[LP] The Cinematic Orchestra – To Believe

Douze années se sont écoulées et la magnificence de « To Build A Home » traine partout, dans les publicités, les bandes-annonces, dans nos têtes et dans nos cœurs. Ver d’oreille mélancolique, ode à nos racines, The Cinematic Orchestra a puisé dans l’inconscient des gens et des plus purs mélomanes une émotion virale des plus pures, celle qui met tout le monde d’accord. « Ma Fleur » est rare, tellement précieux. Et c’est sur ce sublime et intemporel album que les discrets Jason Swinscoe et Dominic Smith nous ont laissés pantois, pour revenir il y a quelques mois avec un nouveau morceau comme pour absoudre toutes les années d’attente. Une absolution presque divine, car l’album qui suit et qui coule désormais dans nos oreilles côtoie des cieux musicaux dont eux seuls ont le secret ; et le titre donné ne fait que le renforcer : « To Believe » replace le monumental génie du groupe dans la course à l’envoutement.

Nous avions le temps de les attendre au tournant, prêts à éjecter notre venin si les choses se présentaient mal où leur magnifique souffle était à court. Rien de tout cela n’est arrivé ; bien au contraire leur fibre s’est renforcée, passée du carbone au marbre : noble, impétueux et en équation avec les questionnements qui nous entourent. « Que croire ? » : c’est la question que The Cinematic Orchestra nous pose sous le titre de ce nouvel album. Questions que les artistes laissent en suspens pour réfléchir à leurs réponses, bien qu’ils aiguillent la tangente dans « A Caged Bird / Imitations of Life » quand Roots Manuva se désole « Situation is strange to us, stranger things are claiming us » sur un rythme percutant et envoûtant relayé par des orchestrations tirées au cordeau.

Si fidèle à leur signature d’artiste, mais en même évolutif dans son ensemble, « To Believe » reprend le mélange de jazz et de symphonies liquides, scintillantes à en pleurer, comme pour « Ma Fleur » avec, en guise, une affluence sur la rythmique swing et analogique du jazz que « Lessons » prouve parfaitement. Pour se liquéfier proprement, pour se morfondre dans l’idéale mélancolie, « The Workers of Art » fait office de bourreau des cœurs en balançant entre l’électro ambiante et la magnificence des cordes qui stoppe littéralement le souffle. Le titre éponyme quant à lui déroule la recette de la ballade spleen entreprise avec « A Build a Home » en compagnie du prometteur Moses Sumney, ici toute en retenu et à la voix cristalline.

Nous finissons dans un regain blues et gospel avec la voix de Heidi Vogel pour « A Promise » qui, durant onze minutes, dégaine tout le crescendo nu-jazz du groupe. Une promesse pour nos oreilles, certes, mais également pour le reste, pour ces questions suspendues qui restent soigneusement en tête. Si la planète vacille, leur musique scintille : l’orchestre cinétique n’a pas perdu une once de génie ni même pris la poussière du temps. Il a totalement muri et dépasse désormais toute spéculation faite durant son absence. The Cinematic Orchestra est toujours sur son trône, bien ancré dans son temps avec une vue plongeante sur son monde. Ces travailleurs de l’art n’ont de cesse de nous faire rêver encore douze années de plus si tel est leur souhait, nous attendrons les yeux brillants.

crédit : Brian « B + » Cross

« To Believe » de The Cinematic Orchestra est disponible depuis le 15 février 2019 chez Ninja Tune.


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Julien Catala

chroniqueur mélomane, amoureux des échanges créés autour de la musique indépendante