Posant ses chansons sur des lits électro-pop et folk savants et sensibles, Mazarin livre un album franc et humain, entre lyrisme intime et beauté à fleur de peau.
Loin de se cantonner à une énième variation sur le thème de la chanson à textes française, Mazarin préfère emprunter les chemins de traverse en magnifiant ses créations d’arrangements certes sobres, mais dotés d’une originalité frisant la perfection. Car « La croisée des chemins », plus qu’un simple album pop chargé de paroles en langue de Molière, comme on en trouve souvent dans le paysage hexagonal actuel, va plus loin, notamment grâce à une science des arrangements se mettant toujours au service de pistes mélancoliques et sensitives. Un LP recouvert d’une nappe électronique salvatrice, achevant de démontrer que ce projet est définitivement à part.
Ainsi, Pierre Le Feuvre (de son vrai nom) compose avec une dextérité et une ambition sans communes mesures. Et cela fonctionne à merveille : de l’envolée imprévisible de « La tête dans les nuages » à l’entêtant « En manque », le créateur perfectionne chaque élément de ses contes du quotidien et de ses anecdotes grâce à une instrumentation toujours précise et allant à l’essentiel. Ici, l’outil est plus que jamais au service de l’artisan, que ce soit lors de passages plus calmes et minimalistes (la rythmique délicate de « La ramure ») ou de mouvements emportés et fougueux (la fascinante course de « Allez allez »). Mazarin juxtapose sans jamais exagérer ni conduire à la saturation, conservant tout au long de sa route des trésors mélodiques intenses et splendides (« Notre place au soleil »).
La voix, tantôt fragile, tantôt sûre d’elle, nous conte, sur un mode grave, les histoires rationnelles d’émotions qui, elles, ne le sont pas. Une sorte de folie ordinaire qui aurait trouvé ses bases grâce à des termes imagés, métaphoriques parfois mais souvent terrestres. Personnifiant ses propos au travers d’une syntaxe immédiate et originale, Mazarin laisse défiler ses fantasmes et impressions sur un écran en perpétuel mouvement, où les formes sensuelles et grises s’entrelacent passionnément et tendrement. Des poésies du quotidien, entre soufre et déliquescence. Des repères dans la brume, nous guidant au travers d’hivers froids, apportant la chaleur nécessaire à notre progression. Avec, en ligne de mire, la chance exceptionnelle de rencontrer l’homme, nu et nous tendant les bras avec une affection délicate et franche.
Un disque dont la simplicité n’a d’égale que la formidable bienséance et pureté. À écouter seul, avant d’en faire profiter chaque personne que l’on aime et qui mérite d’entendre ce formidable album.
« La croisée des chemins » de Mazarin est disponible depuis le 9 octobre 2015 chez At(h)ome.
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