[LP] Cozy Photo – Graffiti

Pour son premier album, le jeune Texan qui se cache derrière Cozy Photo explore les tréfonds des années 80 avec une synthpop aussi lumineuse qu’abyssale : un voyage électronique, hypnotique et poétique dans un monde coloré d’impressions synthétiques.

Cozy Photo - Graffiti

Petit bijou fragile et naissant, « Graffiti » s’ouvre doucement, amoureusement, comme un petit collier secret qui contiendrait les photos de nos plus beaux ancêtres. Cozy Photo, seul aux synthés et au chant, crée une synthpop électronique et délicate qui évolue entre la mélancolie chère à des groupes comme New Order, Depeche Mode ou Erasure, et une joie moderne toute personnelle. Un mélange très réussi qui fait osciller l’album d’une danse rêveuse et euphorique à un égarement cotonneux et mélancolique. Si Drive avait été un film plus joyeux, c’est certainement cet album qu’on aurait choisi pour en faire la bande-son, joli hymne aux soirées les plus sombres, aux promenades les plus douces et aux rêves les plus éclatants.

La rêverie, chez Cozy Photo, est parcourue de jalons futuristes et synthétiques qui ponctuent l’histoire musicale de la synthpop. Avec « Graffiti », les mélodies sont pleines d’une émotion authentique et touchante. Le rythme est lent et les fleurs mettent du temps à bourgeonner Mais lorsque la puissance mélancolique éclot enfin, l’emportement ne se fait pas attendre : « Hourglass » témoigne d’un amour diffus, « Every Day » évoque le monde de ces désillusions qui touchent au sublime et « Little While » porte sur ses épaules la tristesse d’un compositeur qui hésite entre pleurs et espoir. Cet album oscille sans cesse entre la mélancolie la plus sombre et la joie la plus lumineuse, drôle de combinaison qui ne joue pas sur ce contraste étonnant et fait plutôt en sorte de brouiller les pistes.

Il est tout aussi touchant de ressentir le poids des influences de Cozy Photo que de découvrir l’expression personnelle d’émotions contradictoires. Avec « Underdog Disco », le rythme s’élève et la mélodie se fait conquérante ; tandis qu’avec « Old Land », on renoue avec une délicatesse plus ténébreuse. Si l’album paraît, au premier abord, plutôt uniforme, c’est surtout parce que les intentions qui le traversent se répondent entre elles avec une harmonie expressive assez rare. La particularité de cet opus, c’est que, malgré ses composantes synthétiques, il sait prendre des formes proches de l’organicité : on croit parfois, entre deux coups de synthés, entendre les chants d’un oiseau, reconnaître une mélodie nippone, comme dans « Enter The Maze », ou assister au décollage imminent d’une fusée, comme dans « Launch ». « Graffiti » crée tout un univers en balancement permanent, fondé sur une hésitation assumée entre la tristesse et la joie, l’authentique et le fabriqué, la puissance et la délicatesse.

Cozy Photo

Ce premier album fait acte d’une genèse éblouissante pour Cozy Photo, qui a su réutiliser les codes d’une synthpop aux accents électroniques comme un moule édifiant sur lequel dresser la statue de ses élévations personnelles : « Graffiti » est lumineux, baigné dans les rayons de ces néons qui traversent la modernité des siècles.

« Graffiti » de Cozy Photo est disponible depuis le 9 janvier 2016.


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Julie Albesa

Étudiante en Lettres et mélomane invertébrée, je me démembre en sirotant des cocktails de mélodies éthérées, riffs échaudés et cotonnades étoffées