[Portrait] My Summer Bee

« My Summer Bee enchaîne avec une pop mélodieuse qui vous fait danser avec nostalgie. C’est très beau, on verrait bien ça dans la bande-son d’un film de Wes Anderson. » Voilà comment vous avez pu entendre parler de My Summer Bee alors que nous présentions il y a trois semaines leur morceau « Time’s Running On ». Leur chargé de communication a lu ces deux petites lignes et, flatté pour eux, nous a contactés pour savoir si nous souhaitions les rencontrer. Après de lourdes négociations autour du planning, nous les avons retrouvé vendredi dernier à l’espace presse du festival Beauregard, où ils se produisaient deux jours plus tard. Ils ont donc sacrifié une partie du concert de Dominique A pour que nous puissions vous les présenter, et ce malgré leur sincère respect pour l’homme et son œuvre. La musique couvrant le son et le journalisme musical étant à petit budget, nous n’avons pu utiliser de micro ou de dactylo pour retranscrire ce qui s’est dit ; mais l’esprit est là.

crédit : Gaelle Evellin
crédit : Gaelle Evellin

My Summer Bee est un groupe de cinq joyeux lurons – quatre garçons et une fille – que nous voyons arriver les cheveux au vent et le sourire aux lèvres, voire la fleur au fusil. Ils se connaissent depuis plus de dix ans et la rencontre se passe comme si on s’était croisé à l’anniversaire d’un ami commun, chacun racontant ses anecdotes et se chambrant gentiment. Originaires de Caen, ils considèrent que c’est le 25 novembre 2013 que le groupe est né, avec la sortie de leur EP « Figurine » sur le label Hooz – EP produit et mixé par Florent Livet, le producteur de Bloc Party.

Ils ont alors tourné un peu et ont participé en octobre 2014 au Nördik Impakt de Caen. Toutefois, c’est à Rennes que leur projet a vraiment pris de l’ampleur. Un matin de 2014, alors qu’ils ne semblent pas remis de la veille, les membres du groupe reçoivent l’appel d’un « inconnu connu » qui n’est autre que Jean-Louis Brossard, le fondateur des Rencontres Trans Musicales de Rennes créées en 1979, référence musicale aujourd’hui en matière de découvertes. Ce féru de musique porte le projet à bout de bras avec Béatrice Macé et choisit lui-même sa programmation à la source. Alors qu’il cherchait une première partie pour le concert de Jungle, qui se produisait en décembre audit festival, ce passionné a pensé à My Summer Bee et les a contactés en personne. Ni une ni deux : la moitié du groupe connaissait déjà Jungle et était conquise. Pour l’autre, ce n’était qu’une question de temps. Quoi qu’il en soit, ils ont unanimement décidé d’accepter une telle offrande et livré alors un concert dont ils se souviennent encore.

Ils se sont dès lors constitué une identité propre pour leur jeu de scène. Une batterie sur la droite, une basse centrale puis un cube blanc. Ce même cube blanc que le batteur assimile au totem de « 2001 : l’Odyssée de l’espace », film épique de Stanley Kubrick. Ces monolithes croisés par les différents personnages du film constituent une source d’inspiration pour l’homme dans ses évolutions successives. Ce qu’ils nomment « le pôle machine » est donc un cube créatif où ils placent leurs claviers et autres instruments – on peut l’apercevoir dans le clip de « Lover Lover ». À deux, ou trois quand Joy, la chanteuse, s’y met, ils tirent de ce cube les harmonies d’une pop électro qui file bien avec l’été tandis que basse et batterie lui donnent du corps. Le micro en mains, Joy a d’ailleurs plutôt tendance à parcourir la scène pour propager son allégresse à l’ensemble du groupe et du public. Parfois, elle fait aussi des duos avec Seb, où aigus et graves se répondent – on se souvient de leur reprise du « Smalltown Boy » de Bronski Beat et c’est le cœur serré qu’on vous écrit ces mots. Ils disent aimer la scène ; c’est là qu’ils expérimentent leurs futurs morceaux et les perfectionnent au fil des représentations. Chacun a ses préférences et certains privilégient le studio à la scène mais, en tout, cas on les a bien senti a posteriori prendre plaisir à jouer sur la scène John du festival Beauregard.

crédit : Gaelle Evellin
crédit : Gaelle Evellin

Ils soignent aussi leur image en réalisant des clips et des pochettes d’albums léchés. Leurs visuels sont tous deux axés autour de jolies fleurs : un cactus pour l’EP « Figurine », des tulipes aux couleurs invraisemblables pour leur titre « Rosemary ». Dans le sensuel « Lover Lover », on peut découvrir les membres du groupe en même temps qu’une allégorie de rencontre dans les bois. Dans le touchant « Time’s Running On », on voit une petite fille blonde se balader dans un Arizona désertique mais peuplé de bienveillantes marionnettes.

Le moment des interviews est celui où l’on tente de percer à jour le mystère de l’alchimie des groupes. Après avoir évoqué la question des origines et de leur rapport à l’élaboration de la musique, nous les interrogeons sur leurs références musicales. La liste ne prétend pas à l’exhaustivité, mais certains noms intéressants ressortent. Parmi les concerts qu’ils aimeraient bien voir durant le festival, nous pouvons citer Étienne Daho, Django Django ou encore Jungle. La chanteuse confie son faible pour Baxter Dury, tandis que nous avouons avoir été déçus par sa prestation, à laquelle nous venions d’assister. En ce qui concerne les autre groupes, ils évoquent Hot Chip, les Belges de Balthazar, Apparat pour l’électro et Twerps pour la ballade.

My Summer Bee © Gaelle Evellin

On leur demande alors quelle musique ils mettent quand ils voguent ensemble sur la route. C’est Nicolas le présupposé à la mixtape du groupe. Selon lui, il y a une musique faite pour les kilomètres à avaler, et la leur se situe dans les très bons « Dummy » et « Roseland NYC Live » de Portishead, ou encore The Streets quand il s’agit de faire de l’autoroute de nuit. Cette playlist, c’est comme un « cocktail de l’ambiance » : c’est elle qui les met dans le bain et crée cette atmosphère qu’on envie entre les membres du groupe.

Sur la fin de l’entrevue, ils nous disent être actuellement en pleine composition pour la sortie d’un album. Notre ultime question est alors la suivante : pas de tournée cet été mais peut-être une en vue pour 2016 afin de faire la promo du futur album ? Encore une fois, nous ne pouvons retranscrire l’exactitude de leurs propos, mais ils ont fait une réponse à la Nicolas Sarkozy : « J’y pense tous les matins en me rasant » – la chanteuse n’est pas barbue, bien sûr, mais disons qu’elle y pense en se brossant les dents. Sur ces bons mots, nous quittons l’espace presse quasiment bras dessus bras dessous ; direction le concert de Dominique A. Nous avons alors affaire à une certaine mise en abyme : nous voyons un groupe qui voit lui-même un autre groupe. Heureux comme des enfants dont on aurait satisfait le plus sain des caprices, ils se pâment devant « le top du top en chanson française », un modèle pour eux.


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Nils Savoye

Mais de quelle situation cette musique pourrait-elle bien être la bande-son ? Réponse d'un étudiant en histoire.