[Live] The Psychotic Monks et Cambio Sun au Joker’s Pub

À l’occasion de nos cinq ans, l’équipe d’indiemusic s’est associée à la soirée du jeudi 8 septembre, organisée par le Joker’s Pub d’Angers, qui accueillait deux groupes : Cambio Sun et The Psychotic Monks. Retour sur une programmation palpitante, particulièrement marquée par la prestation habitée du quatuor rock parisien, grandement salué par l’ensemble des spectateurs présents.

The Psychotic Monks © Erwan Iliou
The Psychotic Monks – crédit : Erwan Iliou

À Angers, ce jeudi soir-là, la rentrée estudiantine bat son plein. La jeunesse, en groupe par centaines, est dans la rue, non pas pour manifester, mais bel et bien pour festoyer. Pour nous, le programme est déjà connu depuis plusieurs semaines et il nous tarde de découvrir deux groupes, l’un australien, l’autre parisien, pour lesquels nos confrères ne tarissent pas d’éloges. Il est dix heures quand Cambio Sun grimpe sur les planches. Formé par le chanteur et guitariste Charlie Tait et le batteur John Cleworth, le duo australien échappé de Sydney pour vivre sa passion à Londres, d’une île à l’autre, prépare depuis quelques mois déjà la sortie de son premier album, « Animal Sense ». Cette soirée est l’occasion de découvrir plus vastement l’univers de ces deux globe-trotteurs chaleureux. Dès le début du set, une proposition musicale inédite se dessine à l’écoute des compositions en constante mutation et inclassables des deux compères. Celles-ci gagnent progressivement en intensité pour mieux dévoiler tout leur potentiel onirique.

Pop psychédélique, progressif, math rock même parfois, la musique de Cambio Sun nous tient en haleine sur la longueur, en jouant des vas et viens, des creux et des pics. Charlie Tait, chanteur aux cheveux peroxydés et au look tout droit sorti d’un roman de science-fiction lunaire entre motifs africains et style baroque associé à John Cleworth, batteur énergique et vivant pleinement ce qu’il joue, livrent ensemble une prestation quasi sans interruption, ne laissant presque jamais, sinon à la toute fin du set la possibilité de distinguer les changements de pistes ni d’applaudir la prestation. C’est d’ailleurs le reproche principal que nous pourrons faire aux Australiens, le choix d’un format assez peu commun (nous ne savions pas quand la première piste touchait à sa fin et quand la suivante était convoquée) qui pouvait parfaitement perdre l’auditeur non averti. Sorti de ce déroulé plus expérimental, nous apprécierons davantage les dernières pistes à la durée plus habituelle et à la formule immédiatement accrocheuse. En guise de rappel, Cambio Sun, OVNI musical de cette soirée, réservera à un public particulièrement enthousiaste un ultime morceau rock instrumental, plus concis, mais particulièrement habité. Affaire à suivre très sérieusement !

Après un court entracte, c’est au tour du quatuor rock parisien The Psychotic Monks de prendre la scène, et quelle conquête ! Le jeu se fait d’emblée plus sombre et urgent. Le tambourin frappé avec violence par Paul, derrière ses synthés, s’allie aux accords des guitares rageurs lancés avec instinct et unité par Arthur et Martin. Les notes des synthés nous oppressent dans cet espace de cent âmes, emportées et réunies sous le poids et la hargne des frappes destructrices de Clément derrière les fûts. Urgent, déchaîné, impitoyable, et pourtant tellement vivant, le set des Parisiens est habité de passion, de démence et de grandes pulsions. Le jeu s’opère en symbiose, au sein d’une communauté qui se découvre, prête à partager une cause, un acte, mieux encore, une transe collective. Il est alors question de hargne, de passion, d’agitation et de l’envie de réveiller les démons endormis dans la nuit. Les poussées orgasmiques derrière les grattes ne peuvent alors plus masquer les intentions manifestes des Parisiens venus distordre l’esprit des fêtards angevins, avec leurs hymnes rock furibonds, fortement psychédéliques, aussi remuants que leurs cheveux virevoltants.

Les chants poussés à l’unisson procurent déjà le frisson de ces moments de perdition, à la fois terribles et salvateurs. Reviens alors cette idée d’une jeunesse, loin d’être perdue, mais pleine de promesses, celle que ces rockeurs symbolisent, eux qui ont déjà acquis une telle pertinence dans leur jeu et dans leur propos. Il devient alors inévitable que le succès ne puisse pas être le prochain palier de leur fulgurante année, lancée par le remarquable EP « IV ». Prêts à communier, ouverts à ce dialogue pleinement musical, fortement dominé par des rythmiques démentes, les quatre amis, qu’ils bricolent les effets des guitares accroupis au-dessus d’un pedal board ou triturent frénétiquement les touches d’un clavier nous remettent sur le droit chemin de ce qu’est et doit être l’authentique rock. Les membres de The Psychotic Monks, arrivés au bout de leur voyage, et du nôtre également, nous auront saisis par la force, la classe et l’instinct de leurs compositions. Dans l’action et la passion pures, tout en refusant les clichés, le quatuor parisien nous aura conviés à un formidable rite initiatique à ses côtés. Remontés à bloc par un public captivé, frappant des mains et des pieds tout au long du set, Arthur, Martin, Clément et Paul auront eux aussi vécu la transe. Et ce fut une prodigieuse expérience !


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Fred Lombard

Fred Lombard

rédacteur en chef curieux et passionné par les musiques actuelles et éclectiques