[LP] Alvvays – Alvvays

Pur concentré d’indie-pop ensoleillée, le premier album éponyme des cinq Canadiens d’Alvvays tombe à pic pour l’été.

Alvvays - Alvvays

Au moment de compléter sa chaude compil du mois d’août, on ne pense pas forcément à se tourner vers les nouveautés canadiennes, quand bien même tous les yeux sont rivés sur le festival Osheaga battant son plein au bord du Saint-Laurent. Néanmoins, c’est à Toronto que le groupe Alvvays s’est formé pour distiller une beach pop DIY aux saveurs bien plus familières de la côte ouest-américaine que celle du lac Ontario, d’abord marqué ces dernières années par sa scène électronique (Deadmau5, Crystal Castles, Austra, etc).

À la tête du projet, la chanteuse Molly Rankin a grandi toute son enfance au son du folk de son père, John Morris Rankin, musicien au sein du groupe The Rankin Family. Accompagnée de ses amis de jeunesse Kerri MacLellan aux claviers et Alec O’Hanley à la guitare, la jolie blonde platine a sorti un premier EP solo en 2010. Alvvays s’est ensuite réellement constitué avec l’arrivée du bassiste Brian Murphy et du batteur Phil Maclssac. La formation au complet a longuement préparé son « debut album » au cours d’une longue série de tournées nord-américaines, en première partie des Pains of Being Pure at Heart, Peter Bjorn and John, Yuck, Fucked Up, Courtney Barnett et autres Protomartyr.

Produit par John Agnello (Kurt Vile, Sonic Youth), Graham Walsh de Holy Fuck et Chad VanGaalen, ce premier effort est facile d’accès et diablement efficace. Les deux vidéos glitch proposées pour les très catchy « Adult Diversion » et « Archie, Marry Me » donnent parfaitement le ton d’une compilation de chansons power-pop agrémentée de douces colorations vintages, qui s’avalent avec gourmandise.

La voix aérienne de Molly Rankin, haute avec son grain juvénile, se pose parfaitement sur les neuf pistes de « Alvvays », sans jamais être étouffée par une production pourtant bien appuyée. Faussement lo-fi, sinon davantage enclin aux bruitages de fond de garages qu’à la clarté du studio, l’instru est fortement marquée par des cascades de guitares très vite saturées et une batterie toujours soutenue. Le groupe redore ainsi des sonorités regrettées des 80s, au point de faire penser à un revival du style C86 :  compilation indie-pop sur cassette audio publiée par NME en 1986, en référence à la jangle-pop de nombreux groupes britanniques de l’époque tels que les Byrds.

Comment résister alors au surf rock plein de charme de « Next of Kin », sorte de Real Estate au féminin, ou encore au chant nonchalant de Rankin sur « Ones Who Love You », une ballade au tempo lent, à la ligne de basse rigoureuse et aux percussions insistantes. Les mélodies entraînantes ne sont pas délaissées par la suite avec « The Agency Group » et « Atop a Cake », mais l’album nous réserve aussi quelques morceaux plus rêveurs, comme l’apaisé « Party Police ». Cela dit, les vagues de synthés apportées par Kerri MacLellan donnent également à l’ensemble un visage plus sombre, de la berceuse obscure « Dives » à la mélancolie du doux final « Red Planet ».

Alvvays

En parfait équilibre, Alvvays alterne ainsi entre de jolis sons estivaux auxquels on est tenté de s’attacher très vite et des ballades moins heureuses. Les textes sont d’ailleurs là pour témoigner d’un vécu douloureux, dont la disparition du père de Molly Rankin, alors à peine âgée de 12 ans. Cependant, la chanteuse ne laisse pas pour autant ses textes sombrer dans le macabre, confiant aux médias anglais vouloir faire transparaître « alcoolisme et dépression autant que les sorties entre amis et les bonnes relations » dans ses écrits. Pour preuve, le single « Adult Diversion » où cohabitent des riffs pimentés et un chant onirique témoigne en faveur de ce séduisant contraste.

Avec autant de peps que de mélancolie, « Alvvays » compose un cocktail idéal pour oublier que la rentrée arrive dans un petit mois. On pourra cependant lui reprocher un ensemble un peu trop vite expédié avec sa petite demi-heure d’écoute, alors qu’il n’aurait pas fait de mal sur la longueur. À moins que cela fournisse une raison supplémentaire pour enclencher le bouton « repeat » !

« Alvvays » de Alvvays est disponible depuis le 18 juillet 2014 chez Transgressive Records.


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Charles Binick

Journaliste indépendant, chroniqueur passionné par toutes les scènes indés et féru de concerts parisiens