se divise, se fuit, se chasse et puis se reforme, le film est un tout. Pas une succession d’images, de sons, d’états. Non un tout. Où l’on s’entrechoque. Où l’on se fait écho. Où est révélé la nuit et son vivant.

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Juliette Durand

étudiante en cinéma, arpenteuse des scènes parisiennes et passionnée des musiques qui prennent aux tripes