On aime se perdre dans les itinérances rnb, jazz et soul de l’Australien Chet Faker. On adore même s’abandonner à l’écoute de « Built On Glass », son premier album, deux ans après un debut EP « Thinking in Textures » plein de promesses suivi quelques mois plus tard d’un split EP « Lockjaw », en compagnie du phénomène montant Australien Flume, dont le relaxant single « Drop the Game » s’extrayait avec talent.
Sur le long format, Chet Faker, dont le nom d’artiste fût choisi en référence au trompettiste jazz américain Chet Baker, a de l’audace, de la créativité à revendre.
Loin d’être évident à la première écoute, « Built On Glass » s’apprécie au calme, à tête reposée.
Comme une puissante inspiration, l’album de Faker nous insuffle une bouffée d’air frais tantôt apaisante, tantôt stimulante. « Built On Glass » est la conjoncture de ces deux sensations, leur réunion, leur harmonisation.
Le tempo s’adoucit, se ralentit, se pose, divague. Le chant doux et accueillant de Chet Faker embellit le propos d’une assonance soul délicieuse. Il y a de la poésie dans cette voix, comme dans cette rencontre entre l’instrumental et le vocal. Le mariage est clair, transparent, mais pas d’émotions.
D’émotions, chaque minute en transpire, la sérénité des mots rejoint notre confiance en cet homme.
Impossible en effet ne pas succomber aux charmes de « Talk Is Cheap » où ce saxophone et ces rythmiques electronica qui ne font qu’égayer la voix chaude de l’interprète australien enrichie des chœurs qui le croisent sur son parcours.
Épris d’un certain dynamisme, le charme opère également sur des beats texturés, où le hip-hop trouve des points d’accroches pour s’agripper à la pop. Avec beaucoup de classe sur « Melt », en collaboration avec l’Américaine Kilo Kish dont la voix laisse penser à un mélange idyllique entre le romantisme chaleureux d’une Corinne Bailey Ray et l’intrépidité d’une Lilly Allen.
Que dire ensuite de « Gold », véritable pépite de l’album. Début a capella, sur un orgue et quelques clappements de mains, suivi d’une phase électro-soul délicieuse. Break. Alors le titre passe alors dans une autre dimension. Chet Faker brise les constructions ridiges et les modèle à son image, à son idée de la soul music contemporaine. L’impact est émotif et physique, on sent l’énergie bouillonner, les rythmiques s’installer, l’émoi se conforter.
Conçu comme des intros et outros au sein d’une même piste, Faker évite ainsi les interludes, et préfère les greffer à un processus plus complet, quitte à faire preuve parfois d’un trop-plein d’audace.
Allant jusqu’à perturber le classicisme des titres, « / » joue plus encore la carte de l’émotion, avec un titre où la voix et le saxophone dominent le reste de l’instrumentation, et notamment les percussions qui se laissent oublier malgré leur présence constante.
Changeant, c’est dans la veine de James Blake, avec cette voix sombre et saturée, qu’on se laissera happer par le troublant premier acte de « Blush » avant une seconde partie plus feutrée, au contraste évident, à la réjouissance minimaliste troublante d’abandon et de silence… réanimée sur le troisième et dernier cycle comme une machine à plein régime. Tournoyant et étourdissant.
Et s’il y a encore tant à présenter sur cet album, on retiendra enfin « Cigarettes & Loneliness », l’une des plus belles invitations à le découvrir, à s’approprier le projet de Chet Faker. Un hybride electronica-pop des plus entêtants.
Avec ta main sur ta pochette, Chet, tu me donnes bien envie de t’en taper cinq !
« Built On Glass » de Chet Faker, sortie le 14 avril 2014 chez Future Classic.
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